Bonjour, bonsoir à toutes les personnes qui nous écoutent. Je suis en compagnie de Christelle Vaugelade-Kalipé, avec qui nous allons aborder le sujet dans ce podcast hebdomadaire de la charge raciale. Christelle, je te laisse te présenter de la manière qui te convient.
Bonjour Esthel, merci pour l’invitation. Pour ma part, je suis une femme noire, mère d’un petit garçon et professionnelle des ressources humaines. Je me définirais comme engagée, particulièrement investie sur les questions de diversité, d’inclusion et de charge raciale.
Qu’est-ce que la charge raciale ? La misogynie noire ?
Merci beaucoup pour cette présentation. Cela m’amène à plusieurs questions que j’aimerais te poser. Tout d’abord, la question centrale de cet épisode : qu’est-ce que la charge raciale et, en particulier, la misogynie noire, puisqu’il s’agit de l’angle que nous avions discuté avant ton passage au micro ? Et aussi, pourquoi choisis-tu de t’exprimer sur ces sujets ?
Je prends la parole sur ces sujets parce que je pense qu’il est essentiel de rendre visibles toutes les réalités qui restent imperceptibles pour ceux qui ne font pas partie des minorités. En ce qui concerne des sujets comme la misogynie noire ou la charge raciale, les personnes non concernées ne peuvent pas véritablement comprendre dans leur chair ces problématiques, il est donc indispensable de les rendre visibles.
Pour moi, le simple fait de prendre la parole, c’est déjà agir. C’est pour cette raison que je le fais. La misogynie noire, ou le « misogynoir », est un terme apparu, si je ne me trompe pas, grâce à l’activiste Moya Bailey. Elle désigne cette expérience douloureuse et unique vécue par les femmes noires, car il y a une question d’intersectionnalité. Elles sont à la fois confrontées au sexisme en tant que femmes, et au racisme en tant que noires. Le « misogynoir » est donc la conjonction de ces deux oppressions.
Les femmes noires sont ciblées par des attitudes et des actions spécifiques, comme l’hypersexualisation, qui peuvent se manifester de différentes manières. Ou encore le stéréotype de la « angry black woman » (la femme noire en colère) est un reflet typique de cette misogynie noire, qui s’exprime, encore une fois, de manière singulière à l’encontre des femmes noires, et qui est étroitement liée à la charge raciale.
La charge raciale est véritablement ce fardeau que l’on porte souvent en silence, et cela contribue à l’invisibilisation de ce sujet. Lorsqu’on fait face à des préjugés ou au racisme, cela se traduit par une hypervigilance, une vigilance qui commence dès l’enfance. Souvent, lorsque l’on est un enfant issu de l’immigration, nos parents nous disent : « Tu devras en faire plus » (sous-entendu, plus que les blancs). « Fais-toi discret, ne fais pas de vagues. »
Ainsi, la charge raciale prend racine à ce moment précis, lorsque l’on se rend compte, en tant qu’enfant issu d’une minorité, que l’on est perçu comme différent. On doit alors adapter et suradapter son comportement pour faire face aux attentes de la société, à l’insertion, etc. Je pense que c’est cela : cette prise de conscience et cette adaptation continue, qui est souvent accompagnée par un silence pesant.
Il ne faut pas trop montrer de colère lorsqu’on nous adresse un commentaire raciste, car on ne veut pas mettre l’autre dans l’embarras. C’est également l’idée de parfois se camoufler. Ne pas porter un motif africain, éviter de s’habiller avec une robe en wax, parce qu’on ne souhaite pas être immédiatement catalogué. Cette suradaptation constante crée une charge mentale importante, et c’est cela que l’on appelle la charge raciale.
Par exemple, si tu es une femme noire aux cheveux crépus, tu pourrais choisir de te les lisser parce que, finalement, ton cheveu est perçu comme politique. Cette volonté de se conformer à une norme « lisse » est un autre aspect de cette charge raciale.
Pourquoi existe-t-il de la misogynie noire ?
En écoutant tes explications sur la charge raciale, cela m’amène à réfléchir : pourquoi y a-t-il de la misogynie noire ? Comment cela est-il apparu ? Qu’est-ce qui l’explique concrètement ?
Nous avons un contexte historique marqué par la domination raciale et la colonisation. Ainsi, le prisme de la couleur est présent dans nos sociétés, et nous vivons également dans une société patriarcale. Par conséquent, la misogynie noire représente cette double peine : être une femme, donc appartenir à une minorité de genre, et en même temps faire partie d’une minorité ethnique.
Ces femmes se retrouvent donc dans une situation où elles subissent à la fois des discriminations et des micro-agressions (même si je n’aime pas beaucoup ce terme, car il a tendance à minimiser les agressions), mais aussi des macro-agressions, de la xénophobie, et des discriminations liées à la charge raciale.
Peux-tu nous donner des exemples de micro et macro agressions ?
Merci pour ces précisions dans notre épisode sur la charge raciale. Est-ce que tu aurais, du coup, des exemples de micro-agressions et de macro-agressions à partager pour les personnes qui nous écoutent et qui ne sont peut-être pas conscientes de ces problématiques liées à la charge raciale ou à la misogynie noire, simplement parce qu’elles ne les vivent pas ? Cela leur permettrait de mieux comprendre et, potentiellement, de savoir comment réagir par la suite, en ayant une idée plus précise de ce que cela représente.
En ce qui concerne les exemples de micro-agressions (encore une fois, je le répète, je n’apprécie pas beaucoup ce terme car il tend à minimiser l’agression), on pourrait citer une situation fréquente : tu rencontres quelqu’un et, très rapidement, la première question qu’on te pose, c’est « Tu viens d’où ? ». Cette question, en soi, n’est pas problématique si elle découle d’un réel intérêt, mais c’est la manière dont elle est posée qui pose problème. Si on se connaît, qu’on a déjà échangé, et que la question arrive naturellement dans le cadre de la conversation, il n’y a pas de souci.
Le problème, c’est que les personnes racisées sont souvent renvoyées à cette idée d’altérité, de différence, avec cette question insistante : « Tu viens d’où ? », qui sous-entend que tu n’es pas « d’ici », que tu n’es pas comme « eux ». Cela constitue une micro-agression qui, bien souvent, n’est même pas perçue comme telle par la personne qui pose la question, mais qui, dans la réalité, en est une.
Un autre exemple de charge raciale est celui du stéréotype de l’« Angry Black Woman », la femme noire en colère. C’est une image très ancrée dans l’imaginaire collectif. Tu peux être confrontée à une situation extrêmement raciste ou sexiste, mais tu te retrouves souvent dans l’impossibilité de l’exprimer librement. Tu dois alors le faire de manière très policée, car tu sais que si tu manifestes ta colère, les gens vont te juger comme hystérique, comme quelqu’un qui dépasse les bornes. Cela, alors que la situation que tu vis est d’une extrême violence.
Il y a aussi ces généralisations blessantes, comme lorsque quelqu’un met de la musique africaine et te dit « Ah, ça, c’est pour toi, les noirs ont le rythme dans la peau », etc. Ce sont toutes ces petites remarques, que ce soit dans la sphère personnelle ou professionnelle, qui provoquent une colère et un épuisement intenses, des violences psychologiques bien que non physiques. C’est cela aussi, la charge raciale.
La discrimination capillaire
Merci beaucoup pour toutes ces explications pour notre épisode sur la charge raciale. Cela me rappelle un échange que j’ai eu avec Clémence Mouellé Moukouri. Elle nous avait parlé de l’association Find Yourself, et nous avions discuté d’un de ses posts récents sur LinkedIn. Elle y mentionnait qu’elle préparait un nouveau gala de l’empowerment, un événement qu’elle organise chaque année.
Elle avait expliqué qu’elle n’avait pas eu le temps de se lisser les cheveux et que sa première réflexion avait été : « Si je me montre avec mes cheveux crépus, on ne va pas me juger comme professionnelle. » Elle avait partagé cette réflexion dans son post LinkedIn.
C’est vrai que, lorsque je l’avais vue à l’événement, je l’avais trouvée magnifique avec ses cheveux crépus. Elle dégageait une telle confiance en elle ! Jamais je n’aurais imaginé, avant de lire son post, qu’elle avait hésité à cause de ce jugement associé aux cheveux crépus, perçus comme non professionnels. Pourtant, ce sont juste des cheveux, et il est parfois difficile de comprendre ces préjugés. Je trouve que c’est important d’en discuter, et j’ai aussi remarqué qu’il y a des avancées concernant les cheveux crépus, notamment sur le plan législatif, pour lutter contre cette forme de discrimination capillaire.
Alors, je ne suis peut-être pas la meilleure pour l’expliquer, mais peut-être que tu pourrais nous éclairer à ce sujet, car je sais que certaines lois évoluent en ce moment sur ces questions. Nous sommes actuellement le 26 juin, donc il est possible que, d’ici à la diffusion de l’épisode sur la charge raciale, certaines choses aient changé, mais je pense que c’est tout de même pertinent d’en parler.
Oui, je rebondis sur ce que tu viens de dire. En fait, la charge raciale, on se l’impose parfois nous-mêmes, en intériorisant les stéréotypes de la société. Ce que tu dis est très juste : en tant que femme noire, mes cheveux crépus sont ceux qui poussent naturellement sur ma tête, il n’y a rien d’anormal à cela. Je ne me transforme pas en ayant les cheveux crépus, je porte simplement mes cheveux tels qu’ils sont, tout comme tout le monde. Encore une fois, c’est juste la nature, et j’aime utiliser cette image car elle est très forte pour illustrer la discrimination liée à la charge raciale.
On n’imaginerait jamais demander à quelqu’un qui a les yeux bleus de porter quotidiennement des lentilles d’une autre couleur, comme marron, sous prétexte que ses yeux bleus ne seraient pas perçus comme professionnels. En formulant cela ainsi, on voit immédiatement ce qui pose problème. Parfois, cette charge raciale est profondément intégrée, et pour répondre à ta question, il y a effectivement un projet de loi sur la discrimination capillaire qui a été adopté, si je ne me trompe pas, en mars ou en avril. On a pris conscience qu’il existe un certain nombre de professions où les salariés sont contraints de cacher leurs tresses ou leurs dreadlocks pour dissimuler leurs cheveux crépus.
Un exemple marquant de charge raciale est celui d’un salarié d’Air France, un steward, qui a dû porter une perruque pendant des années pour exercer son emploi. Air France considérait que ses cheveux naturels, en l’occurrence ses dreadlocks, n’étaient pas professionnels. Il a donc dû se déguiser pour aller travailler en portant une perruque. On pourrait en rire en se demandant pourquoi une loi sur la discrimination capillaire est nécessaire. Mais la réalité, c’est que dans certains environnements professionnels, cela peut être un véritable enjeu.
Aujourd’hui, pour ma part, cela ne me pose pas de problème. Je ne me suis jamais posé la question, car j’ai intégré l’amour de mes cheveux crépus, c’est lié à mon éducation. Je ne me suis donc jamais interrogée sur la manière de porter mes cheveux. Mais si tu poses la question à des personnes concernées, dans neuf cas sur dix, elles te diront qu’elles se sont déjà posé la question, et qu’elles ont modifié leurs cheveux, les ont lissés, pour éviter la discrimination. C’est un véritable fléau.
Merci pour ces précisions pour notre échange sur la charge raciale. Ton exemple des yeux bleus qui devraient être dissimulés sous des lentilles marron est très percutant. Il permet vraiment de saisir tous les enjeux et l’absurdité de la situation, dans laquelle on ne peut même pas porter ses cheveux naturellement. Comme tu le dis, ce sont des cheveux naturels, ceux qui poussent sur notre tête. Il est triste de devoir renier une partie de son identité pour se conformer à une norme injuste, discriminatoire. C’est donc une très bonne chose que ce projet de loi puisse faire évoluer les choses.
Comment aimer ses cheveux crépus ?
Tu parlais tout à l’heure de l’amour que tu as appris à porter à tes cheveux crépus, et cela m’a fait réfléchir. Peut-être que certaines femmes ou certains hommes qui nous écoutent ont des cheveux crépus mais ne les aiment pas. Comment as-tu fait, toi, pour apprendre à aimer tes cheveux, et quels conseils pourrais-tu donner à ces personnes afin qu’elles puissent, elles aussi, aimer leurs cheveux ?
Cette question est étroitement liée à la charge raciale, car elle touche à la manière dont les personnes racisées perçoivent leurs caractéristiques naturelles dans un monde qui valorise d’autres standards.
Je pense que tout commence dès l’enfance, avec l’éducation. Cela passe par l’acceptation de qui l’on est. Ces dernières années, il y a eu un véritable mouvement d’acceptation de la différence, et cela a vraiment fait évoluer les choses.
Lorsque j’étais enfant dans les années 90, allumer la télévision signifiait ne pas voir beaucoup de femmes aux cheveux crépus mises en avant dans l’espace public, les séries ou les films. Les choses changent maintenant, et tant mieux, car je pense que nous avons besoin de modèles. Ce manque de représentation a longtemps renforcé la charge raciale, en marginalisant certains types de beauté et en faisant intérioriser des standards non inclusifs.
En fait, tu as besoin de voir des personnalités comme Christiane Taubira porter ses nattes collées à l’Assemblée nationale. Même si elle n’y est plus aujourd’hui, cela reste un exemple de visibilisation de notre identité. Tu as besoin de regarder la télévision et de voir des personnes qui te ressemblent. Quand tu es enfant, tu as besoin de voir qu’une petite sirène peut aussi être noire. C’est là tout l’enjeu : pour s’aimer, il faut être représenté, inclus dans la société. Il ne faut pas avoir l’impression d’être à part. Je pense que c’est cela qui change véritablement la donne, et cela contribue à réduire la charge raciale que l’on porte au quotidien.
Ensuite, il y a aussi l’éducation que l’on reçoit, ainsi que la connaissance de ses spécificités. Malheureusement, en ce qui concerne les cheveux crépus, beaucoup de personnes ne connaissent pas bien leurs cheveux, car il y a eu des siècles de lissage et de dévalorisation des cheveux crépus. Il est donc nécessaire de déconstruire tout cela, et cela prend du temps. Il faut réapprendre à se réapproprier son corps, à accepter sa noirité et à s’éloigner des normes imposées par la société, ce qui est un élément central de la charge raciale.
L’importance de la représentation
Je suis tellement d’accord avec toi, c’est essentiel d’avoir des modèles, des personnes qui nous ressemblent, car cela inspire, cela donne de la conscience de soi, et cela montre que c’est possible. C’est quelque chose de très puissant, d’autant plus que, historiquement, en tant que femmes, nous avons été invisibilisées. Ce manque de représentation est profondément lié à la charge raciale, car il influence la manière dont les individus se perçoivent dans la société.
Il est donc important de montrer aux petits garçons, et surtout aux petites filles, que tout est possible, bien sûr en fonction de leur volonté, de leurs efforts et d’autres facteurs. Mais cela donne au moins de l’espoir. Par exemple, par rapport à la petite sirène, j’avais vu des vidéos sur les réseaux sociaux où des enfants, surtout des petites filles, étaient ravies, s’exclamant : « C’est moi ! ».
Elles étaient tellement heureuses, et j’ai trouvé cela magnifique. Les gens se concentrent parfois sur de faux problèmes. Qu’est-ce que cela change que la petite sirène soit noire ? Après tout, c’est un personnage fictif. Tout cela montre à quel point la charge raciale pèse dans les perceptions et pourquoi la représentation est essentielle.
J’ai du mal à comprendre pourquoi l’humanité ne peut pas simplement se réjouir pour les autres et voir à quel point la représentation peut apporter de la joie. Il est vrai que Disney pourrait encore plus promouvoir la diversité dans ses créations. Ils ont fait des progrès, avec des films comme La Princesse et la Grenouille et d’autres nouveaux films qui incarnent plus de diversité. Je trouve cela vraiment positif. Cela contribue à alléger, dans une certaine mesure, la charge raciale que ressentent les minorités.
Oui, et pour rebondir sur ce que tu dis, les gens regardent souvent le monde uniquement à travers leurs propres yeux. Ce monde, aujourd’hui, est majoritairement blanc, et quand tu es blanc, les personnages de la société te ressemblent, donc tu ne perçois pas à quel point c’est un sujet douloureux pour ceux qui ne sont pas concernés.
C’est pour cela qu’il est essentiel de prendre la parole et de ne pas rester une minorité silencieuse. Si tu ne dis rien, les autres ne savent pas que cela te blesse de ne jamais avoir de modèle auquel t’identifier. C’est une des manifestations de la charge raciale et de l’invisibilité des minorités dans les représentations.
Il y a aussi une question de visibilité : nous avons le droit d’avoir une place dans l’espace public et dans la société, de raconter nos histoires. La compréhension de ces combats et de ces expériences change véritablement la donne, et c’est lié à la charge raciale.
Oui, je te rejoins entièrement. Je pense souvent, et je le dis dans de nombreux épisodes, que le monde irait beaucoup mieux s’il y avait plus de bienveillance et d’empathie. Finalement, toute la haine qui existe vient d’une profonde méconnaissance et incompréhension de l’autre. Cette ignorance alimente les préjugés et renforce la charge raciale que subissent les minorités.
Je discutais également avec Thérèse Sayarath à propos du rapport à la mort et de l’idée que notre passage sur terre est relativement court. Cela peut parfois pousser les gens à avoir peur d’être remplacés, à penser aux générations futures et à craindre de perdre leur place. Mais en réalité, il n’y a pas de remplacement à craindre. Il s’agit simplement de laisser les autres avoir le droit d’exister. Le monde est si complexe.
Il y a aussi un biais de conformité, dans le sens où l’on consomme du contenu qui nous ressemble, et cela peut nous empêcher de nous mettre à la place de l’autre. Je pense qu’il est essentiel d’apprendre, dès le plus jeune âge, à respecter l’autre, à valoriser et célébrer la différence plutôt que de se concentrer sur ce qui nous oppose. Après tout, il y a tellement de choses qui nous unissent, indépendamment de la couleur de notre peau.
Nous respirons, nous écoutons de la musique, nous mangeons, nous tombons amoureux. Je pense que l’humanité gagnerait beaucoup à se concentrer sur ce qui nous rapproche plutôt que sur ce qui nous sépare. Cela permettrait de réduire la charge raciale en promouvant une meilleure compréhension mutuelle.
C’est aussi une question de privilège. Lorsqu’on vit dans une société où les hommes dominent, c’est typiquement le sujet du patriarcat et de la diversité de genre. En tant qu’homme, est-ce que j’ai un réel intérêt à partager ma part du gâteau ? Si je vis dans un monde blanc, est-ce que j’ai un intérêt à partager avec d’autres personnes qui ne me ressemblent pas ? Il est évident que, pour de nombreuses raisons, la réponse est oui, mais cela demande un effort. Et tout ce qui demande un effort est souvent perçu comme douloureux. C’est là tout l’enjeu : partager la part du gâteau, même si cela touche aussi à des questions liées à la charge raciale.
Pour ma part, j’ai une philosophie différente concernant cette métaphore du gâteau. Je pense qu’il n’est même pas nécessaire de partager la part existante. Si le gâteau est trop petit, il suffit d’en cuisiner un autre. C’est cette manière de voir les choses qui, je crois, est essentielle.
C’est aussi pour cela que je t’invite à mon micro, pour discuter de la charge raciale et la rendre visible à un maximum de personnes. Il est important de comprendre que la différence est une force et qu’il faut apprendre à la cultiver. Nous avons tant à apprendre les uns des autres. Le monde est beau, malgré les malheurs qui s’y passent. Il faut aussi donner de l’espoir aux gens, afin qu’ils puissent apprendre à construire des futurs désirables, dans lesquels ils se reconnaissent et où ils peuvent également reconnaître les autres, même ceux qui sont différents d’eux.
Comment sensibiliser les enfants ?
Cette question m’amène à réfléchir à la manière dont nous pourrions sensibiliser les enfants à ce genre de sujets. Comment éviter que quelqu’un développe des comportements racistes ou, plus globalement, comment faire évoluer les mentalités ? Cela me rappelle une discussion que j’avais eue avec Asli Ciyow.
Au départ, je lui avais posé la question de savoir comment « survivre » face au racisme, mais elle m’avait répondu qu’elle préférait poser la question à l’envers. Elle soulignait que l’on attribue souvent cette charge aux personnes racisées, alors qu’il serait tout aussi important d’inverser la perspective et d’amener les autres à se remettre en question. C’est une manière de repenser la charge raciale, en incitant chacun à s’interroger sur ses propres comportements et préjugés.
Je suis totalement d’accord avec elle. Je n’ai pas envie de parler de « survivre », mais plutôt de savoir comment être soi-même, continuer à exister sans avoir à se conformer. Il est nécessaire de renverser cette honte, cette charge, cette responsabilité. C’est facile à dire, bien sûr, mais la réalité, c’est que nous faisons face à des discriminations systémiques. Par exemple, si j’ai un nom à consonance arabe, je risque d’avoir plus de difficultés à trouver un logement ou un emploi. Ce ne sont pas des idées reçues, mais des faits, comme l’ont démontré de nombreuses études, notamment celle menée par Dares. Cette situation met en lumière l’impact de la charge raciale sur les opportunités individuelles.
Le combat doit se situer au niveau des discriminations systémiques, qui sont profondes et omniprésentes. Se focaliser uniquement sur des actions individuelles revient à traiter une infime partie du problème. Il est essentiel de s’attaquer à ces discriminations macro-systémiques que nous ne pouvons pas combattre seuls. La charge raciale ne peut être allégée qu’à travers des réformes structurelles et collectives.
Cependant, il y a aussi la question de l’individu : se donner le droit d’exister, sans s’excuser, sans accepter la charge raciale. Il faut pouvoir exprimer, verbaliser les problématiques que nous rencontrons et trouver des soutiens autour de nous. C’est aussi une question de privilège. Si je suis dans une position où je me sens bien ancrée, il est plus facile pour moi de faire entendre ma voix. Mais tout le monde n’a pas cette facilité, et c’est pourquoi il est difficile de répondre à cette question uniquement sous l’angle individuel.
Comment agir collectivement pour faire bouger les lignes ?
Oui, je comprends ce que tu veux dire. Mais dans une perspective collective, si l’on imaginait une société idéale, capable de faire les efforts nécessaires, comment les gens pourraient-ils agir ensemble pour véritablement faire bouger les lignes ?
Je pense que c’est similaire à d’autres sujets, comme celui du handicap, par exemple. Si tu regardes, le handicap n’est pas intégré dans la société parce que nous vivons dans une société validiste. Si tu n’es jamais confronté à cette réalité, tu ne sais pas ce que c’est, tu ne sais pas comment en parler. Cela fonctionne de la même manière pour la charge raciale, qui reste invisible pour ceux qui ne la subissent pas directement.
Tu ne sais pas comment réagir, ni ce que tu peux ou ne peux pas dire sans être discriminant. C’est là que l’éducation occupe une place centrale. Prenons un autre exemple pour l’illustrer davantage. Si nous vivions dans une société vraiment inclusive, tu comprendrais que les gens ont leur singularité, et tu les acceptes naturellement. Cette inclusion passerait par la reconnaissance et l’acceptation de la charge raciale, afin de la surmonter ensemble.
C’est cette acceptation des différences qui permet de surmonter la charge raciale. Mais aujourd’hui, ce n’est pas le cas, et c’est justement là que se situe le problème.
Comment une entreprise peut agir pour plus de diversité et d’inclusion ?
Oui, je comprends bien cette logique, et cela me fait penser à ce que les entreprises peuvent mettre en place. Les entreprises ont une responsabilité importante car elles rassemblent de nombreuses personnes et ont donc un réel pouvoir d’agir sur le collectif. Alors, comment une entreprise peut-elle promouvoir davantage de diversité et d’inclusion ? Cette réflexion est directement liée à la charge raciale, car il s’agit de créer un environnement de travail où tout le monde peut se sentir représenté et respecté.
Je pense qu’il est essentiel de ne pas culpabiliser les gens, mais plutôt de leur faire comprendre que nous avons tous des biais. Ce n’est pas parce que je suis une femme noire que je ne peux pas avoir des comportements ou des pensées sexistes ou racistes. Personne n’a un « totem d’immunité ». Il faut en être conscient. Je le dis de manière claire : si tu ne prends pas conscience de tes propres biais, il est très difficile de les surmonter. Cette prise de conscience fait partie du travail nécessaire pour déconstruire la charge raciale présente dans nos interactions professionnelles.
L’objectif n’est pas de tenter de les éliminer, car c’est impossible ; nous en avons tous. Ce qui compte, c’est d’en prendre conscience, de s’éveiller à ces questions. Par exemple, si je te montre la photo d’une personne et te demande ce qu’elle t’évoque, tu pourrais réaliser que certaines de tes réponses sont influencées par des stéréotypes. Si je te demande d’imaginer un grand chirurgien, tu verras probablement un homme en blouse blanche. Pourtant, ce pourrait tout aussi bien être une femme chirurgienne.
Nous avons tous des images mentales préconçues, et le fait de prendre conscience de ces biais permet de les déconstruire. Tant que nous n’en sommes pas conscients, nous restons enfermés dans ces schémas. Il est donc nécessaire de sensibiliser les employés aux biais inconscients, mais encore une fois, sans les culpabiliser, car ces biais font partie de la charge raciale que nous devons apprendre à identifier et à déconstruire.
Il y a aussi un sujet de suivi et de mesure. Si, aujourd’hui, dans une entreprise, tu ne sais pas monitorer la situation, il devient difficile d’avancer. Avant de commencer à travailler sur le sujet, il faut connaître l’état des lieux. Si j’ai, par exemple, 98 % d’hommes dans mon entreprise, il y a clairement un problème de diversité, qu’il s’agisse de genre ou d’autres aspects.
Il est indispensable de faire cet état des lieux pour identifier les failles et définir comment les combler, tout en établissant un plan d’action. Un peu comme tu pilotes la stratégie globale d’une entreprise, cela doit être fait avec des actions concrètes, et cela doit impliquer tout le monde. Ce n’est pas seulement un sujet pour les ressources humaines, c’est un sujet de direction, un sujet pour les salariés, un sujet de culture d’entreprise. Cette démarche doit infuser partout. Il faudrait presque un épisode complet pour expliquer comment le mettre en œuvre.
C’est vraiment intéressant ce que tu soulèves dans notre conversation sur la charge raciale, et j’aimerais rebondir sur la chronologie de tes propos. En ce qui concerne les biais, c’est effectivement un point très important, car avoir des biais inconscients peut être dangereux. Par exemple, en intelligence artificielle, beaucoup des systèmes sont encore codés principalement par des hommes, qui eux-mêmes portent des biais. Cela se répercute sur les algorithmes, renforçant les préjugés et stéréotypes.
Cela me rappelle une campagne de l’association #Jamaissanselles, où, quand on demandait de visualiser un PDG, c’était systématiquement un homme, et quand on demandait d’imaginer une secrétaire, c’était automatiquement une femme. Cela se produisait même en anglais, où les mots ne sont pas genrés. Si nous continuons à propager nos biais inconscients sans en prendre conscience, ils se retrouveront partout, dans la tech, dans la culture d’entreprise, et cela ne s’arrêtera jamais. Ces biais contribuent à la perpétuation de la charge raciale et à la limitation des opportunités.
C’est pour cela qu’il est important que la tech et d’autres secteurs soient diversifiés. Il ne s’agit pas simplement d’avoir des hommes blancs cisgenres, mais aussi d’inclure des femmes, des personnes trans, et des personnes de diverses origines. Cela permettrait de créer une société beaucoup plus inclusive et représentative, et cela réduirait la charge raciale et les discriminations liées aux stéréotypes.
Comment faire un état des lieux de l’existant ?
Ce que tu dis sur le monitoring m’intrigue. Comment fait-on concrètement un état des lieux ? Aurais-tu quelques pistes à nous partager aux auditeurs et auditrices de l’épisode sur la charge raciale pour mieux comprendre comment procéder ? N’hésite pas à approfondir, comme tu disais qu’il pourrait y avoir un épisode entier dédié à ce sujet.
Oui, alors on peut le faire en interne, mais il existe également des outils spécifiques pour ça. Par exemple, je ne sais pas si tu as déjà entendu parler de Mixity, qui propose de réaliser une empreinte de la diversité au sein d’une entreprise. Ces outils peuvent aider, mais il est aussi possible de le faire soi-même, en prenant en compte tous les leviers de la diversité pour évaluer où l’on en est. Par exemple, pour la diversité de genre, je vais analyser combien de femmes sont managers par rapport aux hommes. Parmi les plus hauts salaires, combien de femmes sont représentées, et quel est l’équilibre global des genres ?
Ensuite, je peux examiner la diversité des diplômes. Ai-je des personnes sans diplôme, des self-made men ou self-made women, des personnes ayant un niveau inférieur au bac, le bac, ou des diplômes d’enseignement supérieur ?
Je peux aussi regarder la diversité géographique. Quelles sont les personnes qui vivent dans des zones d’éducation prioritaire ou des zones bénéficiant de politiques sociales urbaines ? Il est possible de mesurer de nombreux aspects de la diversité. On peut également aborder la question sous l’angle de la perception. Par exemple, on peut demander aux salariés leur perception de la diversité au sein de l’entreprise, car au-delà des chiffres, la perception compte aussi. Cela peut se faire via des questionnaires adressés aux employés pour évaluer s’ils se sentent inclus et représentés, tout en prenant en compte la charge raciale.
Moi, en tant que minorité, si je suis victime d’une agression raciste, sexiste, homophobe, ou autre, est-ce que j’ai un relais ? Est-ce que je sais à qui m’adresser ? Est-ce que je me sens en sécurité pour exprimer mes différences ? Il est important de relier ces éléments pour établir un diagnostic de la situation de l’entreprise.
Ce que tu dis est très intéressant, et cela me rappelle une expérience que j’ai vécue, enfin indirectement. À un moment donné, quand j’étais en stage, j’avais une amie, Akila (qui est toujours mon amie), et j’ai été profondément choquée par la réaction du PDG de l’époque. Il était très sympa avec elle, lui donnait des missions intéressantes, et tout semblait bien se passer. Mais dès qu’il a appris qu’elle faisait le ramadan, il l’a complètement mise à l’écart. Il lui a donné des tâches sans intérêt, des missions qu’elle trouvait vraiment dévalorisantes. J’avais trouvé cela tellement choquant, et bien sûr, j’ai soutenu mon amie.
Cela me semble inadmissible qu’une entreprise ne crée pas un espace sûr pour tous ses employés. Dans ce cas précis, c’était clairement une discrimination pure et dure. Le fait de ne pas permettre à une personne d’exprimer librement ses pratiques religieuses, ses différences, est un signe que l’entreprise ne gère pas correctement la diversité et l’inclusion. Il est de notre devoir de prendre en compte ces expériences pour combattre la charge raciale et d’autres formes de discriminations, et pour créer des environnements où chacun se sent respecté et en sécurité.
Comment mettre en place un plan d’action ?
Cela m’amène à me demander : une fois que l’état des lieux en entreprise est fait, comme nous en avons parlé, comment mettre en place un plan d’action ? Mettre en œuvre un plan peut paraître décourageant à cause de la multitude de choses à faire et des priorités à gérer. Alors, comment faire pour prioriser tout cela ?
Je pense qu’il ne faut pas envisager le plan d’action comme quelque chose de totalement à part, mais plutôt comme une couche supplémentaire à ce que l’on fait déjà. Par exemple, pour parler de recrutement (puisque c’est mon domaine), tu mets en place un processus et tu te demandes : « Comment puis-je le rendre le plus inclusif possible ? » Est-ce que le critère de diplôme est toujours pertinent pour le poste concerné ? Selon moi, dans la majorité des cas, ce n’est pas nécessaire, sauf pour des métiers très spécifiques, comme la médecine, où il est indispensable.
Il faut aussi se demander comment faire pour que tout le monde se sente légitime à postuler. Est-ce que le vocabulaire que j’utilise dans mes annonces est inclusif ? Par exemple, si j’utilise un langage « guerrier » ou genré, comme « Nous cherchons un capitaine », cela peut dissuader certaines personnes de postuler. Le but n’est pas de se rajouter du travail, mais de repenser son travail en intégrant l’inclusivité.
Cela s’applique à toutes les tâches. Par exemple, si je crée un site web, est-ce que les personnes ayant une déficience visuelle peuvent l’utiliser ? Comment puis-je le rendre accessible à tous ? Il s’agit d’adopter cette logique d’inclusivité dans tout ce que l’on fait, tout en étant conscient de l’impact que cela peut avoir sur la charge raciale et d’autres formes de discrimination.
Mais en fait, c’est quelque chose que tu intègres à chaque fois que tu fais quelque chose. En tout cas, je pense que c’est ainsi qu’il faut le concevoir, pour que cela ne soit pas perçu comme une tâche supplémentaire, mais bien comme un élément intégré au projet habituel. C’est vraiment ça.
Oui, il faut penser à l’inclusion et à la diversité dès le début, pour éviter de perdre en chemin des talents qui auraient pu être intéressés par ces postes, mais qui ne vont pas s’y reconnaître.
D’ailleurs, cela me rappelle une étude que j’avais vue. Il faudrait que je la retrouve pour la partager en description de l’épisode. Elle portait justement sur l’impact du vocabulaire utilisé dans les offres d’emploi. L’étude montrait que, par exemple, il est préférable d’utiliser le terme « directrice » plutôt que « directeur/directrice » ou simplement « directeur ». Les femmes sont plus enclines à postuler lorsqu’elles voient le mot « directrice », car cela leur indique que la culture de l’entreprise est pensée pour elles. Cela montre à quel point, dès la lecture de l’annonce, on peut percevoir une partie de la culture de l’entreprise.
Si l’annonce se contente de mentionner « directeur », cela peut évoquer les clichés des startups, avec leur ambiance baby-foot, leur esprit guerrier, sans vraiment penser à inclure les femmes ou d’autres minorités. Le vocabulaire est donc extrêmement important pour permettre à chaque personne de se sentir représentée et légitime dans l’entreprise. C’est une première étape essentielle pour promouvoir l’inclusivité et éviter de renforcer la charge raciale et les autres discriminations dès le processus de recrutement.
Prenons l’exemple d’une personne qui part en congé maternité. Est-ce que tu as adapté ses objectifs à sa nouvelle situation de parent ? Est-ce que tu as prévu un canal de communication pour qu’elle puisse rester informée si elle le souhaite, ou respecter son désir de déconnexion ? Comment vas-tu l’accompagner pour qu’elle puisse vivre sereinement sa parentalité ? Par exemple, si vous aviez des réunions d’équipe à 18h, mais qu’elle doit maintenant aller chercher son enfant, comment t’adaptes-tu ? Tout cela fait partie du management inclusif.
Oui, tes exemples sont vraiment pertinents, notamment sur la question du congé maternité. J’avais vu des études à ce sujet, je pourrais les ajouter en description de l’épisode. Elles montrent que 80 % des inégalités salariales proviennent du congé maternité. Accompagner les parents dans leur parentalité pourrait vraiment changer la donne et alléger la charge mentale qui repose souvent sur les femmes dans ce domaine.
Exactement, il s’agit de continuer à récompenser les personnes performantes, même après un congé maternité, et de leur proposer des opportunités d’évolution. D’ailleurs, il est légalement obligatoire d’augmenter les salariés à leur retour de congé maternité, sans que cette pause n’impacte leur progression.
C’est un point important et cela me fait également penser que l’entreprise – et même la société en général – fonctionne souvent selon des standards de performance masculine. On ne prend pas toujours en compte les spécificités liées au fait d’être une femme et de donner la vie. Si les entreprises devenaient plus bienveillantes et inclusives à cet égard, cela permettrait de mieux gérer cette situation et de réduire à la fois la charge mentale et la charge raciale des employés concernés.
Le mot de la fin sur la charge raciale
Je dirais aux personnes concernées de briser le silence et de partager leurs expériences, car c’est en les rendant visibles et tangibles que l’on peut travailler à déconstruire ces problématiques de racisme, de sexisme, et de charge raciale. Il est aussi essentiel d’avoir des safe spaces, des moments où l’on peut discuter de ces sujets en toute sécurité. Pour les personnes qui ne sont pas directement concernées, il y a un vrai enjeu d’éducation, et c’est pourquoi il est important de vulgariser ces thématiques, comme tu le fais dans ton podcast avec notre épisode du jour sur la charge raciale.
Ensuite, il est indispensable de s’éduquer. Par exemple, sur le sujet de la charge raciale, il y a Douce Dibondo qui a récemment écrit un livre sur ce thème. Il existe aussi des comptes sur les réseaux sociaux, comme celui de Décolonisons Nous (peut-être que tu le connais), qui sont de très bonnes ressources. Je pense aussi à des podcasts comme Kiffe Ta Race qui sont excellents pour s’informer et approfondir ces sujets. Voilà, c’est un ensemble d’actions à mener pour avancer.
Merci pour ta conclusion sur la charge raciale.
Qui sont tes rôles modèles ?
Ah, ça, c’est une bonne question. Il y a plein de rôles modèles différents. Pour parler d’une écrivaine, j’aime beaucoup Fatou Diome, une écrivaine francophone dont le verbe est particulièrement beau. Elle répond admirablement bien aux questions de racisme et de discrimination.
Je suis également admirative du parcours d’Élisabeth Moreno, qui est, pour moi, une grande femme. J’essaye de trouver des rôles modèles parmi les femmes noires francophones, et ce sont les premiers noms qui me viennent à l’esprit, mais il y en a bien d’autres.
Ce sont d’excellents exemples, très inspirants, merci pour le partage pour ce podcast sur la charge raciale.
Quelles ressources recommanderais-tu aux personnes qui nous écoutent ?
Pour les ressources, tu as mentionné le podcast Kiffe ta race, le compte Décolonisons-nous, ainsi que le livre de Douce Dibondo sur la charge raciale. Je ne sais pas si tu as d’autres ressources à ajouter à ce panel ?
Pas de nouvelles ressources qui me viennent en tête pour le moment pour notre échange sur la charge raciale, mais si j’en trouve d’autres, nous pourrions les ajouter par écrit dans la section dédiée aux ressources de l’épisode sur la charge raciale.
Que signifie le terme féminisme pour toi ?
Pour moi, le féminisme, c’est une lutte menée avec les hommes. Ce n’est pas une guerre entre hommes et femmes, mais une manière de construire la société à leurs côtés. C’est avant tout un sujet d’équité, et aussi un sujet de coût. Le manque de femmes dans certaines sphères de notre société a un impact économique mesurable, même en termes de PIB.
Selon McKinsey : “le manque de main d’œuvre technologique pourrait atteindre entre 1,4 et 3,9 millions de personnes d’ici 2027 dans les pays de l’UE. En doublant les effectifs féminins, cet écart pourrait être comblé et faire progresser le PIB de 260 milliards d’euros”.
Il est clair qu’aujourd’hui, l’absence d’une juste place pour les femmes a un coût important, et c’est ce que le féminisme vise à corriger.
Oui, je te rejoins complètement dans cette définition. Pour moi, le féminisme se construit avec les hommes, car ils sont nos alliés. C’est ensemble que nous pourrons faire évoluer la société. Je rappelle souvent que si nous avons obtenu des droits comme le droit de vote ou le droit à l’avortement, c’est aussi parce que des hommes étaient présents dans les processus décisionnels. Il faut que cela continue de cette manière pour créer une société plus juste et égalitaire. En ce qui concerne les chiffres, on pourrait se référer à ceux sur le coût de la virilité, car cela me semble pertinent.
Oui, c’est exactement ça, le coût de la virilité. Je n’avais plus le chiffre en tête, mais je me souviens avoir lu quelque chose à ce sujet et avoir trouvé cela très intéressant. En France, le coût de la virilité est estimé à 95,2 milliards d’euros par an. C’est Lucile Peytavin qui a écrit un livre sur le sujet, intitulé Le coût de la virilité. Cela montre bien pourquoi le féminisme est nécessaire.
Je suis complètement d’accord, c’est un chiffre impressionnant. Merci à Lucile pour ce travail, et j’invite les personnes qui nous écoutent à lire Le coût de la virilité. C’est une excellente ressource à ajouter à notre liste de cet épisode sur la charge raciale.
Qui aimerais-tu voir au micro de Matrimoine Féministe ?
Moi, j’adorerais entendre Caroline Ramade, qui est une entrepreneure ayant créé une entreprise appelée 50inTech, œuvrant pour l’inclusion des femmes dans la tech. Elle est vraiment inspirante, c’est une femme incroyable.
Oh, parfait, je suis trop contente, j’ai hâte de l’entendre.
Merci pour ta recommandation, et tu vas être ravie parce qu’elle fait partie de mes invités pour Matrimoine Féministe.
Trop bien, merci encore, Christelle, pour ton temps et tout ce que tu as partagé avec nous sur la charge raciale. C’était vraiment important et enrichissant. Merci aussi à toutes les personnes qui nous ont écoutés jusqu’au bout.
Plaisir partagé, merci pour l’invitation pour parler de la charge raciale, j’étais ravie d’être avec toi. Ciao tout le monde !
Bye, et merci encore et n’hésitez pas à vous abonnez à la newsletter de Matrimoine Féministe !
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES
Sources de l’épisode
- Étude Dares : Discrimination à l’embauche des personnes d’origine supposée maghrébine : quels enseignements d’une grande étude par testing ?
- Campagne de l’association #JamaisSansElles : L’intelligence artificielle entretient des stéréotypes bien réels
- Étude Government Equalities Office et The Behavioural Insights Team : Gender differences in response to requirements in job adverts
- Étude du World Economic Forum’s : Global Gender Gap Report 2022
- Étude McKinsey : Women in tech: The best bet to solve Europe’s talent shortage », McKinsey Digital 2023
Ses rôles modèles et ressources mises en avant sur la charge raciale
- Fatou Diome
- Élisabeth Moreno
- Le podcast Kiffe ta race
- Le compte Décolonisons-nous
- Le livre La charge raciale: Vertige d’un silence écrasant de Douce Dibondo
- Le livre Le coût de la virilité de Lucile Peytavin
Retrouvez Christelle Vaugelade-Kalipé sur la charge raciale
- Sur LinkedIn
Episodes complémentaires à la charge raciale
- Les femmes d’outre-mer avec Meyeti Payet et Martine Nourry
Prendre soin de sa santé mentale avec Stencia Yambogaza