Bonjour, bonsoir à toutes les personnes qui nous écoutent. Je suis en compagnie de Clémence Mouéllé Moukouri, avec qui nous allons discuter de son association Find Yourself. Une association qui compte énormément pour moi, car c’est elle qui m’a inspirée à aborder des sujets de société avec une perspective féministe sur mon média, en mettant l’accent sur l’empouvoirement.
J’ai eu l’opportunité de participer à trois éditions du Mois de l’Empowerment. Nous aurons l’occasion d’approfondir ce sujet pendant le podcast. Grâce à cet événement, j’ai rencontré de nombreuses femmes inspirantes, certaines d’entre elles étant également venues à mon micro par la suite. Et, quand c’est le cas, je te rends hommage, Clémence, en début d’épisode, en saluant l’empouvoirement que tu encourages.
Merci beaucoup. Je suis profondément touchée. Je suis ravie que tu te sois lancée et encore plus heureuse de pouvoir échanger avec toi pour ce podcast, Estelle. C’est vraiment formidable. Je suis Clémence Mouéllé Moukouri, présidente et fondatrice de Find Yourself, une association régie par la loi 1901, qui œuvre pour l’égalité des genres par le biais de l’engagement féminin et l’empouvoirement des femmes.
Tu es adorable, merci infiniment de m’avoir autant inspirée. Je te laisse donc te présenter plus en détail.
Très concrètement, nous avons aujourd’hui trois axes d’action. Le premier est l’événementiel : nous organisons des événements autour du développement personnel et professionnel pour offrir aux femmes des ressources et des outils leur permettant de s’épanouir dans ces différents aspects de leur vie, et ce, dans un esprit d’empouvoirement.
Le deuxième axe est un média, qui a débuté par un podcast, tout comme le tien, et qui a évolué en talk-show. Ce média vise à mettre en avant de nouveaux rôles modèles féminins ou des personnes issues de minorités de genre, afin de traiter des sujets de société sur lesquels nous sommes encore trop peu visibles et entendus.
Le troisième axe est le fameux Mois de l’Empowerment, qui se situe à la croisée de ces deux premiers champs d’action. Il s’agit d’un festival que nous organisons chaque mois de mars, avec pour objectif d’inviter des femmes ou des personnes issues de minorités de genre, expertes dans leurs domaines ou ayant des expériences de vie significatives, pour aborder des sujets de société marqués par des inégalités, où l’empouvoirement est nécessaire et où l’on n’en parle pas encore suffisamment.
Ces intervenantes sont invitées à proposer de nouvelles perspectives et solutions pour une société plus juste, plus égalitaire et plus durable.
Merci pour cette présentation. Je recommande vivement le Mois de l’Empowerment. S’il y a un événement que je ne rate jamais chaque année, c’est bien celui-ci.
Je suis vraiment heureuse que nos chemins se soient croisés et de voir ton visage à chaque fois lors de ces tables rondes. Cela me fait toujours autant plaisir, car ces moments sont une véritable célébration de l’empouvoirement collectif.
Célébrons la diversité
Plaisir partagé. Pour rebondir un peu sur ce que tu me dis, pour les personnes qui nous écoutent et qui souhaiteraient approfondir ces sujets, ce que je comprends parfaitement, quelle est la différence entre un podcast et un talk-show pour elles ? Et aussi, concernant le Mois de l’Empowerment, quels sont les sujets abordés, et comment définirais-tu l’empouvoirement pour toi ?
Alors, pour répondre à la première question, la différence entre un podcast et un talk-show réside principalement dans le format. Le podcast, c’est un format que les gens écoutent, il s’agit de bandes sonores, des voix, comme celles que tu entends en marchant ou en faisant n’importe quelle autre activité. Il peut parfois inclure des images, car de plus en plus de podcasts sont filmés, mais l’aspect visuel n’est pas toujours présent.
Le talk-show, en revanche, est un format visuel, diffusé sur YouTube. L’idée, c’est que nous filmons les échanges. Personnellement, je suis passée du podcast au talk-show parce que, dans ma conception de la représentation, il est essentiel que l’on puisse voir les personnes. Cela fait partie de notre engagement envers l’empouvoirement et le leadership inclusif. Être inclusif, c’est être représentatif de la société. Et pour représenter cette société, il est nécessaire de montrer les personnes qui la composent.
L’idée m’est venue très concrètement pendant la période du Covid, une période difficile pour tout le monde où nous étions tous et toutes confinées. Je me souviens qu’il y avait de nombreuses études qui montraient que les femmes étaient déjà sous-représentées dans les médias de manière générale, et que cela s’était encore aggravé pendant le Covid. Les expertes étaient très rarement invitées à prendre la parole. Et de manière générale, la représentation des femmes dans les médias laissait à désirer. C’est pareil sur YouTube, sur Internet, dans tous les domaines.
On voit toujours la même représentation unique, et je me suis dit que je voulais vraiment apporter ma pierre à l’édifice pour lutter contre cela. Au-delà de simplement représenter les femmes, il faut aussi montrer les femmes que je côtoie au quotidien. Ces femmes sont très diverses, et lorsqu’on parle de diversité, on parle véritablement d’intersectionnalité. Je côtoie des femmes noires, des femmes en situation de handicap, des femmes voilées, des femmes blanches, des femmes grosses, et des femmes âgées. Elles m’inspirent toutes. Pourtant, ce ne sont pas ces profils qui sont mis en lumière dans la société, alors que chacune, à son échelle, participe à faire bouger les lignes et à promouvoir l’empouvoirement.
L’idée de passer au talk-show, c’était donc de pouvoir non seulement entendre, mais aussi voir ces femmes. Je pense que cela contribue à normaliser la diversité et à promouvoir une représentation fidèle de celle-ci. Voilà, j’espère que cela répond à ta question.
C’est vraiment fascinant ce que tu nous dis, et je suis tellement en phase avec le féminisme intersectionnel. C’est aussi quelque chose que j’ai envie de mettre en avant dans mon podcast. Je pense que chacun et chacune, bien que ce soient surtout des femmes que j’interviewe, peut apporter des expériences mutuelles. Nous n’avons pas tous et toutes les mêmes expériences de vie selon notre couleur de peau, notre religion, notre manière d’être, notre personnalité, ou encore nos convictions. Mais je trouve que c’est magnifique de réunir tout cela sous l’égide du féminisme, et cela participe à l’empouvoirement collectif.
Je trouve qu’il y a un réel écho entre ton show et mon podcast, et ils se complètent parfaitement. C’est pourquoi j’invite toutes les personnes qui nous écoutent à aller regarder le talk-show et à écouter le podcast. Je crois qu’il est encore disponible, je l’avais vu sur plusieurs plateformes d’écoute.
Oui, tout à fait. Nous avons rendu les épisodes de talk-show disponibles uniquement en audio, en format podcast. Donc oui, tout est accessible. Et je suis d’accord, il y a vraiment une complémentarité entre ces deux formats. Nous avons besoin de cette représentation des unes par les autres, car c’est ainsi que l’empouvoirement des femmes, et plus largement des personnes, peut se diffuser.
Ouais, complètement. Et c’est ainsi que nous construirons une société meilleure et plus juste. En fait, je pense que le problème avec notre société, c’est que nous avons peur de ce qui ne nous ressemble pas. Pourtant, si nous faisions l’effort d’être curieux, d’essayer de comprendre pourquoi nous sommes différents, nous découvririons de nombreuses similitudes malgré nos différences. Ce n’est pas parce que nous sommes différents que nous ne pouvons pas être complémentaires. Bien au contraire, c’est cette complémentarité qui renforce l’empouvoirement.
C’est quelque chose qui me paraît tellement important. Il faut absolument apporter davantage de bienveillance et d’empathie dans ce monde, surtout avec toutes les horreurs qui se produisent chaque jour. Nous devons garder espoir pour que les mentalités évoluent et que l’empouvoirement puisse transformer positivement notre société.
Tout à fait. Je suis complètement d’accord avec toi. La xénophobie repose sur l’idée que l’autre est forcément une menace. Pourtant, si l’on revient à l’essentiel, l’autre reste un être humain. Finalement, l’autre n’est pas si différent de nous. Il y a tant de facteurs qui expliquent la diversité dans notre société actuelle. Cela peut sembler un peu banal de dire que « la diversité est une richesse« , mais c’est une réalité. Ne pas être des copies conformes les uns des autres permet à chacun de pallier différentes lacunes dans la société et d’apporter sa contribution à l’empouvoirement collectif.
Je prends un exemple qui peut sembler très simple, mais si dans la nature nous n’avions que des peupliers, nous n’aurions pas tout ce qui nous permet d’avoir des arbres fruitiers, des légumes, et bien d’autres choses encore. La diversité permet à chacun d’apporter quelque chose d’utile à la société. Ce que je n’ai pas, tu l’as peut-être. Ce que tu n’as pas, je l’ai peut-être. Si nous abordons les choses sous cet angle, il devient évident qu’il faut célébrer la diversité et l’empouvoirement qui en découle, et ne pas avoir peur de l’autre.
Je suis tout à fait d’accord, et j’apprécie particulièrement cette idée de célébration. Nous sommes toutes et tous uniques, et cette unicité nous permet de nous enrichir mutuellement. C’est vraiment dommage de ne pas profiter de toute cette richesse que nous pourrions créer ensemble. D’ailleurs, cela me fait souvent réfléchir : nous restons sur Terre environ 80 ans, si tout va bien. Alors pourquoi gaspiller ce temps à se nuire les uns aux autres ?
Je me pose souvent la même question. Pourquoi tant de haine alors que notre vie est limitée sur Terre ? Pourquoi ne pas profiter de ce temps pour cultiver la gratitude, la bienveillance, et la bonté envers autrui ? Les réseaux sociaux révèlent parfois le pire de la nature humaine, avec trop de haine. Pour éradiquer cette haine, je pense qu’il faut donner énormément d’amour et encourager l’empouvoirement des personnes à travers des gestes bienveillants.
Absolument. Je ne sais pas pourquoi certains semblent trouver plus facile de détester que d’aimer, alors que l’amour génère tant de bien-être. Vive l’amour, vraiment. Cela peut sembler cliché, mais c’est si vrai. Je ne comprends pas pourquoi cela semble si difficile pour certaines personnes, mais en tout cas, pour celles et ceux qui partagent notre vision, il est vital de continuer à se lier, à œuvrer ensemble pour faire rayonner nos idées et notre vision du monde. C’est ainsi que l’empouvoirement prendra racine dans notre société.
Pourquoi les femmes sont sous-représentées ?
Oui, et tu parlais tout à l’heure de la sous-représentation des femmes dans tous les domaines. Pour les personnes qui nous écoutent et qui ne sont pas forcément sensibilisées, il est important de leur expliquer ces concepts. J’aime avoir une approche éducative du féminisme pour que n’importe qui puisse écouter le podcast et en ressortir avec un bon niveau de connaissances. Alors, selon toi, pourquoi les femmes sont-elles sous-représentées ? Et ensuite, je ferai le lien avec le Mois de l’Empowerment et l’empouvoirement.
Pourquoi les femmes sont-elles sous-représentées ? La première réponse qui me vient, c’est tout simplement parce que nous vivons dans une société patriarcale. Une société patriarcale signifie qu’elle a été pensée par des hommes et pour des hommes, et que le genre dominant est l’homme. Comment cela s’est-il instauré et pourquoi ? Je lis beaucoup à ce sujet, mais je n’ai pas encore assez de références pour expliquer en détail pourquoi cela se produit. Peut-être que certaines de tes invitées auront des réponses à apporter à ce sujet, et j’ai hâte d’écouter ces épisodes-là. Néanmoins, aujourd’hui, c’est ainsi, c’est un fait.
Les femmes sont sous-représentées dans toutes les sphères de décision publique et politique. Cela ne reflète absolument pas la réalité de la société. Cette domination systémique, qui cherche souvent à asservir ou à limiter les femmes, est inacceptable. Elle brime les individus et les enferme dans des carcans. Et lorsque je dis « individus », je ne parle pas seulement des femmes, mais aussi des hommes, car ce système de domination leur impose également des rôles restrictifs. Ces rôles sont non seulement négatifs, mais destructeurs, entravant leur propre empouvoirement.
C’est un cercle vicieux qui ne bénéficie ni aux femmes ni aux hommes, et encore moins à la société dans son ensemble. Il influe sur la manière dont nous vivons, dont nous pensons, et dont nous cohabitons. Donc, pourquoi cette sous-représentation ? Parce que nous vivons dans une société patriarcale. Comment lutter contre cela ? À travers des projets comme les nôtres, avec une approche éducative, même si, je dois l’admettre, c’est parfois épuisant. Il est frustrant de devoir expliquer des choses qui semblent évidentes, comme l’égalité ou l’empouvoirement, encore et encore. Mais c’est bien grâce à ce travail que petit à petit, les choses changent.
Exactement. J’aime dire que nous plantons des graines d’éveil féministe qui, avec un peu de chance, germeront. Peut-être pas toutes, mais au moins l’intention est là. Nous laissons aux personnes le choix de prendre ce qu’elles veulent. Cela me semble essentiel. Je comprends également que ce soit décourageant de toujours devoir se justifier pour quelque chose qui paraît pourtant si simple : l’égalité, l’équité, l’empouvoirement. Cela semble absurde de devoir encore le demander.
Tout à fait. Le fait de devoir encore revendiquer l’égalité est bien sûr aberrant. Mais je pense que le féminisme est souvent mal compris. Il y a encore cette fausse idée selon laquelle le féminisme serait synonyme de suprématie féminine.
Et les médias, malheureusement, ne montrent souvent que des exemples de féministes extrêmes ou de personnes qui, selon moi, ne sont pas réellement féministes. Par exemple, celles qui excluent les personnes transgenres de leur combat. Pour moi, ce n’est pas du féminisme. On ne peut pas exclure ou nier l’identité de quelqu’un par haine. C’est pour cela qu’il est si important de changer les choses à notre manière. Chacun et chacune peut, à son échelle, planter ses propres graines d’éveil féministe et d’empouvoirement.
Exactement, je suis d’accord avec toi. C’est vrai que dans le féminisme, il existe plusieurs courants. Le nôtre est intersectionnel, tandis que d’autres ne le sont pas. Et c’est pourquoi il peut y avoir des divergences profondes, même au sein du féminisme. Nous nous associons avec celles et ceux qui partagent une vision similaire à la nôtre, et nous essayons d’expliquer nos idées, d’expliquer en quoi cela permet de créer une société plus juste, plus durable, plus égalitaire, et ce, pas uniquement pour les femmes, mais pour tout le monde. L’empouvoirement touche tous les aspects de la société.
Si tout le monde adoptait une vision féministe, et en particulier celle que nous prônons, alors la société irait nécessairement mieux. Mais cela demande une véritable éducation, de l’ouverture d’esprit et une volonté de comprendre. Les médias, malheureusement, ne reflètent qu’une partie de la société, et sont aussi souvent influencés par des considérations politiques. Nous faisons face à une interconnexion entre l’opinion publique, les médias, et la politique.
Il y a constamment des influences mutuelles entre ces trois domaines. Néanmoins, les médias ne fournissent pas toujours une vision correcte et complète des problématiques sociétales. C’est d’ailleurs pour cela que nous créons nos propres médias. Cela prendra peut-être plus de temps pour nous de nous imposer, mais c’est ainsi que nous avançons. Chacun et chacune doit faire preuve d’ouverture d’esprit, aller chercher différentes sources d’information, et ne pas se contenter de la source principale qui lui est offerte, car celle-ci ne reflète souvent pas la réalité.
Je me retrouve souvent à devoir expliquer cela. Quand quelqu’un apprend que je suis féministe, la première réaction est souvent : « Ah, donc tu es anti-hommes ? ». Eh bien non, pas du tout. Mais je suis obligée de réexpliquer sans cesse, car l’image des féministes, aujourd’hui, c’est souvent celle de femmes qui veulent dominer les hommes. Il y a tellement de préjugés à ce sujet que j’ai même du mal à tous les énumérer.
En tout cas, chaque fois que quelqu’un me critique parce que je suis féministe, ces personnes ont des idées préconçues sur ce que je pense. Cela reflète une fermeture d’esprit, une volonté de croire uniquement ce qui les arrange, sans chercher à s’informer réellement ni à comprendre. Et cette attitude les empêche d’adopter une posture qui leur permettrait d’être de meilleures personnes, plus empathiques et moins centrées sur elles-mêmes. C’est là que l’empouvoirement trouve tout son sens : comprendre, éduquer, et élargir les perspectives de chacun.
Ouais, tout ce que tu me dis résonne beaucoup. On vit effectivement dans une société où, aujourd’hui, forger son esprit critique est une compétence indispensable. Cela est d’autant plus vrai avec l’avalanche d’informations que nous recevons en permanence, l’intelligence artificielle qui crée de nouvelles réalités, et les réseaux sociaux qui renforcent souvent des biais de conformisme. Nous sommes constamment exposés à du contenu qui nous ressemble ou qui va dans le même sens que nos opinions, ce qui ne nous incite pas à explorer au-delà.
Et pour rebondir sur ce que tu disais à propos des hommes, je partage totalement ta vision. Les hommes sont des alliés essentiels dans ce combat. Nous ne pouvons pas lutter pour l’empouvoirement et l’égalité sans eux. Il est donc capital de rappeler qu’ils ont également joué un rôle important dans l’histoire des luttes féministes.
Tout à fait, c’est justement l’enjeu des privilèges : savoir les utiliser à bon escient. Sans les hommes, nous n’aurions peut-être pas obtenu des droits essentiels comme le droit de vote ou celui à l’avortement. Il est donc primordial qu’ils soient des alliés, qu’ils se considèrent féministes, ou se définissent comme ils le souhaitent, tant qu’ils rejoignent la cause pour avancer vers un monde plus juste et équitable.
Absolument. Dans la société, tout le monde bénéficie de privilèges à un moment donné. L’important est de comprendre que nous ne sommes pas tous égaux dans la répartition de ces privilèges. Quand tu es dans une position privilégiée, tendre la main à quelqu’un qui ne l’est pas ne représente pas une menace. Souvent, les gens pensent que donner, c’est perdre quelque chose. En réalité, lorsque tu donnes, tu gagnes autre chose. Ce changement d’état d’esprit est fondamental, et pour l’intégrer, il faut l’expérimenter.
Si, en tant qu’homme, demain, tu es directeur d’une grande entreprise et qu’il y a une femme à la tête d’une autre grande entreprise, l’idée répandue serait que vous êtes en compétition, que c’est elle ou toi. Cette mentalité de rivalité, de pouvoir, et de domination est ancrée. Pourtant, il est possible de sortir de ce schéma et de créer de nouvelles dynamiques. Pourquoi ne pas envisager un modèle où il peut y avoir plusieurs leaders, plusieurs voix fortes ? Ce serait un véritable pas vers l’empouvoirement de chacun, homme ou femme.
Exactement. Cela dépend uniquement de nous. Bien sûr, cela prendra du temps, des efforts, et même de la sueur, mais nous avons la capacité de créer de nouveaux modèles sociaux en changeant notre mentalité. L’idée selon laquelle si je partage mes privilèges avec quelqu’un d’autre, je perds quelque chose, est erronée. En réalité, je gagne, car la société dans laquelle je vis devient meilleure, plus juste. Pour ceux qui ont des enfants, cela signifie aussi que les générations futures vivront dans un monde plus équilibré. Et puis, être constamment dans la compétition et l’adversité, c’est tellement épuisant.
Tellement ! Il y a suffisamment de place pour tout le monde, c’est évident. Et si le « gâteau » est trop petit, rien n’empêche d’en préparer un autre. Il y a toujours des solutions.
Exactement ! Mais comme tu le dis, cela demande de développer l’esprit critique, et comme toute compétence, cela nécessite du travail et des efforts. Malheureusement, nous vivons dans une société où l’effort est de moins en moins valorisé. Il est essentiel de réintroduire cette notion de travail sur soi pour cultiver l’empouvoirement collectif.
Notre société perd le goût de l’effort
Je parlais des réseaux sociaux tout à l’heure. Même la façon dont on consomme le contenu nous pousse à ne plus faire d’efforts, à ne plus chercher. On veut que tout soit facile, tout soit prêt à consommer, ce qui tue littéralement notre esprit critique. Cela nécessite une prise de conscience et un changement : comment puis-je faire les choses différemment à partir de maintenant ? L’empouvoirement commence par cette prise de conscience.
Oui, ce que tu dis à propos de l’effort est tout à fait vrai, cela résonne en moi. Et je pense que, même si ce n’est pas uniquement un problème de société, cela s’applique à bien des domaines. Les réseaux sociaux, par exemple, offrent ce que l’on appelle du « snack content », des contenus rapides et facilement consommables. Et même dans les relations amoureuses, certaines personnes préfèrent abandonner dès que des difficultés surgissent, plutôt que de s’accrocher et de faire des efforts pour que ça fonctionne. C’est comme si l’effort était devenu une chose à éviter. L’empouvoirement implique de réapprendre la persévérance et la capacité à se dépasser.
Je comprends cette évolution, même si je la trouve difficile à accepter. Nous sommes devenus tellement dépendants des nouvelles technologies qui accomplissent beaucoup de choses à notre place. Des outils comme ChatGPT ou d’autres initiatives basées sur l’intelligence artificielle en sont des exemples. Nous manquons de recul face à ces technologies et finissons par nous laisser dévorer.
Pourtant, l’humain reste plus intelligent que la machine, car nous avons la capacité de raisonner et de faire des choix conscients. Mais tout est tellement facilité aujourd’hui, comme tu dis. Si on a la flemme de cuisiner, on commande. Si on ne veut pas aller en librairie, Amazon nous livre à domicile. On devient une génération d’assistés. L’empouvoirement, c’est aussi se rappeler que nous devons garder le contrôle sur notre propre vie.
Oui, clairement, on devient une génération paresseuse, assistée. Et lorsque les choses ne sont pas simples, nous nous agacions très vite. Quand on galère à faire quelque chose, on se demande pourquoi ce n’est pas plus simple. Une application qui ne fonctionne pas correctement ou un délai d’attente trop long, et hop, on passe à autre chose. Nous devenons impatients, dépendants, et cela a un impact sur notre manière de voir les autres, la vie et même l’apprentissage. On ne réalise pas combien cela affecte notre capacité à faire des efforts et à persévérer. L’empouvoirement passe aussi par la patience et la persévérance dans un monde où tout va trop vite.
Exactement. L’effort a perdu de sa valeur à cause de notre manière de consommer. Pourtant, c’est une véritable prise de conscience qu’il faut avoir. Bien sûr, il est agréable d’avoir des outils qui facilitent la vie et nous épargnent des galères inutiles. Certaines choses du quotidien sont bien plus simples aujourd’hui qu’elles ne l’étaient autrefois, et tant mieux.
Mais cela ne doit pas se faire au détriment de notre esprit critique. Si rendre les choses plus faciles engendre de la paresse dans ce qui fait notre unicité, notre valeur ajoutée en tant qu’êtres humains dans la société, alors il est temps de remettre en question nos usages. L’empouvoirement, c’est aussi savoir où placer ses efforts et rétablir un équilibre entre facilité et action consciente.
Je suis entièrement d’accord. Cela me fait également penser à ce que tu disais plus tôt. J’ai l’impression que nous avons tendance à oublier l’humain derrière la technologie. Sur les réseaux sociaux, par exemple, lorsque des personnes reçoivent des messages de haine, je ne pense pas que ceux qui envoient ces messages réalisent qu’ils s’adressent à un autre être humain. La barrière de la technologie élimine le face-à-face. Si ces personnes étaient en face de leur interlocuteur, elles n’oseraient jamais dire ce qu’elles écrivent en ligne. Bien sûr, certains le feraient, mais la majorité non. L’empouvoirement, c’est aussi se rappeler de l’humanité derrière chaque interaction, même virtuelle.
Je suis convaincue que nous pouvons trouver des réponses à travers l’expérience des autres, que ce soit dans les livres, les podcasts, ou d’autres formats. Ces témoignages partagent des vécus, des expériences humaines qui nous aident à mieux comprendre et à évoluer. C’est pour cela que le partage d’expériences me semble tellement important. L’empouvoirement passe aussi par cette capacité à apprendre des autres et à transmettre ce savoir.
Comment représenter la diversité sous toutes ses formes ?
Mais après, cela m’amène à une question. Pour toi, par exemple, avec Find Yourself ou pour le Mois de l’Empowerment, comment fais-tu pour trouver les invités ? Comment sais-tu que ces personnes vont apporter la valeur ajoutée dont tu as besoin ?
Ce n’est pas toujours évident, je pense. Imaginons qu’il y a des personnes qui nous écoutent et qui aimeraient avoir des discussions plus profondes avec leur entourage ou leurs proches, mais qui ne savent pas par où commencer.
Ce n’est pas forcément facile de trouver la bonne personne avec qui le dialogue va être enrichissant, et qui abordera les sujets d’une manière qui nous correspond, par exemple, avec une approche féministe. Je me disais que ce serait intéressant que tu partages quelques clés pour favoriser l’empouvoirement dans ce contexte.
Oui, donc ta question est : comment je fais pour trouver ces personnes et m’assurer qu’elles apportent de la valeur ? C’est une question que l’on me pose souvent. Il m’arrive de répondre toujours de la même façon, en particulier aux personnes qui me disent qu’il est difficile de trouver des experts ou des intervenants sur certains sujets, comme la diversité, l’équité, ou l’inclusion. Je prends souvent LinkedIn comme exemple.
Quand je vois des panels organisés par de grandes entreprises, ils parlent de diversité et d’inclusion, et parfois, ils se contentent de mettre une femme noire en avant, comme si cela suffisait. Ou bien ils n’invitent que des personnes blanches, majoritairement des hommes, et ajoutent peut-être une femme pour faire bonne figure. L’empouvoirement doit aller au-delà des apparences superficielles.
Et quand tu creuses, tu entends souvent les mêmes excuses : « On ne les trouve pas, ces experts, ces intervenants. » Mais la vérité, c’est qu’il faut chercher. Ces personnes existent, même si elles sont peut-être moins nombreuses, elles sont là. Il y a vraiment ce travail de recherche à faire, et c’est essentiel. Quand je cherche des intervenantes pour mes événements, je dis toujours à mon équipe que nous devons être le plus représentatives possible. Et même à notre échelle, nous avons une énorme marge de progression. Mais l’effort doit être systématique, c’est le premier point pour un véritable empouvoirement dans nos actions.
Le deuxième point, c’est que j’aime profondément les gens. J’aime parler aux gens, comprendre leur parcours, leurs expériences, leur façon de penser. C’est quelque chose qui m’anime et qui me motive. Ça m’enrichit, et je pense que cela m’aide à me connecter aux autres. Sur un sujet donné, j’essaie d’avoir cette ouverture d’esprit et cette empathie pour trouver des personnes qui ont vécu des choses différentes des miennes, ou parfois similaires, mais qui peuvent apporter une perspective nouvelle ou des solutions à des problématiques plus larges. C’est ainsi que se construit l’empouvoirement collectif, en intégrant toutes ces voix et expériences.
Enfin, le troisième point, c’est que je tente. Tu ne peux jamais être totalement sûr de tes choix. Même en ayant une démarche intersectionnelle, cela ne signifie pas que je suis sans biais. Moi aussi, j’ai mes croyances limitantes, mes préjugés. Mais j’essaie constamment de les questionner, pour éviter qu’ils ne limitent mes interactions et mes rencontres. Je fais tout pour ne pas me restreindre à ce que je connais déjà, mais au contraire, pour élargir mon horizon et connecter avec des personnes d’autres horizons, afin de créer ces cercles vertueux d’empouvoirement.
L’influence des biais cognitifs
C’est vraiment fascinant tout ce que tu partages, merci pour ça. Cela me fait immédiatement penser à l’idée de sortir de sa zone de confort. Pendant longtemps, on a véhiculé cette idée que les femmes n’avaient pas marqué l’histoire. Pourtant, c’est en acceptant cette idée qu’on a laissé l’empouvoirement des femmes être étouffé par l’invisibilité.
Alors qu’en réalité, elles l’ont bel et bien marquée, mais elles ont été invisibilisées, effacées de la mémoire collective. C’est ça tout le problème : on ne les a pas cherchées, on les a délibérément mises de côté, puis on a prétendu qu’il n’y avait que les hommes qui avaient influencé l’histoire. Les femmes n’auraient « rien fait », ce qui est complètement faux. C’est une dynamique qui perdure encore aujourd’hui. Un exemple qui me vient à l’esprit, lié à ce que tu dis sur les biais et les croyances limitantes, remonte au 19ème siècle. Le manque d’empouvoirement féminin dans ces périodes a fait que les histoires des femmes ont été systématiquement effacées.
C’est à cette époque que l’on a commencé à acquérir les compétences pour mener des fouilles archéologiques, et à ce moment-là, la majorité des archéologues étaient des hommes. La condition des femmes à l’époque était très différente de celle d’aujourd’hui, et cela influençait leur perception. Ils faisaient des erreurs dans leurs conclusions à cause de leurs biais. Par exemple, ils avaient découvert un tombeau rempli de richesses, et leur première réaction fut de dire : « Ça ne peut être que celui d’un homme, pas une femme.
Une femme ne peut pas être à la tête d’une tribu, elle ne peut pas être célèbre ou influente. Son rôle est dans la cuisine, pas ailleurs. » Ils ont fait cette déduction sans même envisager que cela puisse être une femme, simplement à cause de leurs croyances limitantes. Cela montre bien le manque d’empouvoirement dans leurs analyses à l’époque.
Bien plus tard, grâce à nos technologies actuelles, nous avons découvert qu’ils avaient complètement tort. En fait, c’était bien une femme. Ce genre de biais peut vraiment être dangereux. L’empouvoirement, c’est aussi reconnaître les erreurs du passé pour corriger les récits et valoriser les véritables contributions de chacun, indépendamment des stéréotypes.
Oui, c’est certain. Et ce qui est encore plus inquiétant, c’est quand ces biais sont inconscients. C’est déjà grave, mais on peut au moins comprendre que les gens ne se rendent pas compte de ce qu’ils font. Cependant, lorsque ces biais sont conscients et qu’on ne fait rien pour les corriger, cela devient fatal. Comme tu l’as mentionné, l’histoire est écrite par les vainqueurs, et c’est toujours la même dynamique qui se répète. Cela freine l’empouvoirement des groupes marginalisés, en laissant les dominants imposer leur vision de l’histoire.
C’est d’ailleurs l’un des aspects positifs de notre société actuelle, notamment avec l’essor des réseaux sociaux. Tout le monde peut désormais créer du contenu, documenter les événements et partager des perspectives différentes. Il devient beaucoup plus difficile d’effacer ou de masquer ce qui est en train de se produire, contrairement aux époques passées où tout était contrôlé par une poignée de personnes. L’empouvoirement numérique, à travers les réseaux sociaux, permet à chacun de raconter son histoire.
On pourra moins nous déposséder. Bien sûr, il y a toujours des leviers, on peut essayer de minimiser notre visibilité ou de réduire notre impact, mais malgré tout, nous sommes là, et ça, c’est quelque chose qu’on ne pourra pas nous enlever. C’est vraiment l’essence de ce que tu dis : l’histoire est écrite par les vainqueurs, et c’est un processus très courant dans les systèmes de domination. Les dominants vont toujours chercher à minimiser, voire effacer, les accomplissements, les réussites, les découvertes et les créations des personnes appartenant au groupe dominé. L’empouvoirement, c’est justement résister à cet effacement.
Cela me rappelle quelque chose, même si je n’avais pas forcément envie de le citer. Ce que tu dis me fait penser à cet ancien président qui avait déclaré que « l’Afrique n’était pas entrée dans l’histoire. » Quand on voit une figure aussi influente dans un pays qui continue d’exploiter énormément de richesses et de ressources en Afrique, affirmer une chose pareille, cela montre l’ampleur de ce système de domination. Tu te rends compte de l’impact que cela peut avoir.
C’est un exemple fort, mais il est semblable à celui des femmes que tu mentionnais plus tôt. Et quand tu es à l’intersection de ces systèmes de domination, que ce soit par ton genre, ton origine ou d’autres facteurs, cela devient encore plus lourd à porter. L’empouvoirement est encore plus nécessaire à ces intersections.
Je suis totalement d’accord avec toi, c’est effrayant de constater une telle méconnaissance. Et le pire, c’est que ce sont souvent ceux qui en savent le moins qui ont le plus d’influence, le plus d’impact. Ils finissent par convaincre d’autres personnes qui, faute d’esprit critique, répètent les mêmes idées sans les remettre en question. Ils ne vont pas se renseigner, ils se contentent de dire : « S’il le dit, c’est que c’est vrai. » Le manque d’empouvoirement chez ces personnes les empêche de développer leur propre esprit critique.
Ou « elle », bien sûr, si cela vient d’une femme. Mais dans ce cas précis, il s’agissait d’un homme, un ancien président, et c’est d’autant plus malheureux d’en arriver là. C’est même dangereux, car lorsque l’on efface des pans entiers de l’histoire, on finit par répéter les erreurs du passé. Si tu n’as pas la connaissance de ce qui s’est produit avant, tu es beaucoup plus susceptible de refaire les mêmes erreurs. Cela crée un cycle de problèmes qui se répètent sans fin, des conflits, des guerres, des injustices. C’est un cercle vicieux que l’empouvoirement doit aider à briser.
L’approche de Clémence sur l’empouvoirement
Exactement, d’où l’idée de créer des ressources, de partager des histoires pour permettre aux gens de s’informer, et surtout de montrer la diversité des vécus et des impacts de ce que nous avons pu traverser et de ce que d’autres ont vécu avant nous. Cela renforce l’empouvoirement en permettant de développer un esprit critique plus affiné et d’éviter de reproduire des systèmes qui ont déjà prouvé leur inefficacité.
Oui, c’est vrai qu’on a la chance aujourd’hui de pouvoir envisager de nouveaux possibles, mais pour construire ces nouveaux possibles, il faut que nous ayons des scénarios positifs. Cela me fait penser immédiatement à l’intelligence artificielle. Dans la plupart des films, des séries et des histoires, on voit des scénarios catastrophes où les robots dominent les humains, et où l’être humain devient esclave de la technologie. On voit très peu de scénarios positifs qui montrent, par exemple, que grâce aux nouvelles technologies, nous réussissons à sauver la planète. Il y en a, mais ils sont en minorité. Je le dis en exagérant volontairement, mais on a besoin de plus de récits d’empouvoirement qui donnent espoir.
Ce n’est pas seulement pour donner de l’espoir à l’humanité, mais aussi pour imaginer que l’égalité entre les femmes et les hommes peut enfin être atteinte. Il faut que ces récits deviennent plus fréquents, pour qu’on soit nourris par ces visions d’empouvoirement, plutôt que d’être matraqués en permanence par des récits de catastrophes ou de drames qui, bien qu’ils soient importants à connaître, finissent par occulter ce qui va bien. Le problème, c’est que si on ne parle que des mauvaises choses, comment peut-on avancer ? Les êtres humains, par nature, ont tendance à se concentrer davantage sur le négatif.
C’est tout à fait vrai, je suis d’accord avec toi. Et c’est précisément pour cela qu’il est indispensable de créer des narratifs qui vont dans la bonne direction. L’empouvoirement à travers des récits positifs permet de changer les mentalités et d’imaginer des futurs plus justes.
C’est un véritable enjeu sociétal. Mais c’est aussi pour cela que je me bats pour l’empouvoirement, et en particulier l’empouvoirement des femmes. Il existe des barrières systémiques, des obstacles sur lesquels, à titre personnel, nous ne pouvons pas toujours agir seuls. Il ne faut pas minimiser cela, c’est une réalité. Cependant, l’empouvoirement individuel aide à identifier et surmonter ces obstacles.
Cependant, il y a aussi des barrières que nous nous imposons à nous-mêmes, souvent parce que nous avons intégré des idées préconçues et des limitations internes. Ces « plafonds de verre » que nous nous imposons inconsciemment peuvent être brisés, mais cela demande une prise de conscience. Mon approche de l’empouvoirement, c’est justement d’aider les femmes à reconnaître ces barrières internes et à comprendre comment, à une échelle individuelle, elles peuvent agir pour penser et agir différemment.
Prenons l’exemple de l’intelligence artificielle que tu mentionnes. Pour créer des narratifs plus positifs, il faut des personnes capables de les écrire. Mais au-delà des compétences techniques, il faut le courage et la confiance de se dire : « Je peux le faire. » Peut-être qu’aujourd’hui, il n’existe pas encore de scénaristes spécialisées dans l’IA, ou qu’elles sont très peu nombreuses. Mais demain, ce pourrait être un métier. L’empouvoirement réside dans la possibilité, pour ces femmes, de croire que c’est accessible pour elles.
C’est là toute la notion de l’empouvoirement. Permettre à chacun, et surtout à chacune, de se dire que cela est possible, et de créer ce qui n’existe pas encore. C’est pour cela que je me concentre particulièrement sur l’empouvoirement des femmes, car c’est là où j’ai observé le plus de besoins.
Comment, à mon échelle, dans le champ d’action que je peux maîtriser, puis-je prendre confiance en moi, en mes compétences, et identifier ce que je peux développer ? Comment puis-je agir pour prendre ma place dans la société et créer ce qui n’existe pas encore ? Sans pour autant porter tout le poids sur mes épaules, car c’est énorme, bien sûr, mais l’idée est que chacun et chacune prennent un peu plus leur place et agissent à leur échelle. Cet empouvoirement individuel crée le fameux cercle vertueux du colibri, où chacun apporte sa petite contribution, sa pierre à l’édifice, et petit à petit, nous parvenons à créer des choses nouvelles et positives.
Je suis encore une fois totalement en accord avec ce que tu dis, et cela me fait immédiatement penser au Mois de l’Empowerment de Find Yourself. Je trouve que c’est vraiment une opportunité précieuse de rencontrer de nouveaux modèles, que ce soit à travers les différentes thématiques abordées. Un exemple qui me vient à l’esprit, c’est la table ronde sur la santé mentale, ou encore des sujets comme le désir ou le non-désir de maternité, ou l’endométriose.
Ce dernier n’est peut-être pas le plus récent, mais c’est avec Find Yourself que j’ai vraiment découvert ce sujet. C’est pour cela que cette association m’a particulièrement marquée, et je trouve cela formidable de donner aux gens l’opportunité de rencontrer des personnes qui leur permettent de ressentir l’empouvoirement à travers leurs parcours.
Cela ne veut pas dire qu’elles nous ressemblent forcément en termes de couleur de peau, de religion, ou d’autres caractéristiques physiques. Mais elles nous ressemblent par leurs valeurs, leurs parcours de vie. C’est ce que je trouve vraiment beau. Je pense que le fait d’avoir des rôles modèles est essentiel, surtout pour les femmes, car cela leur permet de s’inspirer, de prendre confiance en elles et de se dire : « Moi aussi, c’est possible. » L’empouvoirement passe également par cette capacité à se reconnaître dans d’autres parcours.
Cela me fait aussi penser à un autre point : dans les présidents, par exemple, nous n’avons jamais eu de présidente en France. Et cela crée forcément un biais. Une femme pourrait ne pas se sentir légitime à se présenter pour ce rôle, parce qu’elle n’a jamais vu quelqu’un comme elle accéder à cette fonction. Je dis « postuler » pour une campagne présidentielle, même si ce n’est pas vraiment le terme approprié. L’absence d’empouvoirement dans ces représentations contribue à ce biais.
Mais on se comprend ! Ce que je voulais dire, c’est que si une femme veut « run for president« , pour reprendre le terme en anglais, elle doit se sentir légitime à le faire, même si l’histoire n’a jamais montré de femme à ce poste. C’est important de se dire que c’est possible, et cela passe par la représentation, les rôles modèles, et l’empouvoirement collectif.
Parle-nous de la discrimination capillaire
Mais du coup, c’est vrai que s’il n’y a pas ce rôle modèle, une petite fille qui voit cela à la télévision pourrait se dire automatiquement : « Je ne suis pas représentée, ça ne me ressemble pas. » Cela me fait penser à une situation que je n’ai pas vécue personnellement, mais que j’imagine, par exemple, toi, lorsque tu étais petite et que tu regardais des séries où il n’y avait pas de personnes de ta couleur de peau, ou des personnages qui n’avaient pas les mêmes cheveux que toi ou ne vivaient pas les mêmes problématiques. Cela devait être difficile de t’identifier et de te dire : « Moi aussi, c’est possible. » Sans cette représentation, l’empouvoirement devient encore plus difficile à atteindre.
Cela me fait aussi penser aux cheveux crépus. Il y a encore beaucoup de stéréotypes à ce sujet, et je me rappelle que lors de ton dernier événement Find Yourself, tu avais porté tes cheveux en afro. Je me souviens d’un post que tu avais fait sur LinkedIn, où tu expliquais que tu avais initialement prévu de te coiffer différemment, avec des tresses, parce que tu redoutais un peu ce que les gens pourraient penser de toi.
Au final, tu n’as pas eu le temps de te coiffer comme prévu, et tu as laissé tes cheveux en afro. Et je me dis : pourquoi y a-t-il encore ce cliché selon lequel avoir une coupe afro signifierait que tu n’es pas coiffée ? J’avoue que j’ai du mal à comprendre, ce sont des cheveux, c’est normal de laisser tes cheveux vivre comme ils sont ! Et c’est là que l’empouvoirement joue un rôle clé dans l’acceptation de soi.
Écoute, c’est vrai que c’est un sujet qui semble simple, mais qui est en réalité bien plus complexe. Comme je l’ai dit dans mon post, ce ne sont « que » des cheveux, et en même temps, ce ne sont pas « que » des cheveux. Ce à quoi tu fais référence, c’est bien la fameuse soirée de lancement du Mois de l’Empowerment de cette année, un événement où l’empouvoirement était au centre des discussions.
J’avais effectivement tout prévu : une tenue, une coiffure, etc. Mais au dernier moment, la coiffure ne s’est pas du tout déroulée comme prévu. Comme tu l’as dit, je n’avais pas eu le temps de me coiffer comme je le voulais, et mes cheveux n’ont pas coopéré non plus. Il m’aurait fallu plus de temps pour atteindre le résultat souhaité. Donc, faute de mieux, j’ai laissé mes cheveux en afro, le plus libre possible.
Et même si j’ai beaucoup travaillé sur la confiance en soi, l’affirmation de soi, et l’empouvoirement, je n’ai pas pu m’empêcher de me dire : « Mince, je porte mon afro pour cet événement important, alors qu’il y aura peut-être des investisseurs présents, des partenaires, etc. » Malgré tout ce travail personnel, j’ai intégré cette idée que je pourrais être discriminée à cause de mes cheveux. Ce n’est pas une croyance limitante que j’ai inventée, mais une réalité factuelle. Il existe encore aujourd’hui des préjugés très forts autour des cheveux crépus, et des études l’ont prouvé. Il y a notamment une étude réalisée par Dove et LinkedIn en 2022 qui montre à quel point ces discriminations sont encore présentes.
En ce qui concerne la discrimination capillaire, notamment, je crois qu’environ 80 % des femmes aux cheveux bouclés, frisés ou crépus lissent leurs cheveux avant de se rendre à un entretien. Parce que, tu vois, dans certains métiers comme les hôtesses de l’air ou les stewards, tu ne peux pas te présenter avec une coupe afro, tes cheveux doivent forcément être lissés ou tirés en arrière. Cela s’applique à tous les métiers de représentation. Et c’est dans cette lutte pour l’acceptation que l’empouvoirement joue un rôle central, car il permet de s’affirmer face à ces normes.
Le modèle, ce sont les cheveux lisses. Et même au-delà des métiers de représentation, c’est cette norme de cheveux lisses qui prédomine. Si tu n’as pas les cheveux lisses, tu risques de recevoir des réflexions dès l’enfance : « Tu as mis les doigts dans une prise ? », « C’est tout doux, je peux toucher ? », comme si tu étais une curiosité. Mais je refuse de dire que mes cheveux sont anormaux. C’est un acte d’empouvoirement que de s’affirmer avec ses cheveux tels qu’ils sont, sans se plier aux attentes de la majorité.
Mes cheveux ne sont pas anormaux, ils contiennent de la kératine, comme tout le monde. Ils ont simplement une forme qui n’est pas celle de la majorité. Et oui, les cheveux peuvent être un facteur de discrimination. Pourquoi est-ce qu’on considère qu’un afro, des cheveux bouclés ou volumineux ne sont pas professionnels ? Je ne pourrais pas te dire exactement pourquoi, mais c’est un fait. Les cheveux qui prennent de la place, qui ne tombent pas simplement sur les épaules, sont souvent jugés comme non professionnels. Pourtant, l’empouvoirement consiste à repousser ces jugements et à se sentir légitime, quel que soit son style.
Je le sais pertinemment parce que j’ai déjà entendu des réflexions de ce type. Il y a eu de nombreuses histoires où des personnes ont été soit virées, soit non embauchées parce que leur coiffure n’était pas jugée assez professionnelle. En d’autres termes, leurs cheveux n’étaient pas lisses. Ce jour-là, quand je me suis retrouvée avec cette coiffure, je me suis dit : « Mince, et si des investisseurs étaient présents, est-ce qu’ils penseraient que je ne suis pas professionnelle à cause de ça ? » Ce genre de doutes ne fait que renforcer l’importance de l’empouvoirement pour contrer les discriminations et briser ces stéréotypes.
C’est très possible, et malheureusement, c’est très fréquent. J’ai donc décidé de faire un post à ce sujet, parce qu’il y a des personnes, comme toi, qui sont plus ouvertes et qui n’ont peut-être pas conscience de cette réalité, tout simplement parce qu’elles ne sont pas confrontées à cela. Elles se demandaient peut-être pourquoi je m’inquiétais. Mais pour te montrer à quel point c’est un sujet important, il y a même une proposition de loi qui a été soumise pour lutter contre la discrimination capillaire. L’empouvoirement est ici un levier essentiel pour pousser ces changements législatifs et sociaux.
En tout cas, merci de m’avoir permis de partager mon expérience à ce sujet, car je pense qu’il y a des personnes, comme toi, qui ne se rendaient pas forcément compte de l’ampleur de ce phénomène. Quand tu m’as vue sur scène, tu m’as trouvée flamboyante, pleine d’énergie, et tu étais loin de te douter que je ressentais tout cela. Mais c’est là où l’empouvoirement joue un rôle clé : malgré les doutes ou les craintes, il s’agit de s’affirmer, d’être fidèle à soi-même, et de s’élever au-delà des normes imposées.
Je ne m’étais vraiment pas posé de question à ce sujet. C’est pour ça que l’éducation est tellement importante. Sensibiliser les personnes qui ne sont pas confrontées à ces sujets permet de prendre conscience de certaines réalités. Et une fois qu’on a pris conscience, on peut à notre tour agir. Par exemple, lorsqu’on remarque des commentaires déplacés, on peut plus facilement remettre les personnes à leur place, selon notre personnalité, bien sûr. L’empouvoirement permet justement de poser des limites et de réagir de manière éclairée.
On peut poser les limites, alors que si on ne sait pas, on va simplement être choqué. Quand on est choqué, il est plus difficile de rebondir et de défendre efficacement. Mais quand on a la connaissance, c’est plus simple d’agir et de prendre la défense des personnes qui comptent pour nous. L’empouvoirement, dans ce contexte, donne non seulement la force de s’affirmer soi-même, mais aussi de soutenir ceux qui en ont besoin.
Exactement, et c’est vraiment ça, la vraie posture d’allié. Si tu as conscience de ces réalités, et si demain tu vois une personne moquée parce qu’elle a des cheveux volumineux, bouclés, frisés ou crépus en afro, tu sauras que c’est une microagression. Et cette microagression peut avoir un véritable impact. L’empouvoirement joue ici un rôle central, car il permet à chacun de se positionner en soutien des autres, tout en comprenant les enjeux sous-jacents.
Ce genre d’agression peut affecter non seulement la manière dont la personne se sent, mais aussi la manière dont elle est perçue professionnellement. Cela explique pourquoi tant de personnes ne se sentent pas encore capables de sortir avec leurs cheveux naturels. Elles se sentent obligées de défriser leurs cheveux, de les tresser, ou de porter des perruques, des tissages. Cela montre à quel point la nature du cheveu n’est pas encore acceptée, et l’empouvoirement consiste à changer cette dynamique pour qu’elles puissent s’accepter telles qu’elles sont.
Au-delà du manque d’acceptation de soi, cela crée une forme de désamour envers ses propres attributs. De nombreuses femmes disent aujourd’hui : « Je préfère mes cheveux lisses, je n’aime pas mes cheveux crépus, je ne trouve pas ça beau. » Elles disent parfois que cela est beau sur les autres, mais pas sur elles-mêmes.
Cela, pour moi, est un symptôme visible du fait qu’on leur a appris à ne pas se trouver belles telles qu’elles sont. Et donc, elles ressentent le besoin d’adopter le type de cheveux d’un autre groupe de femmes pour se sentir bien et belles. C’est là que l’empouvoirement est fondamental : il aide à redéfinir les standards de beauté et à permettre à chacun de s’aimer tel qu’il est.
Comment développer l’amour de soi
Mais ce que tu dis me fait réfléchir, et c’est un sujet que j’aime beaucoup aborder dans mes podcasts parce que je le trouve passionnant et essentiel : la découverte de soi et le développement de l’amour de soi. C’est un sujet tellement important, et je pense que l’amour de soi est vraiment un trésor intérieur qui reflète notre unicité.
C’est pourquoi il est important de le valoriser. Tu n’as pas besoin de ressembler à la personne que tu vois sur Instagram ou dans ton entourage pour te sentir bien. Ce qui compte, c’est d’être aligné avec toi-même, et c’est quelque chose qui prend du temps. L’empouvoirement, ici, consiste à se reconnecter à soi, à ses propres valeurs, et à cultiver cet amour de soi.
Je me disais que tu pourrais peut-être nous partager quelques pistes sur le développement de l’amour de soi et de l’alignement avec soi-même. Ce sont des choses tellement importantes, surtout dans un monde où, aujourd’hui, on cherche du sens dans le travail et dans ce que l’on fait au quotidien. Plutôt que d’agir de manière mécanique, il est essentiel de trouver ce qui nous fait vibrer. L’empouvoirement, c’est aussi cela : se reconnecter à ce qui nous motive réellement et trouver du sens dans ce que nous entreprenons.
Ce que tu dis est vraiment fondamental. L’amour de soi est quelque chose qui n’est pas forcément cultivé ni appris, ni dans la plupart des familles, ni à l’école. On ne nous pose jamais la question de savoir si l’on s’aime. Dans ma quête de découverte de moi-même et d’amour de moi-même, l’une des premières choses que je pourrais conseiller est d’apprendre à se connaître le plus tôt possible. Cela paraît simple, voire banal, mais c’est la base de l’empouvoirement : connaître qui l’on est, un peu comme on fait l’effort de connaître un ami, un partenaire ou un collègue de travail.
Apprendre à se connaître soi-même, comme si tu te mettais à distance pour observer qui tu es, quel type de personne tu es. Cela nécessite de passer du temps avec soi, de ne pas avoir peur de la solitude, de réfléchir à ce qui nous fait plaisir, que ce soit seul ou avec d’autres. L’empouvoirement passe par cette observation de soi, cette réflexion pour mieux comprendre sa propre personnalité, car il est toujours plus facile d’aimer quelqu’un que l’on connaît. C’est une vérité simple mais puissante, et cela nécessite aussi de se distancier à un moment donné de ce que les autres projettent sur nous.
Ce que les autres projettent sur nous peut être un bon indicateur, surtout si on évolue dans un environnement sain. Tes parents, ta famille, sont ton premier cercle de socialisation, ils te donnent les premières bases pour te construire et projettent certaines attentes sur toi. Mais il est important d’avoir ce temps de distanciation entre ce que les autres disent de toi et ce que tu es réellement. L’empouvoirement, c’est aussi cela : pouvoir s’autodéfinir, s’autodéterminer, et ne pas laisser les projections des autres limiter notre vision de nous-mêmes.
Se donner la possibilité de se définir par soi-même est une des bases de l’empouvoirement. Dans ma vision des choses, cela fait partie intégrante du processus d’autodétermination : savoir qui l’on est, qui l’on veut devenir, et comment aligner ses actions avec cette vision de soi. C’est ainsi que l’on peut avancer dans la vie avec confiance et authenticité.
Aussi, tout simplement parce qu’à un moment donné, nous portons toutes et tous des masques. En société, tu portes un masque. Pour survivre dans ton entreprise, tu portes un masque. Parfois, même face à des amis intimes, tu portes un masque. Face à ta famille, tu portes un masque. Parce qu’il n’est pas toujours possible d’être authentique à 100 %. Malheureusement, tu ne peux pas l’être tout le temps, car ce n’est pas toujours approprié, ni souhaitable. Parfois, tu as besoin de te protéger. Mais l’empouvoirement consiste aussi à savoir quand et comment revenir à soi, à son authenticité, en prenant du temps pour soi et en s’observant en dehors de ce que les autres disent de nous.
Cela me semble essentiel de s’accorder ce temps. Il faut également accepter que des notions comme la confiance en soi ou l’estime de soi fluctuent. L’estime de soi, à mon avis, est un peu différente de la confiance en soi ou de l’amour de soi. Ce n’est pas toujours linéaire. L’empouvoirement, c’est comprendre que s’aimer ne signifie pas se trouver génial tout le temps, ni se penser constamment au top. C’est savoir qui l’on est, reconnaître ses parts d’ombre, ses parts de lumière, et aussi celles que l’on n’a pas encore explorées.
S’aimer, c’est regarder tout cela avec gratitude et bienveillance, parce que c’est ce qui fait de nous la personne que nous sommes. L’empouvoirement implique de se traiter avec la même bienveillance que celle que nous réservons aux autres. De la même manière qu’une personne qui nous est chère peut avoir des moments de faiblesse sans que cela n’altère l’amour que nous avons pour elle, il est important de s’accorder cette même indulgence. C’est accepter que, même dans les moments où l’on n’est pas au meilleur de soi-même, on reste intègre. C’est une forme d’empouvoirement essentielle.
Je partage complètement ta vision, car moi aussi, je suis dans une quête d’amour inconditionnel pour moi-même. Pour moi, l’inconditionnel, c’est exactement cela : s’aimer dans les bons moments comme dans les mauvais, être bienveillant envers soi-même, car au final, nous sommes la personne la plus importante de notre propre vie. L’empouvoirement, c’est comprendre cette vérité profonde et l’appliquer quotidiennement.
Exactement, c’est tout à fait cela. Nous sommes toujours la personne la plus importante de notre vie, et c’est un point fondamental à intégrer. L’empouvoirement passe par cette prise de conscience et par le fait de nous accorder cette importance. Le mot de la fin est que l’empouvoirement, dans toutes ses dimensions, est un chemin vers une plus grande authenticité et acceptation de soi.
Le mot de la fin sur l’empouvoirement
C’est vrai que le temps passe très vite, et nous allons tranquillement vers la conclusion. J’aurais adoré pouvoir continuer de discuter avec toi. Pour mes dernières questions, quel serait ton mot de la fin par rapport à tout ce que tu nous as dit ?
Je ne sais pas qui nous écoute en ce moment, au moment où les personnes entendront ça. Mon mot de la fin serait d’encourager chacune et chacun à aller vers l’empouvoirement. Et encore une fois, l’empouvoirement, ce n’est pas uniquement cette idée d’être « la meilleure version de soi-même. » C’est une bonne chose de vouloir s’améliorer, cela peut nous pousser à nous dépasser, à nous fixer des objectifs et à trouver de la motivation.
Mais parfois, l’empouvoirement, c’est aussi se dire : « Là où je suis, avec ce que j’ai, j’ai des capacités et des opportunités. » Il s’agit de reconnaître que nous avons le choix, que nous avons le pouvoir de décider comment nous voulons voir notre vie, comment nous voulons la mener, et quel impact nous voulons avoir sur nous-mêmes et sur les autres.
Il est important de ne jamais minimiser cette capacité à avoir de l’impact, peu importe sa taille. Il n’y a pas de « petit » impact. C’est un aspect fondamental de l’empouvoirement : reconnaître son propre pouvoir d’influence, aussi modeste soit-il, et l’utiliser pour créer du changement. Ensuite, sur la question de l’amour de soi, je voudrais vraiment encourager au maximum toutes les personnes qui nous écoutent à cultiver cet amour d’elles-mêmes. Nous vivons dans une société qui n’est pas toujours facile, certes, mais plus nous avons de la bienveillance envers nous-mêmes, plus il devient facile de donner de l’amour et de la bienveillance aux autres. L’empouvoirement, c’est aussi cela : s’aimer soi-même pour mieux aimer les autres.
Et enfin, dernière chose, ouvrez vos esprits. Ouvrez vos esprits autant que possible, parlez à des personnes qui ne vous ressemblent pas, à des personnes qui ont des idées différentes des vôtres. Cela ne veut pas dire que vous allez forcément changer d’avis ou vous convaincre mutuellement de quoi que ce soit. Mais l’empouvoirement, c’est aussi échanger des points de vue, créer de nouvelles façons de penser, se connecter les uns aux autres. Cela nous aide à lutter contre cette fameuse xénophobie qui nous empêche de bâtir la société que nous méritons toutes et tous.
Qui sont tes rôles modèles ?
C’est une très belle conclusion que tu nous as donnée. Malheureusement, je ne vais pas pouvoir rebondir, sinon on continuerait à discuter encore et encore. Mais vraiment, merci pour ce partage. Pour terminer, j’aimerais te poser une dernière question : qui sont tes rôles modèles ?
Ah, c’est dur cette question ! Mais je vais en donner deux. Le premier rôle modèle qui me vient à l’esprit est Angela Davis, militante afro-américaine qui a énormément œuvré pour les droits civiques. Je m’étais replongée dans son histoire récemment, et je l’ai trouvée fascinante. Elle a eu la capacité de fédérer au-delà des frontières, et elle a traversé des épreuves très difficiles, comme des mandats d’arrêt, sans jamais perdre son intégrité. J’admire les personnes qui, convaincues de la justesse de leur combat, continuent d’avancer malgré l’adversité et d’incarner l’empouvoirement. Angela Davis est vraiment une source d’inspiration à ce niveau-là.
Ensuite, un peu plus personnel, mais tout aussi important : ma mère et ma grand-mère. Elles ne sont pas célèbres, mais elles représentent pour moi des rôles modèles de la vie quotidienne. Par leur parcours de vie et les valeurs qu’elles m’ont inculquées, elles m’ont montré ce que signifie être une femme accomplie. C’est grâce à leur exemple que j’ai compris l’importance de l’empouvoirement. Elles ont créé une histoire de famille, ont traversé des épreuves, et ont toujours été des piliers dans ma conception de la force féminine. Si je pouvais être la moitié de ce qu’elles sont pour mes enfants, je me considérerais comme ayant réussi ma vie.
C’est magnifique et tellement profond ce que tu nous partages. Je comprends tout à fait, parce que moi aussi, ma famille est une source d’inspiration immense. Pour beaucoup de gens, la famille représente un ancrage fort, mais je comprends aussi que ce ne soit pas toujours le cas pour tout le monde. Ce qui compte, c’est de mettre en lumière ces femmes qui ont eu un impact sur nos vies, et grâce à cet empouvoirement qu’elles nous ont transmis, nous pouvons à notre tour impacter le monde.
Exactement ! C’est encore une fois cette notion d’impact. Il ne faut jamais minimiser l’impact que nous pouvons avoir sur les autres. Même si ces femmes ne sont pas connues du grand public, elles ont eu un impact énorme sur moi et sur d’autres, et nous sommes nombreuses à pouvoir dire la même chose. C’est cela, l’essence de l’empouvoirement : comprendre que chaque geste compte et que notre influence peut se propager au-delà de ce que nous imaginons.
Quelles ressources tu recommanderais aux personnes qui nous écoutent ?
Entièrement d’accord avec toi. Et pour continuer sur ces petites questions, quelles ressources recommanderais-tu aux personnes qui nous écoutent ?
Trop mignonne ! Alors je vais prêcher pour ma paroisse déjà : Matrimoine Féministe. C’est tout le travail que tu es en train de faire pour rendre les notions de féminisme accessibles à toutes et à tous, pour permettre de questionner, de partager des histoires de vie. C’est une vraie démarche d’empouvoirement. Je te remercie de me donner la parole, parce que même si je suis une personne « anonyme », tu me permets de partager mon histoire. Peut-être que cela inspirera ou fera réfléchir certaines personnes. Et tu mets vraiment en lumière des sujets qui doivent l’être dans cette société, ce qui est de la plus haute importance.
Je recommanderais aussi le Talk Show de Find Yourself, ainsi que le podcast. Pour le podcast, on parle davantage de développement personnel, tandis que le Talk Show met en avant des histoires de vie ou des sujets très précis sur lesquels il faut qu’on discute davantage. Là encore, l’empouvoirement se manifeste par la diversité des femmes que vous n’auriez peut-être pas l’occasion de voir ailleurs. Ces femmes abordent des thématiques qui peuvent sembler éloignées, mais en écoutant leurs histoires, on réalise souvent que cela nous touche d’une manière ou d’une autre.
Parfois, même si un sujet ne nous concerne pas directement, on peut toujours se dire : « Ah tiens, moi aussi j’ai vécu ça, » ou « Je n’avais jamais vu les choses sous cet angle. » Cela permet de mieux comprendre certaines situations et de connecter avec l’autre. Et cette connexion est au cœur de l’empouvoirement, car elle nous aide à grandir, à évoluer, et à mieux comprendre le monde qui nous entoure. Voilà pour les ressources que je recommanderais.
Que signifie le terme féminisme pour toi ?
Merci pour ce partage et merci encore d’être venue à mon micro. Ça me fait vraiment très plaisir. Il reste encore deux questions, donc la conclusion viendra juste après. Mais oui, j’adore discuter avec des femmes qui m’inspirent, et j’espère qu’elles inspireront aussi les personnes qui nous écoutent. Donc, voici la première des deux dernières questions : que signifie pour toi le terme féminisme ?
Pour moi, le féminisme, c’est avant tout l’égalité là où nous pouvons être égaux, notamment l’égalité entre les genres. Je vais parler ici de l’égalité entre hommes et femmes, mais bien sûr, cela peut s’étendre à tous les pans de la société. Ce sur quoi nous pouvons être égaux, c’est par exemple économiquement : un homme et une femme ayant le même niveau de compétences, les mêmes aptitudes et les mêmes responsabilités doivent être payés de la même manière. L’empouvoirement, dans ce cadre, consiste à s’assurer que les femmes ne soient pas discriminées parce qu’elles pourraient potentiellement tomber enceintes, par exemple.
Le féminisme concerne aussi la répartition de la charge mentale au sein des familles.
Nous sommes deux à concevoir un enfant dans un couple hétérosexuel, donc il n’y a aucune raison que la femme sacrifie plus que l’autre personne avec laquelle elle a choisi de concevoir cet enfant.
L’empouvoirement, ici, passe par une répartition équitable des tâches pour le bien-être du foyer entier. Il en va de même pour l’occupation de l’espace public : il n’est pas normal que, moi, en tant que femme, je doive calculer l’heure à laquelle je rentre chez moi ou dépenser plus d’argent pour prendre un taxi afin d’assurer ma sécurité. L’empouvoirement consiste à revendiquer notre droit d’exister pleinement dans l’espace public sans être intimidées ou restreintes.
Je parle aussi de ces petits moments du quotidien, comme dans le métro où je dois me faire toute petite pendant que Jean-Michel s’étale en écartant les jambes. Tout cela relève d’une société qui ne traite pas les individus de manière égale en fonction de leur genre. Le féminisme, c’est vouloir l’égalité sur ces aspects-là. Il ne s’agit pas de comparer des choses comme la force physique, car souvent, c’est l’un des arguments utilisés contre l’égalité des genres : « Ah, vous voulez être égales aux hommes ? Alors battez-vous comme eux. » Ce n’est pas de cela qu’il s’agit. L’empouvoirement, c’est de revendiquer l’égalité là où elle est possible et nécessaire.
Le féminisme, pour moi, c’est aussi lutter contre cette société patriarcale, qui enferme aussi bien les hommes que les femmes, ainsi que les minorités de genre. C’est un système de domination qui enferme tout le monde dans des rôles rigides. Les hommes aussi subissent des injonctions qui les empêchent de vivre certaines choses librement. L’empouvoirement, dans ce sens, signifie permettre à chaque individu d’être simplement un individu, avant d’être défini par son genre, qu’il soit homme, femme, personne trans, etc. C’est en libérant chacun de ces carcans que nous pourrons créer une société plus juste et plus vertueuse.
Qui aimerais-tu voir au micro de Matrimoine Féministe ?
Je suis totalement en phase avec tout ce que tu as dit, c’était très beau et très bien expliqué, donc merci. Et pour la dernière question, qui aimerais-tu voir au micro de Matrimoine Féministe ?
Alors franchement, il y a plein de personnes qui me viennent en tête. Ce qui est génial, c’est que beaucoup de celles auxquelles je pense sont déjà sur ta liste d’invitées. Par exemple, Asli, Stencia, Morgane, ce sont des personnes que tu as déjà interviewées ou que tu vas interviewer. Si je devais te proposer quelqu’un d’autre, je dirais Valérie Aguila. Je ne sais pas si elle est déjà prévue, mais elle serait parfaite. Elle est la fondatrice de GenClub, une association qui fait un travail formidable dans l’empouvoirement des femmes.
Ah, mais attends, Valérie Aguila, ça me dit quelque chose. Je crois que je l’ai interviewée sur le sujet du SOPK (Syndrome des Ovaires Polykystiques), de mémoire. Et je crois qu’elle était à Find Yourself la dernière fois. Oui, ça me revient !
C’est fort possible, elle a déjà participé à plusieurs tables rondes de Find Yourself. Je ne sais plus si vous vous êtes croisées la dernière fois, mais en tout cas, elle serait une excellente invitée pour parler de l’empouvoirement et de ses nombreuses initiatives.
Oui, ça me dit quelque chose ! Je crois qu’elle fait partie des invitées du second round d’interviews pour cette année. Pour les personnes qui nous écoutent, petite coulisse de Matrimoine Féministe, j’enregistre mes épisodes de mi-mars à fin juin, puis je reprends de septembre à décembre. Elle est probablement prévue dans cette tranche.
Ok, c’est génial alors, parce que c’est tout un vivier de femmes incroyables que tu as rencontrées pendant le mois de l’empouvoirement. Je pense aussi à Souba Brunel, que tu as déjà interviewée, et à Tsipora Sidibe, qui avait abordé le sujet du désir et non-désir de maternité. Elle serait parfaite également.
Oui, Tsipora va être interviewée aussi. Elle n’était pas disponible pour le moment, mais c’est prévu pour plus tard, sans doute dans une prochaine session d’enregistrement.
Super ! Et tu pourrais aussi interviewer Anaïs Avichard. En fait, toutes les femmes que tu as croisées pendant le mois de l’empouvoirement ont quelque chose d’unique à apporter. Elles ont toutes une vraie valeur ajoutée, un esprit critique et souvent un esprit politique, car il faut le dire, tout ce que nous faisons est profondément politique. Donc vraiment, tu ne peux pas te tromper avec elles, elles sont toutes exceptionnelles.
Trop bien, merci pour ces suggestions. C’est aussi grâce à toi que j’ai pu rencontrer certaines de ces femmes. Je trouve ça formidable de pouvoir discuter avec des invitées en vrai, même si ce n’est pas toujours possible. Quand j’en ai l’occasion, c’est vraiment précieux. Et merci à toi, car Matrimoine Féministe doit beaucoup à ton soutien et à toutes ces connexions que tu m’as permises de faire. C’est aussi ça, l’empouvoirement : créer des ponts entre les personnes et les idées.
Ça me touche vraiment, tu vois. Comme quoi, parfois, je me dis que c’est dur d’entreprendre. Peut-être que tu feras des podcasts sur ça, sur la difficulté d’avoir un projet social. Franchement, il y a des moments où tu as envie d’abandonner. Mais quand tu me dis des choses comme ça, je réalise que ça t’a poussé aussi à faire ce que tu voulais.
L’empouvoirement, c’est ça : voir que ce qu’on entreprend peut avoir un impact et que ça valait chaque heure de travail. Je suis tellement contente d’avoir fait tout ça, et je te remercie pour ces dédicaces, ces famages. Merci pour ton travail, c’est incroyable ce que tu crées, et je te souhaite beaucoup de succès dans tout ce que tu fais.
Merci beaucoup, je ressens exactement la même chose. Encore une fois, sans toi, Matrimoine Féministe n’aurait peut-être pas pris cette forme. J’ai même fait une dédicace sur mon site internet parce que je trouve ça tellement important de reconnaître les personnes qui nous poussent vers le haut. Ton travail m’a vraiment aidée à avoir de l’impact, à créer du contenu qui, je l’espère, résonne auprès des autres. L’empouvoirement se manifeste aussi dans ces soutiens mutuels qui nous permettent d’évoluer, que ce soit personnellement ou professionnellement. Donc, un grand merci à toi.
C’est un grand plaisir, et merci mille fois pour ce retour. Ciao, ciao !
Avec grand plaisir ! Et bien sûr, merci aussi aux personnes qui nous ont écoutés jusqu’au bout. C’est vrai que cet épisode est un peu plus long que les précédents, et c’est chouette ! L’empouvoirement, c’est aussi prendre le temps de se poser, de réfléchir et de partager ensemble. Merci à vous toutes et tous, et je vous dis à la prochaine. Ciao ciao !
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES
Les rôles modèles et ressources mises en avant dans cet épisode :
- Angela Davis
- Sa mère et sa grand-mère.
- Matrimoine Féministe
- Le Talk Show de Find Yourself, ainsi que le podcast
Retrouvez Clémence Mouellé Moukouri
Episodes complémentaires
- L’ambition féminine avec Minetou Ndiaye Saint-Drenant
- Le féminisme intersectionnel avec Asli Ciyow
- Tes livres jeunesse inclusifs avec Sylvie Li
- La psychologie transculturelle avec Mélanie Vijayaratnam