Bonjour, bonsoir aux personnes qui nous écoutent. Je suis en compagnie d’Eva Fiorini, avec qui nous allons parler de son guide violentomètre répertoriant des comportements violents, une sorte de violentomètre très détaillé.
Eva, je te laisse te présenter de la manière dont tu le souhaites.
Bonjour à toi, bonjour à toutes les personnes qui écoutent cet épisode en lien avec le guide violentomètre que j’ai créé. Moi c’est Eva Fiorini, j’ai bientôt 23 ans et c’est un sujet qui évidemment m’intéresse plus que fortement parce qu’il est lié à ma condition personnelle mais bon ça on en reparlera. Et donc je serai bientôt diplômée en droit. Je suis également de nombreuses formations en criminologie.
J’aimerais d’ailleurs me spécialiser en faisant un master en criminologie ensuite. Donc disons que le sujet des violences conjugales, du violentomètre, me touche particulièrement. J’ai fait également de nombreuses formations dans tout ce qui est violence conjugale, droit des femmes, violentomètre etc. En ce moment, je ne suis pas en France parce que je fais mes études à l’étranger, en Italie.
Quelle est la situation des femmes victimes de violences conjugales ?
Très bien, merci de la présentation. Pour introduire le sujet de ton guide violentomètre, je voulais savoir quelle est la situation des femmes victimes de violences conjugales. C’est à des chiffres à nous partager.
Je ne suis pas du genre à suivre les statistiques au jour le jour, mais évidemment il y a des chiffres à connaître. On parle de 134 femmes environ qui ont été tuées en 2023, on parle d’un chiffre minimum, parce qu’évidemment il y a beaucoup de cas qui n’ont pas été répertoriés comme féminicide, parce que masqué en autre chose, dans l’accident, etc.
Cela fait une femme tous les trois jours. Ce n’est pas du tout quelque chose de négligeable, c’est vraiment un sujet qu’il y a des personnes qui ne prennent pas assez au sérieux, donc on rappelle bien une femme tous les trois jours. 99% des cas ce sont des femmes qui ont des enfants, donc aussi c’est pour ça que le sujet est assez sensible.
Et ça me semble aussi important de rappeler qu’il n’y a qu’une femme sur quatre qui porte plainte. Donc il faut rappeler aux femmes de porter plainte. Mais évidemment il faut que la police suive ensuite parce qu’on parle d’environ 80% d’affaires qui sont classées sans suite et ce n’est pas juste des chiffres. Parce que j’ai expérimenté ça. Ce sont des chiffres qui sont importants à rappeler.
Mais il ne faut pas se baser juste sur des chiffres. La violence conjugale, ce n’est pas juste des chiffres.
Qu’est-ce qu’un violentomètre ? Et ton guide violentomètre ?
Merci de nous avoir partagé ces insights. C’est vrai que ce sont des chiffres qui sont vraiment conséquents et je trouve ça toujours aberrant qu’il n’y ait pas plus de moyens qui soient mis en place pour défendre les femmes victimes de violences.
Et c’est vrai comme tu dis, même si on porte plainte, il faut que la justice suive, mais d’un côté la plainte c’est le premier pas, donc c’est sûr que c’est quelque chose à inciter par la suite.
Et vu que tu as fait un guide violentomètre pour aider ces femmes, d’abord je voulais proposer comme question ce qu’est un violentomètre pour les personnes qui ne connaissent pas et après c’est quoi la différence entre le violentomètre et ton guide violentomètre pour que les personnes qui nous écoutent puissent avoir toutes les informations clé en main sur le violentomètre.
Alors pour raconter un peu, c’est vrai que le premier violentomètre que j’ai vu de ma vie, je me rappelle, c’était ma mère qui me l’avait donné, un violentomètre basiques qu’on voit souvent, heureusement déjà, qu’on voit dans les pharmacies ou des fois que les associations distribuent. Et c’est la première fois que j’en ai vu, je l’avais lu et je me rappelle, j’avais gardé le violentomètre sur mon tiroir.
Et évidemment, j’écoute beaucoup de femmes battues, j’écoute beaucoup de reportages, d’émissions où on en parle. Par exemple, ça commence aujourd’hui, des sortes d’émissions de ce genre que j’aime beaucoup, on reçoit des témoignages. Et c’est vrai que j’ai toujours vu le même schéma.
Alors pourquoi est-ce qu’on ne peut pas prévenir les femmes ? Mais si vous voyez que ce schéma se met en place, c’est là qu’il faut partir ? Et j’avais ressorti ce violentomètre que j’avais relu à ce moment-là et je me suis dit mais ce n’est pas assez détaillé. Effectivement on a des comportements sur le violentomètre mais on a quoi ? Une dizaine de comportements sur le violentomètre ? Ce n’est vraiment pas assez et c’est vraiment trop général le violentomètre classique.
Et on sait que les femmes à ce moment-là, elles sont beaucoup dans le déni, elles sont dans la honte, elles sont dans la non-acceptation de ce qu’elles sont en train de vivre. Et donc je me suis dit, il faudrait quelque chose pour que les femmes puissent visualiser le comportement qu’elles subissent en détail. Et c’est là que j’ai commencé un peu à écrire et que j’ai eu l’idée de mon guide violentomètre.
J’ai écrit des comportements que dans le langage de tous les jours on dit toxique, je déteste ce mot, mais c’est pour un peu faire comprendre. J’ai répertorié ça, j’ai essayé de les classer en fonction du moment de l’emprise, quand elle se met en place, quand elle se consolide et quand il y a vraiment un potentiel de passage à l’acte. Et pour moi, violentomètre c’est vraiment ça.
C’est répertorier des comportements de la part de l’agresseur, de la mise en place, de l’emprise au potentiel passage à l’acte. Et ce qui fait la différence, avec le mien, c’est que c’est très détaillé. Et il y a des petites cases sur mon guide violentomètre où les femmes peuvent cocher le comportement correspondant ? Donc par exemple, mon compagnon m’isole, il m’insulte de ça, ça, ça. J’ai vraiment mis les termes. Donc elle coche sur mon guide violentomètre.
Elle coche une fois une case, deux cases, trois cases via mon violentomètre amélioré. Je pense que psychologiquement, elles peuvent se rendre compte de ce qu’elles cochent sur mon violentomètre plus poussé. Dès qu’on coche une case sur ma version du violentomètre, on est victime de violence. Que ce soit dans la première page, en jaune, dans la mise en place de l’emprise, c’est une violence. Il y a non seulement ça, mais il y a en plus les pages suivantes où elles vont pouvoir voir comme sur un violentomètre classique, j’ai coché un peu de jaune, là je coche du orange, c’est le rouge qui m’attend.
Donc visualiser le comportement qu’elle subisse, le comportement qu’elle pourrait subir. Et c’est vraiment ça que j’ai voulu mettre en place dans mon guide violentomètre. C’est qu’il y a toutes les pages et une fois qu’on les a, on peut feuilleter et on peut voir ce qui nous attend. Et la dernière case qui nous attend c’est le passage à l’acte. Moi c’est vraiment ça que j’ai voulu mettre en place.
En tout cas, vraiment bravo pour ce travail d’avoir fait ce guide violentomètre. Franchement, c’est un super travail qui pourra aider beaucoup de personnes, notamment des femmes victimes de violence. Bien évidemment, je mettrai le lien dans la description pour toutes les personnes qui nous écoutent, qui voudraient aller plus loin, approfondir et découvrir ce guide violentomètre.
Quel est le schéma des violences conjugales ?
Et ça me fait penser, tu parlais d’un schéma, le même schéma qui se reproduit. Donc, est-ce que tu pourrais nous en dire un peu plus ?
Alors, ce que je dis toujours, c’est qu’on n’est pas sur une science exacte, c’est un comportement humain. Donc oui, on parle d’un schéma qui se répète. Mais le schéma peut différer, On peut passer d’un homme qui est, “simplement un peu trop jaloux”, au passage à l’âge directement. Donc j’aimerais juste dire ça avant, c’est que ce n’est pas une science exacte. Dans mon livret violentomètre la section se nomme “il peut passer à l’acte, ceci n’est pas de l’amour”.
En général, l’emprise s’installe parce que l’homme éloigne sa victime, parce qu’on parle de victime, on ne parle pas d’amour. Quand on est dans une relation type avec une personne qu’on peut définir comme un pervers narcissique, il n’aime pas. Dans mon livret violentomètre la section est “l’emprise s’installe, partir”
Il n’aime pas, il domine. Pour lui, la victime est sa possession. Donc en tant que possession, il va déjà l’éloigner, l’éloigner physiquement de ses amis, en insultant un peu ses amis. Oh non, faut pas que tu traînes avec lui ou elle, oh non, tu te rends compte, vous sortez en boîte, il y a des garçons. On peut vulgairement caractériser ça par de la jalousie. La jalousie, ce n’est pas de l’amour. Le violentomètre et le guide violentomètre peuvent être utiles pour se rendre compte des évènements.
Donc un compagnon qui serait jaloux, possessif et qui tenterait d’éloigner pour s’accaparer sa victime. Donc déjà là quand on commence à voir des mots : tu m’appartiens, sors pas comme ça, tu es à moi, je ne veux pas que les gens te regardent. Ils choisissent un peu la personne qui devient une chose. Donc ça c’est la mise en place. La prévention est de mise et le violentomètre permet de prendre de la hauteur.
Ensuite, quand l’emprise s’est installée (dans le livret violentomètre cela correspond à la section “l’emprise est maintenant en place partir maintenant”), quand il a vu que cette femme, il pourrait réussir un peu à la manipuler, il va mettre en place différentes choses, donc déjà il va vous dire « sans moi tu n’es rien », ce genre de choses. Sans moi tu n’es rien, tu ne pourras jamais trouver mieux que moi. Il va culpabiliser sa victime et son but va être de l’écraser, de l’écraser pour lui être au dessus. Tout ceci est décrit dans le guide violentomètre : les caractéristiques d’un homme violent/pervers.
Et après on a des cycles de violence. Et c’est ça qui fait que la femme n’arrive pas à partir, donc on va le rappeler. Des excès de colère. Donc des cris, des insultes, il va pouvoir jeter des objets à la figure, sur le mur, etc. Pendant un certain nombre de temps. Ensuite on va avoir ce qu’on appelle une lune de miel. Donc il va s’excuser, il va acheter des fleurs, il va être le plus gentil. Et c’est ça qui fait que la victime à chaque fois, elle ne part pas et elle y croit.
Non mais c’est bon, là il a changé, là c’est bon. Et c’est ainsi qu’il continue. Donc de la violence avec une période d’amour. Mais attention, je ne le répéterai jamais assez, ce n’est pas de l’amour. Tout ça fait partie d’une manipulation. Et je l’ai répété également dans mon livret violentomètre pour reconnaître une relation dangereuse.
Il va nous faire croire qu’il nous aime pour que nous on s’accroche, on dépend de lui pour ensuite plus nous enfoncer et plus nous faire du mal quoi. Après bon dans mon guide violentomètre il y a tellement de comportements mais déjà ce que j’aimerais je pense dire ici aussi c’est qu’on peut repérer différents types de violences.
On a souvent l’image d’une femme battue qui a des cocards, qui a des bleus. Évidemment, c’est une réalité malheureuse. Mais j’aimerais aussi qu’on s’attarde sur tous les différents types, parce qu’il n’y a pas que ça. Je l’évoque évidemment dans mon guide violentomètre. Il y a des femmes battues qui sont victimes de violences qui ne s’en rendent pas compte, parce qu’elles sont, entre énormes guillemets, seulement victimes de violences, par exemple, psychologiques. Mais c’est une violence. Il faut le rappeler,
Ça fait partie de l’emprise quand il insulte, quand il dénigre, quand il rabaisse, quand il menace. Ça, c’est de la violence, quand il vous empêche de faire certaines choses, d’avoir certains types de comportements, de sortir avec certains vêtements, Ça, c’est une violence, Il n’est pas obligé de crier, La manipulation, le fait de dénigrer, tout ça, ce n’est pas forcément en criant, ce n’est pas forcément en jetant des assiettes. N’hésitez pas à cocher des cases sur mon livret violentomètre.
On a la violence physique : quand on frappe, on lance des objets, on coupe, on brûle une cigarette sur la peau, ça c’est une violence physique. La violence sexuelle qu’on connaît aussi.
Une femme n’a pas de devoir conjugal. Une femme, si elle n’a pas envie d’avoir un rapport avec son compagnon, elle n’a pas envie. On rappelle que le viol, c’est également par surprise. C’est vrai que c’est une mention qu’on ne dit pas assez souvent. Si la femme dort, qu’elle ne veut pas être dérangée, non, c’est un viol. Il faut savoir mettre les mots. Il faut comprendre que c’est très grave et mon livret violentomètre peut permettre cette prise de conscience.
Une femme peut se faire violer par son compagnon. Et la violence à laquelle on ne parle pas assez, c’est la violence économique. Parce que si votre compagnon vous empêche de travailler, c’est de la violence économique. Pourquoi ? Parce que vous dépendez de lui. Et c’est là où est le problème. Du moment qu’on dépend de son compagnon, qui est d’autant plus violent, on ne peut pas partir. C’est ce que j’explique dans mon livret violentomètre.
On se répète souvent, mais pourquoi la femme n’est pas partie ? Si elle dépend économiquement de son compagnon, comment fait-elle pour partir ? En plus, on a vu que la majorité des femmes ont des enfants. Comment font-elles pour partir sans argent ? J’ai également ajouté dans mon livret violentomètre comment fuir ?
Donc là, si vous êtes victime de violence économique, votre compagnon vous empêche de travailler ou alors il va vous dire non mais fais un part time c’est mieux pour nous donc il va réduire votre salaire si vous vous devez demander de l’argent à votre partenaire vous êtes victime de violence économique si vous disposez pas de votre argent comme vous le voulez vous êtes victime de violence économique. Je le décris dans les types de violences de mon livret violentomètre.
Voilà ça c’est très important de le dire je me suis un peu égarée par rapport à ta question de notre épisode sur mon guide violentomètre mais c’est dur d’avoir un schéma mais si on doit vraiment faire un résumé de ce que je viens de dire :
Ce qui doit nous alerter, c’est la jalousie, la possessivité, le fait qu’on dépend de cet homme, même émotionnellement, parce que quand il nous dénigre, on se dit mais si je pars, personne d’autre pourra m’aimer comme lui, on dépend effectivement de la personne, si on reçoit un seul coup, c’est de la violence physique, si on est touché à notre insu, si on dépend lui économiquement. Ça c’est tout, le schéma en lisant tous les types de violences et puis surtout les caractéristiques que j’ai noté pour écrire sur le violentomètre.
La romantisation des violences
Merci pour ta réponse très complète pour notre épisode en lien avec le violentomètre. Moi je trouvais ça très bien que tu aies vu les choses globalement pour nous donner une idée de toutes les caractéristiques à travers un violentomètre plus poussé, parce que c’est vrai qu’on ne va pas forcément penser à violence économique, ce n’est pas forcément dans la tête de la majorité des personnes que c’est une violence, parce que c’est vrai qu’on pense, comme tu disais, violence pour une femme battue avec des bleus.
Ça c’est sûr, c’est ce qu’on pense quand on pense violence conjugale, mais violence économique c’est quelque chose d’encore au-dessus, encore différent, qu’il faut parler, qu’il faut libérer la parole à ce sujet. Donc c’est pour ça que je suis contente que tu sois avec moi pour pouvoir parler de ton guide violentomètre, parce que ce sont des sujets qui sont vraiment importants.
Et aussi ça me faisait penser quand tu parlais de possessivité, violence psychologique, ça m’a vraiment fait penser que dans les séries ou dans les films, on glorifie, on romantise la violence. Et ça, je trouve ça un vrai problème. L’exemple qui m’est tout de suite en tête, c’est Joe Goldberg dans You.
Pour le coup lui, même dans les premières saisons, on a envie de lui pardonner quand t’étais spectateur. C’est comme ça que ça a été tourné, après ce n’est pas forcément comme ça que moi je le ressens quand je le vois, mais c’est comme ça que ça a été tourné. Après dans la dernière saison là ils ont fait une vraie amélioration pour montrer à quel point il était fou et au tout début c’était pas du tout montré comme ça, au début c’était présenté comme de l’amour ce qui faisait vivre en tout cas surtout dans la saison 1.
Mais c’est là qu’on voit carrément que c’est la société qui… je suis désolée mais qui a un petit problème à ce niveau là. Parce que non, un homme jaloux, un homme qui vous espionne, un homme qui vous traque, c’est de la violence, on est des êtres humains, on n’est pas des choses. Ça c’est extrêmement important de le rappeler.
Et un homme violent, qui serait en plus pervers, narcissique, ces personnes-là vous traitent vraiment comme une chose. Vous êtes en lieu public, vous êtes la chose à son bras, une belle femme qui va pouvoir l’accompagner. Quand on parle de pervers narcissique, en plus on parle de personnes qui sont appréciées de leur entourage, qui sont même très appréciées de leur entourage et qui ont cette double face.
Et c’est vrai qu’il y a énormément de films qui rendent romantique ces comportements-là de l’homme viril qui doit tout décider. Non. Et puis un homme peut être un homme en prenant soin de sa femme.Et la femme en prenant soin de son homme, enfin de façon, j’ai envie de dire, normale. Parce que tous les comportements violents, agressifs, de jalousie qu’on voit, ce sont des comportements qui ne sont pas normaux. Il faut vraiment remettre ça à sa place.
Ce qu’on voit à la télé, notamment dans cette série, je pensais aussi par exemple à la série 365 jours là, où ils kidnappent la fille pour qu’elle tombe amoureuse. Non, non, si jamais il y a des réalisateurs qui veulent faire ce genre de film, il faut faire un disclaimer avant. Ceci est une fiction.
Il y a même des films pornographiques que les gamins regardent quand ils sont tout petits, quand ils ont même 13 ans, où la femme est complètement soumise, etc. Ce n’est pas la réalité de la vie. Une femme est au même titre, à l’égal de l’homme, que ce soit dans une relation amicale, amoureuse, professionnelle, il n’y a personne qui est la chose de l’autre.
Il n’y a personne qui domine l’autre, en tout cas au niveau des droits, après chacun fait ce qu’il veut, au niveau des droits, au niveau des comportements, au niveau de ce que je peux faire, ce que je ne peux pas faire, parler, pas parler. Non, on est pareil et ça c’est extrêmement important de le rappeler. On est pareil, la femme n’est pas une chose, elle n’est pas manipulée, elle n’est pas utilisée par un homme, dans n’importe quel type de relation.
Ce sont des éléments très importants que tu nous donnes et ça me fait penser parce que c’est sûr que quand tu vas regarder un porno violent quand t’as 13 ans ou des films comme 365 jours et bien tu vas te construire avec ça, notamment si tu es jeune et tu vas avoir une vision biaisée, ça va te créer des comportements compliqués par la suite parce que tu vas t’imaginer une relation c’est ça alors que pas du tout.
Comment prendre du recul face à la banalisation de la violence ?
Par rapport à ça, je voulais te demander quels conseils tu pourrais donner à une personne pour qu’elle puisse prendre du recul ou même en tant que parent pour qu’ils puissent être vigilants par rapport à ce que regardent leurs enfants ou leur donner un contexte, comment aborder la chose.
Déjà moi je pense que la communication c’est fondamental pour tout d’ailleurs et donc moi je ne suis pas parent mais dans mon imaginaire en tout cas ce que j’aimerais que la société puisse devenir un jour c’est que chaque parent puisse discuter avec son enfant que ce soit avec son petit garçon, sa petite fille.
Et déjà lui expliquer une relation : comment doit-elle être ? C’est vrai que moi c’est quelque chose que je n’ai jamais eu et même à l’école on ne nous apprend pas ça. Comment est-ce qu’un enfant construit dans sa tête le schéma d’une relation déjà avec ses parents ?
Et ensuite avec les films, avec ce qu’il entend, avec ce qu’il voit. Mais il faudrait prendre son enfant, et lui dire, écoute, tu as 13 ans, tu vas commencer peut-être à avoir des petites copines, des petits copains, on va t’expliquer une relation, comment elle doit être.
Par exemple, si c’est un petit garçon, on peut lui dire, écoute, tu sais, si tu aimes une petite fille, il faut lui demander, est-ce que toi aussi tu m’aimes ? Il faut apprendre aussi le consentement à un enfant et à une fille. Est-ce qu’aujourd’hui, tu t’es amusé avec tes copains ? Est-ce que vous vous êtes touchés ou vous vous êtes fait des câlins ?
Et essaie d’aborder le sujet du consentement. Ça, c’est ultra important. Parce que si une petite fille sait ce qu’est le consentement, si un garçon va mal lui parler, va la toucher ou quoi, elle va directement savoir que ce n’est pas normal.
Il faut qu’on apprenne le consentement à nos petites filles, à nos petits garçons, et qu’on apprenne qu’une relation c’est du respect, et qu’il n’y a pas un mot au-dessus de l’autre, tout le monde peut s’énerver, mais là on parle de la violence, on ne parle pas juste d’un petit énervement, le respect, la communication. Le fait que dans une relation on est égaux.
Expliquer un peu le processus aussi d’une relation violente avec la jalousie, la possession, l’éloignement à tout point de vue. Et aussi, je suis désolée, mais un enfant va se construire par rapport à ses parents. Donc si déjà au niveau du couple il y a des soucis, l’enfant va grandir avec des soucis à ce niveau-là.
Donc, moi je conseille aux parents qui ont des soucis entre eux, D’expliquer à l’enfant, maman, papa, ils se disputent, Mais voilà, ce sont des disputes, on va dire saines. Si jamais en revanche on est dans des parents qui ont un couple où la femme est victime de violence, Comme c’est mon cas, là c’est extrêmement grave.
Et il faudrait peut-être, c’est difficile, mais que la mère victime de violence puisse expliquer. Ce que tu vois à la maison, ce n’est pas normal. Maman est victime de violence. Après, moi je dis ça mais c’est extrêmement compliqué en tant que mère de dire ça parce que ça veut dire qu’on met la faute sur le père et en général les femmes restent aussi parce qu’elles veulent pas que l’enfant grandisse avec cette image de père qui est violent, un monstre et tout.
Donc là, je m’écarte un peu mais communiquer avec son enfant, lui dire ce que c’est un couple sain, lui dire comment fonctionne une relation. Et lui dire aussi que ce qu’il doit dans les films de tout type c’est de la fiction, Et que ce n’est pas la vraie vie.
Comment ta maman a fait pour sortir des violences conjugales ?
Clairement le savoir est une forme de pouvoir par rapport au violentomètre. Et ça m’amenait à ma question, parce que tu évoques la situation de ce qui t’est passé quand t’étais plus jeune, et je voulais savoir comment ta maman l’a fait pour se sortir de cette situation.
Alors chez nous c’est très compliqué parce que on n’est pas encore totalement sorti moi c’est quelque chose que jusqu’à mes 14 ans je ne savais même pas après je ne vais pas trop rentrer dans les détails, mais pour dire en tout cas que voilà, ils ont très bien caché leur jeu.Et quand on parle d’une femme, pourquoi elle part pas, pourquoi ça ? Moi j’ai l’exemple type, d’une femme qui reste et d’une femme qui cache tout pour pas que ses enfants le voient.
Jusqu’à 14 ans, je n’ai rien vu. Par exemple, un truc qui aurait pu m’alerter, si jamais je connaissais le sujet, c’est que ma mère ne travaillait pas. Elle n’a pas interdiction de travailler. Et à mes 14 ans environ, le masque est tombé. Il n’a plus réussi à se contenir, on va dire. Et les violences, je les ai vues sous mes yeux, en tout type de violences.
J’ai vu, j’ai entendu, etc. Ma mère a eu le courage de le gérer. C’était très dur, plusieurs fois la police a été appelée, etc. Enfin vraiment, elle a eu un courage impressionnant. Et puis aussi j’imagine que nous on était, puisque j’ai un frère, on était plus grands. Donc je pense que c’était pas facile, mais elle a vu que nous on avait vu.
Donc elle s’est dit, on n’en parle pas, parce que c’est vrai qu’on n’en parlait pas trop, mais elle savait que nous on était là effectivement plusieurs fois, je me suis interposée, et moi la question ne s’est même pas posée, enfin moi j’ai directement été entre guillemets du côté de ma mère, moi j’ai toujours défendu ma mère et j’ai vite compris ce qui se tramait.
Jj’ai vite compris le géniteur que j’avais en face de moi que moi j’ai toujours connu blanc et qui s’est révélé noir, donc j’ai une personne en face de moi que je ne connaissais plus, que je n’ai jamais connu on va dire. Et donc elle a eu ce courage énorme, peut-être aussi grâce à nous, parce qu’elle a vu qu’on était de son côté, de le gérer, de recommencer à travailler, après moins 15 ans sans travailler,
Et la violence qui nous touche encore, c’est justement la violence économique à laquelle on ne parle pas assez. C’est une violence qui nous touche encore parce qu’elle ne travaillait pas, elle dépendait économiquement de lui. Une fois qu’elle l’a virée, parce que c’est ça ce qui s’est vraiment passé, et bien c’est compliqué. C’est compliqué parce qu’elle dépendait de lui économiquement.
Et donc c’est une violence qui nous touche encore aujourd’hui, parce que lui continue à nous violenter avec cette corde-là, parce que c’est la seule qu’il puisse encore tirer. Donc on parle par exemple de pensions alimentaires qui ne sont pas payées pour ces deux enfants.
Enfin enfant, je ne sais pas si je mettrai le mot dessus parce que quand on abandonne sa famille entière, je ne sais plus si on peut parler de père et de fille je pense pas à ce niveau là mais aussi c’est pour peut-être que je peux faire un clin d’œil aux enfants qui sont victimes indirectes de violences conjugales les femmes sont les premières victimes et les premières combattantes et ça j’ai une admiration incroyable pour elles mais on parle pas ce sont des enfants.
Je ne connais pas tous les cas de figure il y a peut-être des pères violents qui continuent à entretenir leurs enfants mais moi j’ai entendu un psychologue qui disait ça un homme violent ne sera jamais un bon père effectivement chez moi j’en ai la démonstration complète pourquoi parce que ces pères verts narcissiques ils n’aiment pas, ils possèdent.
Ça je le répéterai jamais assez donc comme il n’aimait pas la femme avec qui ils sont à qui ils ont sûrement fait des enfants pour pouvoir la garder. Et bien ils n’aiment pas les enfants. Ils les possèdent aussi. Ils sont contents de les emmener à l’école. Regardez mes enfants, regardez comment ils sont beaux, regardez comment ils réussissent à l’école. C’est une façon lui d’être supérieur, de se montrer comme dominant. Regardez, c’est moi qui les ai fait, ce sont les miens, c’est moi qui les ai éduqués. Une fois que ce lien est rompu, effectivement il n’y a plus rien.
Et en tout cas chez moi, parce que voilà comme je dis ce n’est pas une science exacte, ce n’est pas chez tout le monde pareil, chez moi une fois qu’il a vu qu’il avait plus pouvoir sur nous, il est parti. Et dans ce cas là il n’y a pas d’amour. Donc c’est pour ça que là aussi je me permets de parler de ma situation parce que la violence économique est ultra présente. On se bat encore au niveau des avocats pour qu’il paye cette pension.
On parle de deux ans et demi de pension, même un centime, on ne les a pas vus. Et c’est important de se battre parce qu’il ne faut pas leur donner raison. Ils se sentaient déjà dominants dans ce foyer, donc imaginez en plus s’ils échappent à la justice.
Comment aider une personne victime de violences conjugales ?
Merci beaucoup de nous avoir partagé ton témoignage. Quelle résilience de la part de ta maman, quel courage. Et puis même pour vous, vous êtes tous les deux, toi et ton frère, très courageux d’avoir affronté ensemble cette situation, donc vraiment merci. C’est vrai que j’imagine même pas à quel point ça devait être difficile.
Et en tout cas je trouve ça beau, on va dire que tu viennes témoigner pour aider d’autres personnes à ton tour. Donc je trouve ça un bel objectif en tout cas de vouloir aider d’autres personnes à s’en sortir.
Ah oui, mais c’est pour ça, moi de toute façon à travers ce guide violentomètre, j’ai vraiment envie d’aider.
J’ai reçu déjà des petits messages sur Instagram parce que j’essaie de le publier un peu avec le peu de gens qui me suivent. Et j’ai eu des femmes qui me disaient, j’ai lu, je l’ai imprimé, comme ça je peux l’avoir. C’est vrai qu’il y a même des femmes qui m’ont dit, je sens que mon amie est victime de violence, comment je peux faire pour l’aider ? Donc j’ai conseillé et c’est vrai que, et puis je rappelle que ce guide violentomètre évidemment est totalement gratuit, il y a un lien qu’on peut télécharger gratuitement. Et donc, aider avec mon violentomètre plus poussé.
On ne peut pas encore aujourd’hui avoir des femmes qui meurent par des hommes. Parce que des hommes, ils veulent, je ne sais pas moi, être dominants, dominer tout le monde. Non, non, non. Impossible. Pour moi c’est impossible. Et ce guide violentomètre, le fait de cocher les cases, de voir ce qui peut nous arriver, c’est une façon de prendre le dessus, d’ouvrir les yeux et se dire oh Purée, je suis en train de vivre ça moi ? Mais je m’en vais !
Avec l’écriture de ma ressource en lien avec le violentomètre, c’est de prendre le pouvoir là-dessus. Lui, il veut avoir le pouvoir, il veut vous dominer, il veut vous marcher dessus, il veut vous écraser. Attendez, je vais lire un peu les comportements. Oh purée, je vis ça, je vis ça, je vis ça. Non mais c’est ça ce qui m’attend ? Ah non non mais je pars. Vraiment, je pars. Reprends le dessus. Pour que petit à petit, toutes les femmes puissent connaître un peu ce cycle décrit dans mon violentomètre plus poussé. Et qu’on ne laisse plus aucun homme pervers, narcissique, violent nous avoir, quoi !
C’est une très très belle démarche que tu as mise au point avec ton guide violentomètre et ça m’amène à ma question, parce que tu as commencé à l’évoquer, par exemple, imaginons que quelqu’un qui nous écoute a une personne de son entourage qui est victime de violence, comment on fait pour l’aider ? Bien sûr, il y a ton guide violentomètre qui est à disposition, mais si tu as des clés pour aller plus loin ou pour nous dire encore un peu plus le contenu qui est présent dans ton guide violentomètre.
Encore une fois, c’est quelque chose de compliqué. Ces gens-là sont tellement forts que, comme j’ai déjà dit, il y a des femmes qui ne s’en rendent pas compte, qui sont dans le déni.
Donc déjà, il faut partir du principe, inévitablement, que faire ouvrir les yeux à une femme qui est victime de violence, c’est très dur. Elle est dans le déni, elle a honte aussi. Être consciente qu’on est victime de violence, c’est déjà l’accepter.
Et vouloir s’en sortir, c’est en parler. Et possiblement avoir un peu honte, mais il n’y a aucune honte à avoir. Donc, si vous avez des suspicions, on peut faire parler notre amie. Parce que j’ai remarqué que si jamais nous, personnes extérieures, on va dire à la personne, on était victime de violence, tout ça, elle ne va pas s’en rendre compte.
Pour moi, si on veut vraiment aider la personne, il faut qu’elle se rende compte d’elle-même. Donc il faut essayer de mettre des trucs en place pour qu’elle se rende compte. Moi ce que j’avais un peu conseillé, c’est vrai, c’est par exemple, si vous êtes à un repas de famille, on peut un peu filmer. Filmer les interactions entre votre ami et son compagnon. Pour qu’elle-même visualise les images et se dise, mais c’est moi qui subis ça ? On peut peut-être intercepter une insulte, intercepter un petit geste. Et d’un point de vue extérieur, qu’elle se voit elle-même subir la violence, ça peut faire un électrochoc.
Ou alors dire à son ami, on était dehors, tout ça, mais j’ai entendu qu’il t’a dit ça. Et puis après, il t’a dit quoi ? Et qu’elle dise, après il m’a insulté de ça. Et après ? Non, après être rentré à la maison, on a eu une petite tarte. Peut-être qu’elles s’entendent dire ces mots-là, ça peut lui faire un électrochoc.
Peut-être aussi que mon guide violentomètre peut aider quand elle coche la case, à moins qu’elle ne veuille pas cocher la case, mais elle sait qu’elle l’a vécue ce truc-là. Elle sait qu’elle l’a vécue. Écouter des femmes qui ont été victimes de violence, dans sa tête ça peut faire écho, je suis en train de vivre la même chose, c’est la même fin qu’elle qui m’attend.
Donc en gros c’est ça, faire en sorte qu’elle-même s’en rende compte et qu’elle-même ait un électrochoc. Et je pense que quelque chose de puissant justement c’est qu’elle entend des témoignages de femmes qui ont survécu à un homme violent.
Je pense que c’est fondamental de prendre conscience du violentomètre. Aussi bien pour les femmes qui sont actuellement victimes pour qu’elles s’en sortent, que pour les femmes en général, qu’elles sachent ce que c’est. Parce que quoi du mieux qu’écouter une femme victime pour savoir effectivement de l’intérieur à quoi ça ressemble.
Prendre soin de sa santé mentale quand on est victime de violences
Vraiment merci beaucoup pour tes conseils en lien avec ton document en lien avec le violentomètre, ils sont vraiment pertinents et c’est vrai que de ce que j’entends par rapport à ce que tu nous dis, une femme qui est victime de violence, elle peut être soit dans le déni soit pour elle, vu que c’est son quotidien, sa normalité, elle se dit c’est pareil dans tous les foyers, c’est normal vu qu’il la manipule, il lui retourne le cerveau et elle est complètement démunie puisque la violence psychologique,
La santé mentale, c’est hyper compliqué et ça m’amène à cette question : si on est une femme qui est victime de violences, qui commence à s’en sortir, mais comment on fait pour prendre soin de sa santé mentale qui a tellement été matraquée, écrasée par cet être dominateur ?
Une fois que la femme a réussi à se sortir de cette relation, déjà je pense qu’il faut qu’elle se replonge dans tout ce qui est arrivé durant ces mois, ces années. Et peut-être qu’elle met sur papier tous les comportements qu’elle a laissé faire.
Il m’a touché. Il a fait si. Il a fait ça sur moi. Il m’a parlé comme si. Il m’a parlé comme ça. Le mettre par écrit et qu’elle visualise que s’il m’est arrivé ça, c’est de un parce que je me suis fait avoir par un homme. Il faut le dire. Parce qu il faut aussi déculpabiliser la femme.
Si tu as vécu ce type de relation ce n’est pas de ta faute, c’est sa faute déjà, ça c’est ultra important ce n’est pas parce que tu l’as vécu une fois que tu vas le revivre ensuite aussi et puis dire qu’il m’a fait ça par sa faute et moi maintenant là je regarde tout ça et qu’on signe en bas de la page plus jamais on le fera ça à nouveau
Et après, il faut être accompagné aussi par quelqu’un, ultra important, en parler pour que ça sorte, s’il faut pleurer, qu’on pleure, il faut que ça sorte. Donc se faire suivre par quelqu’un, ça c’est, je pense que c’est inévitable. Et ensuite, toute façon, moi je pense qu’une femme qui ressort d’une, je le vois avec ma mère, une femme qui ressort de ce genre de relations, elle est inévitablement plus forte.
Elle a un moment de difficulté, mais une fois qu’elle en est sortie c’est une survivante. Et si vous parlez, je parle aux gens en général, si vous parlez à des personnes qui ont survécu à un accident de voiture, un accident de train,
Une fois que cette partie de tristesse, de culpabilité, de honte est dépassée, ils sont inévitablement plus forts, ils ont inévitablement plus envie de profiter de la vie. Et une femme qui sort d’une relation violente, c’est une femme survivante, ça il faut bien le dire, parce que toutes les femmes qui n’en sortent pas, elles finissent mortes.
Il y a une femme tous les trois jours qui meurt. Pourquoi il n’y en a pas plus ? Parce que les autres réussissent à partir. Si les autres ne partaient pas, il y en aurait je pense même une chaque jour. Donc une femme qui réussit à sortir de cette relation violente, elle est survivante. Et il y a ce sentiment du survivant. Où on est fort. Maintenant il m’est arrivé, je suis partie de ça, j’ai échappé à la mort.
Maintenant on est fort. Donc déjà, je le vois avec ma mère, elle est incroyablement forte. Ma mère, à l’âge qu’elle a maintenant, est beaucoup plus belle, beaucoup plus rayonnante qu’il y a 15 ans. Quand on compare les photos, l’avant, on dirait que c’est l’après, et l’après on dirait que c’est l’avant. Il y a vraiment quelque chose d’incroyable. Une sorte de renaissance. Quelqu’un qui échappe à la mort, il dit mais, c’est ma vie, elle commence maintenant. On sait ce que c’est frôler la mort.
Et ce n’est pas parce que vous quittez une relation juste, entre énormes guillemets, parce que l’homme vous a juste traité de pute, vous sortez direct. Vous êtes survivante. Parce que si vous étiez restée, vous seriez peut-être morte. Donc c’est ça aussi très important à dire. Ce n’est pas parce que vous le quittez dès la première case que vous cochez sur mon violentomètre 2.0 que vous n’êtes pas survivante.
Et moi j’aimerais que toutes les femmes puissent partir à la première case qu’elles cochent sur cette version plus poussée du violentomètre . Parce que si elles partent à la dixième case cochée de mon violentomètre plus poussé, il va y avoir beaucoup plus de traumatisme. Mais ça ne change pas la finalité que vous êtes survivante.
Donc pour se reconstruire psychologiquement, il faut faire un gros travail aussi pour reconnaître sa valeur. Parce qu’il vous a tellement écrasé qu’on a l’impression de ne plus rien.
Quand on vous dit que vous êtes incapable, que vous ne servez à rien, que sans lui vous n’êtes rien, que vous n’avez pas travaillé, pour celles à qui l’empêchent de travailler, vous savez quand vous n’avez pas travaillé, que vous ne vous rendez pas utile, vous avez vraiment l’impression de ne servir à rien.
Et donc il y a un gros travail pour ça pour dire, moi je suis moi, je suis forte, je suis belle, je suis comme ça, je suis comme ci, et vraiment reprendre de sa valeur. Que le psychologue, le thérapeute etc réussissent à vous mettre devant le miroir, que vous puissiez vous regarder et vous dire : c’est moi et l’homme là qui était au-dessus de moi là, qui m’empêchait de sortir la tête de l’eau, il est parti. Maintenant j’ai pleinement la tête hors de l’eau pour respirer toute seule.
Et c’est là aussi que ce sentiment de la survivante arrive et qu’elle puisse complètement se reconstruire. Complètement, c’est un très grand mot parce qu’attention, on n’est jamais complètement reconstruite de ça et en tout cas qu’elle puisse reconnaître leur valeur, que lui a écrasé pendant de nombreuses semaines, mois, années.
Les femmes victimes de violences ne sont pas faibles mais puissantes
J’ai beaucoup apprécié ton discours, parce que je trouve vraiment beau, très positif, c’est vrai que, enfin ce que tu dis, que peu importe, que tu coches la première case de ton guide violentomètre, enfin même c’est mieux de cocher la première case de ton travail sur le violentomètre pour pouvoir s’en sortir, c’est une vraie transformation, une vraie renaissance, et qu’il faut prendre ce qui est en nous, pas comme une faiblesse, mais comme tu dis, une puissance, parce que c’est une vraie épreuve qui a été dépassé et le travail est incroyable.
C’est hyper important de remettre ça en exergue et de montrer qu’on peut s’en sortir, que ça peut être difficile mais c’est possible et qu’il y a des femmes qui l’ont fait et qui peuvent nous inspirer à faire de même.
Ah oui et puis si je peux rajouter, on a le sentiment une femme victime de violence c’est une femme faible mais je pense que les gens ne se rendent pas compte de la force qu’il faut pour subir cette violence. On a vu les types de violences, n’importe laquelle. Pour la subir, il faut une force incroyable, parce que je l’ai vue, je sais ce que c’est, et je sais à quel point la violence peut être violente. Elle est incroyablement violente, donc je tiens vraiment à souligner ça.
Et que les femmes sachent que si elles sont victimes de ça, ce n’est pas de leur faute, et elles sont extrêmement fortes pour réussir à les subir, ce n’est pas joli, mais il faut être incroyablement forte pour subir ce genre de violence. Et c’est pour ça qu’il faut partir dès la première case qu’on coche sur mon travail sur le violentomètre. Parce que si on veut lui, il y a ça aussi. On a le sentiment de dire qu’il va arrêter. Ou alors, grâce à moi, il va arrêter.
C’est un peu ce syndrome de l’infirmière que les femmes, on est déjà sensibles par rapport aux hommes, on est un peu plus sensibles, on a plus ce côté-là. Grâce à moi, il va changer. Grâce à moi, il sera plus violent, tout ça. Ça, ce sont des comportements que c’est bien gentil, mais on ne veut plus ça. Il ne changera pas. Ça aussi, c’est un point que je voulais rappeler.
Si une fois il a eu un comportement violent envers vous. Il ne changera pas, en tout cas pas avec vous et il faut partir tout de suite pour éviter de subir le reste et partir après. Ça ne sert à rien de vouloir se faire du mal. On dirait, non je partirai à la troisième, quatrième case de mon guide sur le violentomètre, non mais je partirai à la prochaine finalement, non il est gentil, je partirai à la prochaine case de ce violentomètre plus complet. On se fait du mal dans ce laps de temps. Partez à la première case de mon document violentomètre et je vous jure votre processus de reconstruction sera beaucoup plus simple.
Quels sont les signes d’une relation normale ?
Merci beaucoup pour ce rappel sur le violentomètre et ça amène à penser la question mais c’est quoi les green flags d’une relation qui se passe bien où tout est vert et tout se passe bien comme il faut ?
Alors, encore une fois, on n’est pas dans une science exacte. Mais une relation où ça se passe bien, déjà, c’est la communication. On parle. C’est… mais tu sais, moi, hier soir, j’étais un peu énervée. J’aimerais qu’on en parle. On discute. Après, évidemment, on n’accepte pas les insultes. Donc une relation où il n’y a pas d’insultes.
On est des êtres humains, on peut s’énerver. Mais je répète bien il y a énervé et énervé. On peut être énervé, sentir une petite colère qui monte, là on préfère s’isoler. Si on a un partenaire qui dit non mais là t’es en train de m’énerver je vais aller m’isoler dans ma chambre là et je reviens on en parle après ça c’est très bien comme comportement.
On fait attention aux comportements qui sont trop type chevalier, chercher des fleurs tous les jours, ça peut être une étape de séduction d’un pervers narcissique. Si c’est un peu trop parfait, méfiez-vous, c’est bizarre à dire, mais si vraiment l’homme est trop parfait, il répond exactement ce que vous voulez, exactement ce que vous attendez, faites attention et regardez les cases du violentomètre et de mon guide violentomètre.
Une relation où vous vous sentez bien, j’ai envie de dire. Si jamais vous êtes avec quelqu’un, et vraiment au fond de vous, vous vous sentez bien, vous avez ce sentiment d’être apaisé, d’être tranquille. Et bien c’est que vous êtes dans une relation saine. Parce qu’une femme dans une relation violente, elle n’est pas tranquille, elle n’est pas bien. Si vous avez mal physiquement quelque part, vous n’êtes pas dans une relation saine.
Si vous avez mal par rapport à une insulte, par rapport au fait qu’il vous dit des choses que vous n’aimez pas trop, vous n’êtes pas dans une relation saine. Une relation saine c’est s’aimer, discuter, se respecter. Après ce sont des termes un peu vagues. C’est pour ça que j’aime bien dire, fermez les yeux, pensez à votre relation et qu’est-ce que vous ressentez ?
Est-ce que vous ressentez un bien-être ? Je suis avec quelqu’un et quand je pense à la personne, je souris, je suis bien, vous êtes dans une relation saine. Si jamais vous pensez à votre relation et que vous avez des images de : il vous insulte, il vous parle un peu mal, vous ne vous sentez pas particulièrement bien, je pense que personne aimerait se sentir agressé d’une telle façon.
Et aussi, quelque chose qui me vient en tête, pensez à votre liberté. Est-ce que vous êtes libre avec cette personne ? Je parle libre dans le sens libre de vos mouvements, libre de votre façon de penser, libre de vos comportements, libre de vous habiller. Si jamais vous êtes dans une relation et que vous dites à votre compagnon, je sors avec mes copines ce soir. Il vous dit fais attention, rentre bien, je t’attends quand tu rentres. Si vous sortez avec des talons, il vous dit t’es belle, fais attention, il n’y a pas de souci, ce n’est pas quelque chose qui nous fait mal.
En revanche, s’il vous dit, tu vas vraiment sortir avec des talons ? Mais tu vas où ? Mais c’est pour qui ? Alors on est dans quelque chose de violent. Si vous vous êtes libres d’aller au travail comme vous voulez, de prendre le moyen de transport que vous voulez, de parler à qui vous voulez, donc si vous avez toujours votre liberté, vous êtes dans une relation saine.
Une dernière chose que je dis à mes copines, c’est quand vous êtes seul, vous avez un niveau de bonheur élevé. Si vous êtes avec cette personne et que votre niveau de bonheur baisse, c’est qu’on n’est pas dans une relation saine. Si votre niveau de bonheur est égal, votre relation ne sert pas à grand-chose.
La relation saine, c’est quand notre bonheur avec la personne, il est au moins un tout petit peu au dessus. Donc une relation saine, c’est ça. Avoir un niveau de bonheur qui augmente. Tout simplement. À l’intérieur de soi, se sentir bien. Pour moi, c’est ça.
Merci beaucoup pour tous ces conseils qui sont plein de bon sens et très pertinents, concrets et utiles que j’invite les personnes qui nous écoutent à pouvoir mesurer en nous écoutant. Est-ce que ma relation est saine ou pas ? Parce que c’est important d’avoir cette introspection personnelle, peu importe à quel moment de notre vie on est, c’est essentiel.
De toute façon, si jamais vous téléchargez le guide violentomètre, si vous cochez une case sur mon guide violentomètre, c’est votre relation et pas celle-là. Si jamais ça peut être plus concret pour quelqu’un.
Le mot de la fin sur ton guide “violentomètre”
J’aimerais bien continuer encore longtemps à discuter avec toi, mais c’est vrai qu’il nous reste un peu moins de dix minutes. Donc, comment est-ce que je te propose ? C’est faire le mot de la fin et après te poser mes dernières questions pour clôturer cet épisode de podcast sur ton guide violentomètre.
Merci beaucoup de m’avoir invitée pour parler du violentomètre. Et c’est vrai que c’est un sujet dont on ne parle pas assez. Évidemment on a tous nos combats. Par exemple, le mien est lié à mon histoire personnelle. Des fois je me demande si jamais je n’avais pas vécu ça, est-ce que j’aurais le même combat ?
Je ne sais pas, je ne peux pas savoir. Chacun lit ses combats à son histoire personnelle, mais ce sujet-là spécifiquement, je pense que c’est un combat qui devrait être universel, qui devrait toucher toutes les femmes et aussi tous les hommes, parce qu’on ne dit pas assez, mais nous on veut sauver des femmes victimes de violences conjugales.
Si jamais on éduquait nos hommes, comme ça on n’a plus à sauver de femmes, ça serait cool aussi. Donc c’est un sujet universel pour aider ces femmes-là. Mais je pense qu’il faudrait aussi commencer un travail pour éduquer ces hommes qui dès le jeune âge voient des comportements violents qui ne sont pas normaux et pouvoir les éduquer dès tout petits. Apprendre à nos petits garçons qu’est-ce qu’une relation. On ne parle pas de relations saines.
Parce que si on parle de relations saines, ça veut dire qu’il y a une relation toxique qui existe. On emmène dans la relation. Qu’est-ce qu’une relation ? On explique le respect, le consentement, on explique l’amour. Et on explique aussi quelque chose qu’on n’a pas parlé. On explique que si jamais la femme décide de te quitter, c’est normal. Il n’y a pas de revanche à avoir. Expliquer la rupture aussi je pense que c’est super important si une femme aujourd’hui elle veut divorcer elle veut quitter la personne avec qui elle est c’est son droit.
Parce que c’est vrai que les hommes, ils passent souvent à l’acte, quand la femme le quitte et quand ils ont plus l’emprise sur la femme, Donc “si t’es pas à moi, t’as personne d’autre”. Et ils passent à l’acte. Donc expliquez que vous avez le droit de quitter la femme, et la femme a aussi le droit de vous quitter, avec enfants, sans enfants, mariés, non mariés, Et ça c’est très important d’expliquer ça aux petits enfants aussi.
Je te rejoins totalement sur cette conclusion que l’éducation c’est ça qui change le monde, c’est ça qui change les sociétés, donc plus on commence tôt, mieux ce sera et plus les impacts par la suite seront positifs pour toute la société, donc ça va être un cercle vertueux qui va se répéter et se répéter.
Ça devrait être une préoccupation fondamentale de tout le monde, puisque la relation c’est la base d’une personne, c’est comme ça qu’elle va éduquer ses enfants, tout ça. Donc la relation normale, j’aime pas dire saine, la relation normale doit être la préoccupation de tout le monde et les parents doivent éduquer leurs enfants par rapport à ça, et peut-être même à l’école.
Qui sont tes rôles modèles ?
Mon modèle, moi c’est ma mère. C’est elle qui m’inspire encore plus sur ce sujet des violences conjugales et du violentomètre. Donc si je dois parler de modèle, personne ne le connaît. Mais pour moi c’est ma mère.
Quelles ressources recommanderais-tu ?
Au niveau des ressources, écoutez des témoignages. Vraiment. On peut regarder tous les chiffres qu’on veut. On peut lire tous les livres qu’on veut.
Mais quand on s’assoit dans son ordinateur et qu’on ferme les yeux, qu’on écoute une femme qui a réussi à s’échapper à ce genre de violences, pour moi c’est la meilleure ressource, la meilleure source d’éducation qu’on peut avoir. L’émission qu’on peut retrouver sur Youtube, ça commence aujourd’hui, elle invite des femmes victimes de violences conjugales et je trouve que l’émission est extrêmement bien faite.
Donc si jamais il y a une personne ici qui veut s’informer par rapport à ça, allez voir sur YouTube, trouvez une vidéo, il y en a plusieurs des vidéos où des femmes victimes de violences parlent et écoutez-les. C’est vraiment pour moi la meilleure façon de s’informer par rapport à ça.
Que signifie le terme féminisme pour toi ?
L’égalité des droits entre les hommes et les femmes. En tout cas moi, je ne demande rien de plus. Une égalité. On est égaux, on est pareils. Il n’y en a pas un qui domine l’autre. C’est juste ça pour moi.
Merci de tes partages dans notre épisode sur ton guide sur le violentomètre, de ta ressource, ça commence aujourd’hui. Je comprends que ta maman soit ton rôle modèle.
Qui aimerais-tu voir au micro de Matrimoine Féministe ?
Et bien j’ai pensé à cette question, et bon d’office j’ai dit une femme victime de violence qui a réussi à s’en sortir mais j’ai envie de dire aussi pourquoi pas comme moi un enfant qui est victime indirecte de ce genre de violence et qui pourrait parler plus en détail de ce qu’il a vu, qu’il a entendu et surtout comment il a réussi à se construire ensuite grâce à ça.
Je pourrais parler longuement aussi, parce qu’évidemment, ce n’était pas le sujet d’aujourd’hui, c’était celui du violentomètre, mais c’est extrêmement dur, extrêmement dur. Donc pourquoi pas avoir un enfant victime indirecte, malheureusement, qui pourrait parler de ça, parce qu’on en a pas beaucoup.
C’est vrai que ce serait l’objet d’un deuxième épisode au micro de Matrimoine Féministe, carrément. Mais en tout cas, d’ailleurs par rapport à ce que tu me disais, j’ai eu un épisode avec une femme qui s’appelle Greta Guzman, qui a été victime de violence conjugale et qui s’en est sortie. Donc j’invite les personnes, en complément de cet épisode sur ton guide violentomètre, à écouter celui de Greta.
Merci beaucoup en tout cas Eva pour ton temps et d’avoir partagé toute cette valeur ajoutée avec nous par rapport au violentomètre.
Merci à toi pour l’invitation. Je suis contente d’avoir pu parler de mon guide violentomètre.
C’était un grand plaisir de t’avoir au micro de Matrimoine Feministe et j’espère que cet épisode sur son guide violentomètre inspirera toutes les personnes qui nous écouteront actuellement. Sur ce je vous dis au revoir à tout le monde et je vous souhaite une bonne journée, soirée, où que vous soyez. Ciao !
Au revoir et merci d’avoir écouté cet épisode sur le guide violentomètre jusqu’au bout !
Informations complémentaires
Les sources de l’épisode le guide violentomètre
Ses rôles modèles et ressources mises en avant
- Sa mère
- Écouter des témoignages victimes de violences conjugales
Retrouvez Eva Fiorini
On peut rappeler pour notre épisode sur le guide violentomètre
- Numéro gratuit et anonyme: 3919 (rappelé aussi dans son guide violentomètre)
- Aide d’urgence mis en place par l’état avec aide financière pour fuir