Bonjour, bonsoir à toutes les personnes qui écoutent ce podcast hebdomadaire. Je suis en compagnie de Stéphanie Daniel, avec qui nous allons parler de sa e-librairie, Les Livres qui sèment. Je te suivais d’ailleurs sur Instagram depuis un certain temps, et j’ai eu le plaisir de te rencontrer en personne lors de la Fresque de l’Équité. Je suis ravie de pouvoir discuter avec toi aujourd’hui. Stéphanie, je te laisse te présenter de la manière dont tu le souhaites. Cela me fait penser à l’importance des plateformes comme une librairie jeunesse féministe pour favoriser ce type d’échanges.
Déjà bonjour Esthel, et bonjour à toutes les auditrices et tous les auditeurs. Merci pour l’invitation. Moi, je m’appelle Stéphanie Daniel, et je suis la fondatrice de la librairie Les Livres qui sèment, une librairie jeunesse engagée pour la diversité, l’égalité et l’écologie. J’habite à Paris, dans le dixième arrondissement, avec ma famille : mon conjoint et mes deux enfants. Mon parcours professionnel initial était plutôt orienté vers l’international, où j’étais responsable de production et de l’administration des ventes. Cette expérience m’a finalement menée à envisager un modèle plus engagé, comme celui que l’on retrouve souvent dans une librairie jeunesse féministe.
Suite à la naissance de mes deux filles et à une profonde quête de sens, j’ai décidé, en 2019, de me réorienter vers l’économie sociale et solidaire. J’ai suivi une formation en RSE (responsabilité sociétale des entreprises), car je souhaitais m’engager activement dans la transition écologique et sociale. Cette décision reflète aussi l’importance des structures éducatives, comme une librairie jeunesse féministe, pour accompagner ces changements.
En 2019, lors de ma formation en RSE, j’ai pris conscience que ces métiers reposent souvent sur la communication pour convaincre et éclairer les choix. J’ai alors réalisé qu’au lieu de convaincre, il fallait plutôt éduquer. C’est à ce moment-là que j’ai compris que l’éducation est essentielle pour construire, avec les générations futures, le monde durable et juste dont nous rêvons. Cette réflexion m’a inspirée à explorer des initiatives comme une librairie jeunesse féministe pour transmettre ces valeurs.
Plutôt que de m’orienter vers l’ARSE, j’ai choisi une voie professionnelle davantage tournée vers l’action de terrain, en contact direct avec les enfants et les familles. Le déclic s’est produit en 2020, lorsque nous étions confinés dans notre petit appartement parisien avec mes deux filles, alors âgées de trois et cinq ans. Ce contexte m’a fait réfléchir à des approches alternatives, notamment celles que l’on retrouve dans une librairie jeunesse féministe, qui place l’humain et l’engagement au cœur de sa mission.
Pendant le confinement, j’étais confrontée à la nécessité de divertir mes enfants avec les livres dont nous disposions. C’est à ce moment-là que j’ai eu une révélation : les ouvrages qui nous entouraient étaient fortement stéréotypés. J’ai pris conscience que les personnages principaux au cœur des intrigues étaient toujours les mêmes. En observant notre bibliothèque, j’ai réalisé que ces personnages étaient majoritairement masculins, blancs, cisgenres, minces, valides, hétérosexuels, et issus de familles « traditionnelles ». Pourtant, notre monde est incroyablement diversifié en termes de genre, de culture, de morphologie, d’orientation sexuelle et de schémas familiaux.
Les livres qui nous entourent ne représentent pas la diversité de notre quartier et véhiculent de nombreux stéréotypes. Moi qui m’efforce d’élever mes filles avec des principes d’égalité, je réalise que ce qui occupe nos journées — les livres — véhicule souvent des messages qui prônent l’inverse. Cela a été un premier déclic pour moi, renforçant l’importance de repenser les ressources éducatives, comme celles que l’on peut trouver dans une librairie jeunesse féministe.
Le deuxième déclic a été une série de belles découvertes durant le confinement. Deux livres m’ont particulièrement marquée et que je souhaite partager. Mes filles, âgées de trois et cinq ans, ont découvert la collection Petite et Grande, éditée chez Keeman, avec le portrait de Rosa Parks. Cela a été une révélation : je pouvais leur présenter des rôles modèles féminins, comme cette femme noire qui, par son courage, a mobilisé les foules pour la justice sociale. Ces ouvrages, que l’on pourrait aisément imaginer au cœur d’une librairie jeunesse féministe, sont des trésors éducatifs.
Un autre livre marquant s’intitule Amour, beauté et crotte de nez de Jean-François Morisseau. Pour la première fois, j’ai découvert une histoire où deux femmes tombent amoureuses. Je me souviens avoir marqué une pause pour dire à mes filles : « Vous avez le droit d’aimer qui vous voulez. » Cette scène m’a fait réaliser à quel point les livres peuvent être des outils puissants pour transmettre des messages, qu’ils soient négatifs ou positifs. Ce type de réflexion est au cœur de la philosophie d’une librairie jeunesse féministe.
C’est durant ce confinement, avec ces révélations successives, que l’idée de créer une librairie engagée, Les Livres qui sèment, a commencé à mûrir. Cette librairie est devenue pour moi une réponse à cette quête de sens et un moyen d’offrir un outil éducatif respectueux de la diversité, comme le ferait toute librairie jeunesse féministe soucieuse d’inspirer les générations futures.
La sensibilisation des enfants est essentielle
Merci beaucoup pour cette présentation. Je la trouve très belle. Ce que je comprends dans tout ce que tu dis, c’est que tu cherches à avoir un impact à ton échelle dans la société. C’est essentiel : nous avons besoin de personnes engagées pour faire bouger les lignes et transformer les mentalités. D’après ce que je comprends également, tu cherches à planter des graines d’éveil féministe, écologique, et bien plus encore. Une librairie jeunesse féministe, comme celle que tu as créée, est un outil formidable pour initier ces réflexions.
Il est particulièrement important de sensibiliser les enfants dès leur plus jeune âge. Plus ils sont exposés à la diversité du monde, plus ils développeront une ouverture d’esprit incroyable. À l’inverse, s’ils ne reçoivent pas cette éducation dès leur plus jeune âge, il devient beaucoup plus difficile d’acquérir cette perspective plus tard. Le pouvoir des mots, des sens et des représentations est donc essentiel dès l’enfance. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle essentiel dans cette transmission.
Bravo pour ce que tu fais. Bravo d’avoir mené ce projet et de montrer à tes filles, mais aussi aux autres enfants — filles, garçons, ou ceux remettant en question leur identité — qu’ils peuvent grandir dans un monde où tout leur est possible. Une librairie jeunesse féministe est une réponse concrète pour aider ces enfants à se construire dans un environnement ouvert et respectueux.
Tout à fait, et dès le plus jeune âge, c’est fondamental. Je me suis dit qu’il ne fallait pas attendre l’âge de 6 ou 7 ans, souvent considéré comme l’âge de raison, pour commencer à sensibiliser. Les chercheurs et sociologues en littérature jeunesse décrivent souvent la littérature jeunesse comme un espace de socialisation pour les enfants. Dans cette optique, une librairie jeunesse féministe peut devenir un espace-clé pour leur développement.
Pendant le confinement, cela a été particulièrement vrai. Privées de contact avec l’extérieur, mes filles s’appuyaient sur les livres comme des outils pour construire leur identité et leur socialisation. Une librairie jeunesse féministe offre précisément ces ressources adaptées aux besoins des enfants dans ces moments nécessaires.
Enfin, en lien avec mon travail sur la fresque, je constate l’importance des représentations culturelles et médiatiques dans l’éducation des enfants. Les études montrent que les stéréotypes sont intégrés dès l’âge de 4 ans. Une librairie jeunesse féministe permet de proposer des alternatives riches et variées à ces schémas limitants.
La difficulté aujourd’hui réside dans la recherche d’albums jeunesse avec des représentations diversifiées et non stéréotypées dès la petite enfance. Si ces représentations deviennent plus faciles à trouver avec l’âge, il reste un réel défi de dénicher des albums positifs et justes dès la naissance. C’est là que l’engagement d’une librairie jeunesse féministe prend tout son sens, en proposant ces ouvrages dès les premiers mois de vie.
Comment fais-tu pour trouver des albums engagés ?
Par rapport à ce que tu viens de dire, je vais rebondir, car tu mentionnes la difficulté de trouver des albums. Cela m’amène à te poser deux questions : comment fais-tu pour identifier des albums engagés qui reflètent tes valeurs et que tu présentes dans ta e-librairie ? Et, autre point que je me demande (et que d’autres se posent peut-être aussi), pourquoi avoir choisi une e-librairie plutôt qu’une librairie physique ? Ces questions, me semble-t-il, touchent directement aux défis et opportunités rencontrés par toute librairie jeunesse féministe.
Alors, ce qu’il est important de savoir, c’est que je suis arrivée dans le monde de la littérature jeunesse en tant que parent, et non en tant que professionnelle du livre ou de la petite enfance. Mon point de départ était un constat personnel : ma bibliothèque ne reflétait pas la diversité de mon quartier. Avant de m’engager dans un projet comme celui de créer une librairie, j’ai traversé différentes étapes, dont celle de créer un compte Instagram pour savoir si d’autres familles partageaient cette préoccupation. Cette démarche est souvent la première impulsion pour qu’une librairie jeunesse féministe puisse voir le jour.
Mes premiers ouvrages, je les ai aussi trouvés en explorant Instagram. Notamment, j’ai découvert de magnifiques livres à travers des campagnes de crowdfunding. Ces ouvrages étaient souvent refusés par les grandes maisons d’édition, et les familles concernées lançaient elles-mêmes des campagnes pour les financer. Ces initiatives rencontrent souvent un large succès, et elles incarnent parfaitement l’esprit d’une librairie jeunesse féministe, qui soutient des voix indépendantes et marginalisées.
Par exemple, je peux te citer la maison d’édition On ne compte pas pour du beurre. Initialement une association, elle a été fondée par une famille lesboparentale qui ne trouvait aucun livre représentant leur réalité pour leurs enfants. Elles ont donc décidé de créer leurs propres histoires, un projet qui résonne profondément avec les valeurs portées par une librairie jeunesse féministe.
Je pense aussi à la collection Les petits illustrés d’intimité, créée pour nommer et représenter les parties intimes des petites filles. Une sage-femme, face aux questions de ses filles, s’est rendu compte qu’elle n’avait aucun ouvrage adapté à leur présenter. Leur campagne de financement participatif a rencontré un énorme succès, et ces ouvrages auraient toute leur place dans une librairie jeunesse féministe soucieuse d’accompagner une éducation saine et inclusive.
Enfin, je citerais le travail remarquable de l’association Diveka, qui milite pour une plus grande diversité dans la littérature jeunesse. Leur ouvrage sur les femmes noires francophones répond à un manque criant. Bien qu’il y ait de plus en plus d’ouvrages sur les rôles modèles féminins, Diveka a constaté l’absence de figures noires francophones dans ce domaine. Elles ont donc créé un guide dédié, une initiative qui s’inscrit parfaitement dans l’esprit militant d’une librairie jeunesse féministe.
Pourquoi une librairie jeunesse féministe en ligne ?
Et donc, mon idée était vraiment de chercher ces ouvrages qui répondent à un besoin et de les regrouper sur une plateforme commune pour qu’un maximum de personnes puissent en bénéficier. Il s’agissait de proposer à la fois des livres « miroirs » et « fenêtres » : des livres où les enfants et les familles peuvent se reconnaître, mais aussi des ouvrages permettant aux enfants de découvrir les vécus d’autrui. Ce concept de miroir et de fenêtre est essentiel pour développer l’empathie chez les enfants. Pour les familles qui ne sont pas représentées, être visible dans les livres, c’est aussi exister et se sentir légitime dans la société. Une librairie jeunesse féministe se doit de porter cette double mission de représentation et d’ouverture.
Pour répondre à ta question sur ma façon de sélectionner les livres, je me vois vraiment comme quelqu’un qui chine des ouvrages. Je pars d’un constat : les problèmes sociétaux existants sont souvent liés aux représentations culturelles. Les contenus jeunesse ont un rôle important à jouer dans la lutte contre les discriminations et les inégalités. Cette démarche s’inscrit pleinement dans la vocation d’une librairie jeunesse féministe, qui agit comme un levier pour transformer les mentalités dès le plus jeune âge.
Lorsque je cherche ces ouvrages, je m’équipe d’une sorte de « radar ». Je parcours les bibliothèques, les comptes Instagram spécialisés, les librairies et les rayons jeunesse. Pour chaque livre, je prends le temps de l’ouvrir et de le parcourir intégralement, en prêtant attention tant au texte qu’aux illustrations. Cette approche rigoureuse est fondamentale pour garantir que les ouvrages proposés dans une librairie jeunesse féministe soient fidèles à ses valeurs d’inclusion et d’équité.
J’ai aussi établi une liste de critères. Par exemple, je privilégie les histoires ancrées dans le réel avec des personnages humains. J’écarte généralement les récits mettant en scène des animaux anthropomorphisés. Pourquoi ce choix ? Parce que je tiens à montrer aux petites filles et aux petits garçons qu’ils peuvent être qui ils souhaitent dans le monde réel, et pas seulement dans des univers imaginaires. De plus, en nous attaquant à des discriminations et des inégalités bien réelles, il est important de proposer des ouvrages qui reflètent l’espace dans lequel les enfants vivent et évoluent. Cette approche renforce le rôle central d’une librairie jeunesse féministe comme espace de réflexion et d’apprentissage.
Donc, parmi mes critères, il y a celui d’avoir des personnages ancrés dans le monde réel et d’exclure les animaux anthropomorphisés, c’est-à-dire des animaux qui adoptent des comportements humains. Cela est d’autant plus important lorsque l’on observe que les animaux anthropomorphisés femelles sont souvent représentés comme incarnant la maternité. Ce choix s’inscrit dans une démarche cohérente avec les valeurs que je souhaite promouvoir dans ma librairie jeunesse féministe, où les stéréotypes sont déconstruits dès la conception des histoires.
Ensuite, je suis particulièrement attentive aux profils des personnages principaux et à leur schéma familial. Mon objectif est de neutraliser autant que possible les stéréotypes et de représenter une diversité de structures familiales. Je prends également en compte qui écrit les livres. Je m’intéresse à la ligne éditoriale des maisons d’édition, ainsi qu’aux auteurs, autrices, illustrateurs et illustratrices, car les messages véhiculés dans les illustrations peuvent être aussi puissants que ceux contenus dans le texte. Cette attention au détail est essentielle pour garantir que ma librairie jeunesse féministe sélectionne des ouvrages porteurs de valeurs inclusives.
Les Livres qui sèment ne sont pas une librairie lambda. C’est une librairie engagée, qui cherche à empouvoirer tous les enfants en représentant ceux qui, ainsi que leurs familles, sont habituellement invisibilisés dans la littérature jeunesse. C’est une manière d’offrir à chaque enfant la possibilité de se reconnaître dans les livres, mais aussi de s’ouvrir au monde. Une librairie jeunesse féministe doit être, avant tout, un outil d’émancipation et d’inclusion.
L’autrice Sylvie Li
Et pour répondre à ta question sur pourquoi une e-librairie, j’habite à Paris, où il y a de nombreuses chouettes librairies dans quasiment tous les quartiers. Je ne voulais pas me limiter à la population parisienne, qui bénéficie déjà d’une offre très riche et diversifiée. Ce que je souhaitais, c’était atteindre des familles vivant dans des zones éloignées, où l’accès à une librairie jeunesse féministe ou même à des librairies généralistes de qualité est bien plus limité.
J’ai eu cette prise de conscience lorsque j’ai passé quelques mois dans le sud de la France, dans le Var, après un confinement. Là-bas, je n’avais pas de librairie accessible à proximité. Le seul endroit où je pouvais acheter des livres, c’était dans les hypermarchés. Et franchement, l’offre était catastrophique : limitée, stéréotypée et sans diversité. Cela m’a fait réaliser à quel point de nombreuses familles, éloignées des grandes villes, n’ont pas accès à une librairie jeunesse féministe ou à des ouvrages qui reflètent la diversité du monde.
C’est à ce moment-là que j’ai eu le déclic de créer une e-librairie. Mon objectif était de proposer ces ouvrages engagés partout en France, et pas seulement à la population parisienne. Une librairie jeunesse féministe en ligne permet de toucher un public plus large, incluant des familles qui, autrement, n’auraient pas accès à ces ressources essentielles.
Alors, pour rebondir sur tout ce que tu viens de dire, que je trouve vraiment enrichissant et passionnant, je tiens à souligner un point essentiel : je trouve remarquable que ta mission soit centrée sur le développement de l’empathie et de la bienveillance chez les enfants. Comme je l’ai déjà mentionné dans plusieurs épisodes de mon podcast, je suis convaincue que le monde irait beaucoup mieux si nous cultivions davantage ces qualités. Apprendre à comprendre les différences plutôt que de les opposer est essentiel. La diversité n’est pas un problème, c’est une richesse, et transmettre cette idée dès le plus jeune âge est fondamental. Une librairie jeunesse féministe est un outil puissant pour promouvoir cette vision.
Quand tu as mentionné les campagnes de crowdfunding, cela m’a fait penser à une de mes invitées, Sylvie Li, que j’ai reçue dans le cadre de Matrimoine Féministe. Elle a notamment écrit des livres pour enfants, et nous avions beaucoup échangé sur Léo et ses deux mamans. Ce livre explique à son fils le parcours de PMA, pourquoi il est venu au monde, et montre qu’il y a autant d’amour dans une famille avec deux mamans que dans une famille avec un papa et une maman.
En plus, ce couple lesboparental est asiatique, ce qui répondait aussi au besoin de représentation culturelle de son fils. Ce type de livre, qui pourrait figurer dans n’importe quelle librairie jeunesse féministe, est essentiel pour diversifier les imaginaires des enfants.
Et d’ailleurs, si je ne me trompe pas, je crois que Sylvie Li figure sur ton site, non ? Je crois avoir vu ses ouvrages dans ta sélection.
Tout à fait ! J’ai les deux ouvrages de Sylvie Li, que j’ai eu le plaisir de rencontrer à plusieurs reprises. Ses livres s’intègrent parfaitement dans la sélection de Les Livres qui sèment. Ils mettent en avant une famille lesboparentale, mais vont au-delà : ils intègrent également de nombreux petits détails dans les illustrations qui rappellent la diversité culturelle et ethnique, notamment des éléments liés à l’Asie. Cette richesse, qui est essentielle dans une librairie jeunesse féministe, souligne à quel point la représentation doit être plus qu’une simple question d’apparence.
Tu vois, tu parlais d’embrasser nos différences, et c’est effectivement ce qui manque cruellement dans la littérature jeunesse actuelle. La diversité, notamment ethnique, ne peut se résumer à modifier la couleur de peau d’un personnage. Si un personnage noir, par exemple, se nomme Nathan et n’intègre aucune dimension culturelle ou historique propre à son vécu, peut-on réellement parler de diversité ? Dans une librairie jeunesse féministe, nous cherchons à aller plus loin en proposant des ouvrages où la diversité n’est pas seulement visuelle, mais aussi culturelle et narrative.
Et donc voilà, c’est exactement ce que fait Sylvie dans son livre. Le héros de l’histoire, Léo, a des grands-parents chinois, et on retrouve ces clins d’œil à la culture asiatique dans la nourriture, les cadres, et la décoration des pièces. Ces détails rendent l’histoire authentique et ancrée dans la réalité. C’est cela qui est essentiel : ne pas lisser nos différences, mais au contraire, les embrasser et en être fiers. Ce type de démarche est au cœur des sélections proposées dans une librairie jeunesse féministe, où la diversité est valorisée dans toutes ses dimensions.
Oui, parce que cela fait clairement partie de l’identité des personnes multiculturelles. Et même pour celles et ceux qui ne le sont pas, il est primordial de développer une compréhension et une ouverture à cette multiculturalité. Beaucoup de xénophobie ou de rejet naît de l’ignorance et de l’absence d’éducation à comprendre les différences. On apprend souvent à juger ces différences, à les considérer comme problématiques, au lieu de les voir comme des richesses. Une librairie jeunesse féministe peut jouer un rôle éducatif important en exposant les enfants à des histoires qui valorisent ces diversités humaines.
Prenons l’exemple de la culture asiatique. Elle montre que l’on peut vivre avec plusieurs cultures et que cela n’enlève rien à une identité française, par exemple. Une personne peut à la fois avoir une culture française et une culture asiatique, ou d’autres encore, qui coexistent harmonieusement. Ces représentations sont essentielles pour normaliser cette réalité et montrer qu’il est tout à fait naturel et beau de vivre avec plusieurs héritages culturels. Une librairie jeunesse féministe met en avant ce type d’histoires pour enseigner aux enfants qu’accepter et célébrer les différences est non seulement possible, mais enrichissant pour tous et toutes.
Apprendre à cultiver la différence
Le monde est tellement complexe que je pense qu’apprendre à cultiver nos différences nous emmène sur un chemin intérieur très profond et puissant. Pour notre propre bien-être, être dans une posture d’ouverture est bénéfique. Cela nous permet de développer une véritable ouverture d’esprit et, dans une certaine mesure, un amour sincère des autres. Être dans la haine consomme énormément d’énergie, alors qu’adopter une position d’accueil et d’acceptation est bien plus apaisant. Une librairie jeunesse féministe contribue à cette démarche en proposant des ouvrages qui célèbrent la diversité et l’acceptation.
Évidemment, cela dépend du vécu, de l’expérience personnelle, et de ce que chacun a pu traverser. De nombreux facteurs entrent en jeu, et je ne le minimise pas. Mais je suis convaincue que pour avancer vers une société plus juste et égalitaire, un premier pas essentiel est de s’ouvrir à la culture et aux histoires des autres. Une librairie jeunesse féministe peut être un formidable outil pour amorcer ce changement, en offrant aux lecteurs des représentations variées et inclusives.
Oui, tout à fait. Et on peut clairement voir l’impact positif que des représentations justes peuvent avoir. Par exemple, lors d’une lecture dans un centre social à Saint-Ouen, j’ai lu L’Amoureuse de Simone des éditions On ne compte pas pour du beurre. Dans ce texte, il y a un personnage, Tata Fatt, une femme noire et grosse, qui tresse les cheveux de Simone, l’héroïne. Dans cette scène, où Simone se conforte auprès de Tata Fatt, un enfant dans le public s’est exclamé : « Mais c’est ma maman, elle ne s’appelle pas Tata Fatt, mais c’est ma maman ! » Une librairie jeunesse féministe, en proposant ce type d’ouvrages, donne aux enfants la possibilité de se reconnaître et de se sentir valorisés.
J’ai pu voir la joie immense de cet enfant en reconnaissant sa maman dans un livre. Cette reconnaissance, ce miroir de leur réalité, est un cadeau précieux que nous pouvons offrir aux enfants grâce à des histoires qui reflètent la diversité. Une librairie jeunesse féministe s’inscrit dans cette mission en rendant visible ce qui a trop longtemps été occulté dans la littérature jeunesse.
Une deuxième lecture que j’ai faite était celle de Tout est si brillant. C’est un livre particulièrement intéressant, à la fois queer et valorisant la culture maghrébine. Il raconte l’histoire d’un petit garçon qui rêve de devenir une star. Il aime se maquiller, mettre du vernis, et aspire à briller sur scène en tant que chanteur. Ce type de récit, atypique et inclusif, est exactement ce qu’une librairie jeunesse féministe doit mettre en avant pour diversifier les représentations.
Dans cette histoire, on rencontre la mère et la grand-mère (ou la tante) du garçon, qui lui chantent une berceuse et l’appellent tendrement « Khabibi ». Quand j’ai lu ce mot à haute voix, les enfants présents ont immédiatement compris et se sont sentis connectés à l’histoire. J’ai vu leur joie à travers leurs regards, leur fierté de se sentir représentés dans un livre. Une librairie jeunesse féministe a pour mission de proposer ce type d’ouvrages, qui offrent aux enfants le sentiment d’être vus et valorisés.
Par exemple, si l’on parle des mères qui portent le foulard et qui attendent leurs enfants à la sortie de l’école, ces femmes sont souvent absentes des livres. Pourtant, pour un enfant, voir sa maman représentée dans une histoire, c’est une immense source de fierté. Cela valorise leur culture et leur famille. Une librairie jeunesse féministe contribue à rendre ces familles visibles, à leur donner leur juste place dans les récits, et à montrer qu’elles appartiennent pleinement à la société, tout comme les autres foyers.
L’importance de la représentation
Oui, c’est tellement important ce que tu dis. Cela me fait penser à l’exemple de Disney avec la Petite Sirène noire. J’ai vu des vidéos sur les réseaux sociaux où des enfants réagissaient avec une immense joie en disant : « Mais c’est moi, je suis trop contente ! » Cela montre à quel point ces représentations peuvent avoir un impact positif sur les enfants. Ce type de joie, d’identification, et de fierté est exactement ce que l’on cherche à susciter en proposant des ouvrages variés dans une librairie jeunesse féministe.
D’ailleurs, cela me rappelle une anecdote personnelle liée à Totally Spies. Quand j’étais petite, j’étais un peu rondelette, et il y avait un épisode où Clover devenait ronde elle aussi. À partir de ce moment, Clover est devenue ma préférée. Je me disais : « Mais c’est moi, Clover, je suis trop contente ! » Ce pouvoir d’identification, que ce soit dans des séries ou des livres, est fondamental. Une librairie jeunesse féministe veille à offrir ce type de moments aux enfants de tous horizons.
Tout à fait. Lorsque j’échange avec des familles, je remarque que ces représentations touchent également les parents, car elles font écho à leurs propres histoires. Pour moi, Les Livres qui sèment est aussi un projet personnel. Je viens d’une famille biculturelle : ma mère est équatorienne, d’Amérique du Sud, et mon père est breton. À la maison, nous vivions avec cette double culture, mais je n’ai grandi avec aucune représentation latino. Une librairie jeunesse féministe aurait été un moyen puissant de combler ce vide.
À l’école, mes camarades associaient souvent les familles latinos à des clichés comme les ponchos, les flûtes de pan, ou les lamas, des stéréotypes éloignés de la réalité. Ces représentations limitées m’ont beaucoup marquée. Et comme toi, j’étais rondelette, ce qui m’a également confrontée à des complexes renforcés par les représentations dans les magazines et les médias de l’époque. Même aujourd’hui, à 40 ans, ces injonctions à la beauté continuent d’avoir un impact. Une librairie jeunesse féministe peut briser ces normes en offrant une diversité de corps et de cultures pour que les enfants puissent grandir avec des représentations inclusives et valorisantes.
Notre quête sur Terre
Oui, cela me rappelle l’épisode que j’ai eu avec Asli Ciyow sur le féminisme intersectionnel. Nous avions discuté de sa quête identitaire, du fait de vivre avec deux identités, et du défi que cela représente. Comme toi, elle avait ressenti ce manque de rôles modèles liés à ses origines. Tu as vécu une expérience similaire en n’ayant pas de représentations de ta culture latino. C’est fantastique que tu puisses offrir cela à tes filles aujourd’hui, pour qu’elles s’affirment pleinement en tant qu’individus complets. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle clé en proposant des histoires qui valorisent cette pluralité identitaire.
Ce n’est pas seulement la partie visible de l’iceberg ; il y a des éléments plus enfouis, qui ramènent à nos racines. Entamer une réflexion sur ces aspects est essentiel pour mieux se connaître. Une des grandes quêtes que nous devrions avoir sur Terre est celle du chemin vers soi. Et dans cette quête, il y a aussi l’héritage de toutes les générations de femmes qui nous ont précédées. Elles ont lutté pour obtenir des droits, des libertés, et bien plus encore. Pour d’autres femmes, notamment dans une perspective intersectionnelle, cet héritage est encore plus riche et complexe. Une librairie jeunesse féministe peut transmettre ces récits pour inspirer et permettre de construire une société plus équitable.
Oui, tout à fait. Aujourd’hui, on comprend de mieux en mieux l’importance des rôles modèles pour se construire. Quand on regarde les constats du centre Hubertine Auclert, on apprend que seulement 3,2 % des personnages des manuels scolaires sont féminins. Comment nos filles pourraient-elles se rêver présidentes, astronautes ou scientifiques si elles ne voient pas ces modèles dans leurs livres scolaires ? Une librairie jeunesse féministe doit combler ce vide en mettant en lumière des figures féminines, mais aussi des rôles modèles non blancs, LGBT, et d’autres profils sous-représentés. Cela montre que tout le monde a contribué à l’histoire et qu’il est possible de rêver à un avenir sans limites.
Ce que tu dis à propos des 3,2 % de personnages féminins dans les ouvrages scolaires me rappelle une anecdote marquante de mon adolescence. C’est au collège que j’ai vécu ce qui est finalement devenu le déclencheur de mon engagement féministe, de mon site féministe stellou, de mon compte Instagram, et plus tard de mon podcast Matrimoine Féministe. Cette expérience illustre parfaitement à quel point le manque de représentations peut façonner nos parcours. Une librairie jeunesse féministe a justement pour mission d’éviter que d’autres jeunes filles ressentent cette frustration en mettant en avant des récits qui les inspirent et leur donnent confiance.
L’anecdote en question est une dispute que j’ai eue avec un garçon de ma classe. Selon lui, les femmes n’avaient pas marqué l’histoire, car sinon, on en aurait davantage parlé. J’étais convaincue qu’il avait tort, mais quand il m’a mise au défi de citer « plein » de noms de femmes inspirantes ayant marqué l’histoire, je n’ai pu en mentionner que trois : Jeanne d’Arc, Marie Curie, et Rosa Parks. J’ai eu la sensation d’avoir perdu ce débat, et cette frustration m’a marquée. Je savais pourtant que les femmes avaient joué un rôle majeur dans l’histoire, mais leurs contributions avaient été systématiquement invisibilisées. Une librairie jeunesse féministe aurait pu être une ressource précieuse pour m’aider à défendre ma position à l’époque.
À cette période, internet n’était pas aussi accessible ou riche qu’aujourd’hui, et j’ai mis de côté cette frustration pour continuer ma vie. Mais bien plus tard, en lançant féministe stellou et Matrimoine Féministe, je me suis reconnectée à cette Esthel du passé. Une Esthel qui, malgré son jeune âge, croyait fermement que les femmes avaient changé le cours de l’histoire. Cette reconnexion m’a permis de prendre conscience de l’ampleur de l’effacement des femmes dans les récits historiques. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle nécessaire en offrant un espace où ces histoires peuvent être redécouvertes et célébrées.
Cela me fait aussi penser à une BD que j’adore et que je recommande vivement : L’Histoire de France au féminin de Blanche Sabbah et Christine Mirza. C’est une pépite absolue, qui met en lumière des femmes ayant contribué à façonner l’histoire de la France, mais qui ont été oubliées ou marginalisées. Une œuvre comme celle-ci a toute sa place dans une librairie jeunesse féministe, car elle réhabilite ces figures essentielles et inspire les générations actuelles et futures.
La chance des enfants de notre génération
C’est vrai, je réalise aujourd’hui la chance qu’ont nos enfants de grandir avec ces nouveaux ouvrages. Les historiennes ont fait un travail formidable pour revendiquer le rôle des femmes dans l’histoire. Je suis vraiment ravie, notamment avec cette BD dont tu parles, L’Histoire de France au féminin. Blanche Sabbah est une autrice que j’apprécie beaucoup.
J’ai aussi Les femmes ont fait l’histoire de Titou Lecoq, adapté pour la jeunesse, et c’est un régal à lire avec mes filles. On découvre un chapitre de temps en temps, et je me rends compte à quel point elles ont de la chance de grandir avec de tels outils. Une librairie jeunesse féministe permet de rendre ces œuvres accessibles à un large public, pour que d’autres familles puissent en bénéficier.
Ces ouvrages sont essentiels, non seulement pour les filles, mais aussi pour les garçons. Ils offrent de véritables leçons d’histoire et permettent à chacun de comprendre l’invisibilisation des femmes à travers les siècles. Ce constat reste pertinent aujourd’hui, même dans les écoles où certains adultes ne réalisent pas l’ampleur de cet effacement. Réhabiliter ces récits est une mission clé pour avancer vers une société plus juste. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle fondamental en proposant ces livres qui rétablissent l’histoire et ouvrent les esprits.
Complètement ! Cela me fait penser au podcast Les Nouvelles Héroïnes de Céline Steyer, qui présente des portraits de femmes inspirantes pour les enfants au format audio. Ce podcast a trouvé son public, et il offre une excellente complémentarité avec les ouvrages papier disponibles dans une librairie jeunesse féministe. Est-ce que toi, tu l’écoutes avec tes filles ?
Non seulement je l’écoute, mais j’ai la chance de collaborer avec Céline de temps en temps pour son podcast. Nous avons travaillé ensemble sur quelques épisodes et posts communs. Ce que j’adore avec Les Nouvelles Héroïnes, c’est qu’elle met en avant des figures contemporaines, des rôles modèles qui existent aujourd’hui et que les jeunes filles et garçons peuvent rencontrer. Les parcours qu’elle présente sont empreints de courage et mettent en lumière une grande diversité : des personnes porteuses de handicap, des personnes LGBT, et bien d’autres. Ce podcast est une ressource précieuse, et je le recommande vivement. Une librairie jeunesse féministe et un podcast comme celui-ci partagent une même mission : donner à chacun des exemples inspirants et représentatifs.
Je ne savais pas que vous travailliez ensemble, c’est génial ! Cela montre à quel point le réseau féministe est riche et connecté. Je suis vraiment heureuse que les enfants de cette génération puissent grandir en conscience grâce à ces outils précieux, qu’ils soient écrits ou audios. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle indispensable pour diffuser ces initiatives et aider à bâtir une génération plus éclairée et inclusive.
Cela me fait penser à une citation que j’avais déjà partagée avec Asli Ciyow : « On parle souvent de la planète que nous allons laisser à nos enfants, mais rarement des enfants que nous allons laisser à cette planète. » Je pense que cette réflexion est fondamentale. Plus nous éduquons des enfants conscients des enjeux d’égalité, des défis sociétaux, écologiques, et autres, plus nous pouvons espérer créer des récits collectifs positifs. Une librairie jeunesse féministe est un espace clé pour accompagner cette éducation, en proposant des livres qui éveillent à ces enjeux tout en donnant des outils pour agir.
Cela me fait aussi penser à la crise climatique. À force de montrer uniquement des catastrophes et de dire : « La planète est foutue, on ne s’en sortira jamais », on finit par décourager les gens. Ce type de discours éteint l’espoir et pousse à l’inaction. Une librairie jeunesse féministe peut, au contraire, être un vecteur d’espoir, en mettant en avant des histoires qui montrent que le changement est possible, que ce soit à travers des récits écologiques ou des initiatives sociales positives.
Il est essentiel de transmettre des récits porteurs d’espoir, car c’est ainsi que nous pouvons motiver les gens à agir. Je vois de plus en plus d’initiatives qui vont dans ce sens, montrant qu’il n’est pas trop tard pour sauver la planète ou pour corriger les inégalités. Ces récits peuvent faire un véritable déclic chez les jeunes générations, mais aussi chez les adultes, en leur montrant qu’ils ont un rôle à jouer. Une librairie jeunesse féministe contribue à diffuser cet espoir en rendant visibles ces initiatives et en les inscrivant dans le quotidien des familles.
La sensibilisation écologique
Pour la librairie, le volet écologique est aussi essentiel, car nos enfants vont nécessairement être sollicités sur ces enjeux. Pour moi, l’essentiel est qu’ils s’approprient ces sujets de manière positive et orientée vers l’action, sans alimenter d’anxiété. La menace écologique peut être très présente pour les générations futures, et il est important de l’aborder sans dissocier le volet écologique du volet social. C’est pourquoi, quand je parle de Les Livres qui sèment, je dis que c’est une librairie jeunesse féministe engagée pour la diversité, l’égalité, et l’écologie.
Sensibiliser à l’écologie commence par comprendre et aimer la nature et les écosystèmes qui nous entourent. On ne peut pas protéger ce que l’on ne connaît pas. C’est pourquoi je mets en avant des ouvrages permettant de découvrir et de comprendre ces écosystèmes. En parallèle, j’aime aussi présenter des rôles modèles et des récits inspirants qui montrent aux enfants comment ils peuvent s’engager. Ces livres illustrent des ouvertures professionnelles et des métiers ayant un impact positif sur l’environnement. Une librairie jeunesse féministe permet de transmettre ces histoires d’action et d’engagement.
Il est également important de montrer aux enfants qu’ils ne sont pas seuls dans ce combat. Je déplore les messages du type « Vous êtes les super-héros qui allez sauver la planète », car cela met une pression énorme sur leurs épaules. Non, c’est un travail d’équipe, un effort intergénérationnel. C’est pourquoi j’apprécie les livres qui présentent des familles s’engageant ensemble, montrant que cette quête d’un monde plus juste et durable est portée collectivement. Une librairie jeunesse féministe valorise ce type de récits pour cultiver une vision solidaire et réaliste.
Enfin, dans les ouvrages qui parlent d’écologie, il est essentiel d’éviter de créer de l’éco-anxiété chez les enfants. Les livres que je sélectionne restent positifs et montrent comment agir à leur échelle : par la sensibilisation, le ramassage de déchets, ou encore la protection des animaux. Ce sont des ouvrages que j’affectionne particulièrement, car ils offrent des solutions concrètes et accessibles, tout en transmettant un message d’espoir. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle fondamental en proposant ce type de livres inspirants et constructifs.
Oui, ce que tu soulignes est essentiel : il faut aider les enfants à construire leur esprit critique, et cela vaut aussi pour les adultes. Avec les réseaux sociaux, il est parfois difficile de développer un regard critique face à des vidéos ou contenus très courts qui ne permettent pas de saisir la globalité d’un sujet. C’est aussi pour cela que j’ai lancé un podcast. J’en avais assez de ces formats où l’on ne traite qu’une petite partie d’un sujet, sans entrer en profondeur. Une librairie jeunesse féministe joue un rôle complémentaire en proposant des ouvrages qui poussent à la réflexion et enrichissent les connaissances.
Quand tu parlais des métiers, cela m’a fait penser au déficit de femmes dans les domaines scientifiques. Ce manque est encore très marqué aujourd’hui. Il faut montrer aux enfants, et particulièrement aux petites filles, que les métiers scientifiques sont non seulement accessibles, mais aussi passionnants. Ces métiers permettent, par exemple, d’avoir un impact sur la planète ou de contribuer à des avancées majeures. Une librairie jeunesse féministe peut offrir des récits inspirants qui montrent à ces jeunes filles que ces carrières sont à leur portée, et que de nombreuses femmes s’y épanouissent déjà.
Pour qu’une jeune fille puisse se projeter dans ces métiers, elle doit avoir des rôles modèles auxquels s’identifier. Or, ces modèles restent sous-représentés aujourd’hui. En plus de cela, le sexisme profondément ancré dans certains milieux rend les choses encore plus compliquées pour les femmes. Une librairie jeunesse féministe peut contribuer à déconstruire ces barrières en mettant en avant des figures féminines qui brisent les stéréotypes et surmontent ces obstacles, inspirant ainsi les nouvelles générations.
Cela me fait aussi penser à une statistique frappante : 80 % des inégalités entre hommes et femmes trouvent leur origine dans le congé maternité. C’est un exemple concret des défis structurels auxquels les femmes sont confrontées.
Les livres qui sèment… quoi ?
Ce que nous faisons aujourd’hui, à travers l’éducation, les récits et les initiatives comme une librairie jeunesse féministe, c’est préparer une société plus juste pour les futures générations. Une société où chaque enfant, quelle que soit son identité ou son parcours, pourra grandir avec l’idée qu’il n’y a aucune limite à ce qu’il ou elle peut accomplir.
C’est vrai que ce que nous faisons actuellement prépare une société où les futures générations auront, espérons-le, moins de combats à mener. Bien sûr, il y aura toujours des choses à régler, mais nous avançons vers quelque chose de plus égalitaire et plus juste. Cela m’amène à une petite question pour toi : Les Livres qui sèment, ça sème quoi, exactement ?
En fait, quand j’ai imaginé un projet d’impact, j’étais d’abord attirée par les métiers liés à la terre ou à l’alimentation. Mais je n’avais pas la main verte du tout ! Pourtant, j’ai gardé cette fibre liée à l’idée de semer. Le livre, pour moi, a fait sens parce que c’est un bien de première nécessité. Pendant le confinement, cela s’est révélé encore plus évident : les livres sont des outils essentiels.
Les Livres qui sèment, c’est donc ce jeu de mots : les livres comme des graines, prêtes à germer et à grandir. Mais il ne suffit pas de semer la graine, il faut l’accompagner, la nourrir pour qu’elle pousse. Une librairie jeunesse féministe participe aussi à ce travail d’accompagnement en offrant des récits qui éduquent et inspirent.
Et donc, qui sème quoi ? Eh bien, qui sème l’amour, le respect de soi, le respect pour autrui, et le respect du vivant. Les Livres qui sèment, c’est tout cela : des récits qui cultivent des valeurs humaines fondamentales. Une petite anecdote amusante : au début, mes filles écrivaient le nom de ma librairie en inversant légèrement, elles écrivaient Les livres qui s’aiment (S’apostrophe, A, I, M, E, N, T). Cela m’a remplie de joie, car elles avaient compris l’essence même de la mission de la librairie jeunesse féministe : semer de l’amour et du pouvoir pour grandir ensemble.
Oh, mais c’est adorable, j’adore cette anecdote, je la valide à 100 % ! Cela montre aussi que les enfants, bien que souvent sous-estimés par certains adultes, ont une conscience et une sensibilité qui leur sont propres. Ce n’est pas parce qu’on est enfant qu’on ne peut pas avoir de valeurs ou un esprit critique en train d’émerger.
Les prendre au sérieux, comme des êtres humains à part entière, sans faire de distinctions de genre ou autre, est fondamental. Ce que tu fais avec Les Livres qui sèment, en leur offrant des outils pour grandir et réfléchir, est incroyablement important. Une librairie jeunesse féministe comme la tienne donne aux enfants et aux adultes des clés pour s’épanouir dans un monde plus juste et plus respectueux.
Représenter les femmes scientifiques
Tu as raison, inspirer les jeunes filles à suivre des carrières scientifiques, techniques ou numériques est essentiel. Ce sont des secteurs d’avenir, à forte valeur ajoutée, et les inciter à y entrer contribue également à réduire les inégalités. Aujourd’hui, ces inégalités se reflètent non seulement dans les salaires, mais aussi dans les orientations professionnelles, avec une majorité de femmes se tournant vers les métiers du care, tandis que les métiers techniques et numériques restent largement dominés par les hommes. Une librairie jeunesse féministe peut jouer un rôle clé en mettant en avant des récits où des petites filles sont représentées dans des domaines scientifiques et techniques.
Les rôles modèles sont importants, mais les livres le sont tout autant. Ils permettent de valider auprès des jeunes filles qu’elles ont toute leur place dans ces milieux. L’un de mes premiers déclics remonte au confinement, en 2020, lorsque je travaillais avec mes enfants sur des sujets comme le système solaire ou le corps humain.
Je me suis aperçue que, dans les histoires, c’étaient toujours des petits garçons qui expliquaient ces concepts, tandis que les petites filles restaient des personnages secondaires, des faire-valoirs. Cela m’a frappée : dès le plus jeune âge, on présente aux enfants une vision genrée où les filles n’ont pas la même place que les garçons. Une librairie jeunesse féministe peut renverser cette tendance en proposant des histoires où les filles occupent une position centrale.
Cette question est également nécessaire dans le domaine du numérique. Aujourd’hui, les femmes représentent à peine 20 % des effectifs dans ce secteur, alors que l’on nous promet un avenir entièrement numérique. Que signifie un monde numérique conçu principalement par des hommes ? Une librairie jeunesse féministe peut contribuer à changer cela en sensibilisant les enfants, et particulièrement les filles, à leur rôle potentiel dans la technologie et l’innovation. Il est essentiel qu’elles sentent dès maintenant qu’elles ont toute leur place dans ces univers et qu’elles peuvent en devenir les actrices majeures.
C’est vrai, les statistiques montrent que les filles sont très intelligentes, qu’elles obtiennent de très bons résultats en mathématiques et qu’elles sont parfois mieux diplômées que les hommes. Pourtant, les stéréotypes et les injonctions sociales leur font souvent croire qu’elles ne sont pas légitimes dans certains milieux, notamment les sciences, la technologie ou le numérique. En parallèle, le sujet de la maternité vient également freiner leur carrière, ce qui nécessite des actions ciblées. Une librairie jeunesse féministe peut jouer un rôle préventif en offrant des histoires qui déconstruisent ces idées reçues et valorisent le potentiel des filles.
Comme tu le dis, on doit montrer aux petites filles qu’elles peuvent prendre leur place dans la société et qu’elles sont capables de grandes choses. Cela leur donne confiance en elles et les inspire à agir. Mais sans représentation, ces ambitions peuvent rester abstraites. Par exemple, nous n’avons jamais eu de femme présidente en France. Comment une petite fille pourrait-elle naturellement s’imaginer à ce poste si elle n’a jamais vu une femme l’occuper ? Une librairie jeunesse féministe peut pallier ce manque en proposant des récits où des femmes jouent des rôles majeurs, brisant ainsi les plafonds de verre symboliques.
La question des représentations est au cœur de ce combat. Ce que les enfants voient dans les livres, les médias ou les figures publiques façonne leur vision du monde et leurs aspirations. Une librairie jeunesse féministe contribue activement à changer cette dynamique en mettant en avant des récits inspirants et inclusifs, qui montrent que les filles, comme les garçons, ont la capacité et la légitimité de changer le monde.
Etre fresqueuse de l’équité
Ça me fait plaisir d’en parler, car la Fresque de l’équité est un atelier d’intelligence collective qui me tient particulièrement à cœur. Pour celles et ceux qui connaissent la Fresque du climat, la démarche est similaire. Il s’agit d’un atelier collaboratif autour d’un jeu de cartes qui permet de découvrir et de comprendre les inégalités de genre. Ensuite, dans une deuxième partie, on réfléchit ensemble à des actions concrètes. Ces actions peuvent être collectives, comme des initiatives pour des entreprises ou des communautés, mais aussi des défis individuels. Une librairie jeunesse féministe complète parfaitement cette démarche en offrant des supports pour approfondir ces réflexions chez soi.
Ce que j’aime beaucoup dans cet atelier, c’est qu’il n’est pas descendant : je ne suis pas là pour transmettre un savoir comme dans une conférence. Ce sont les participants et participantes qui, ensemble, partagent leurs expériences, leurs constats, et leurs ressentis. Ils et elles construisent eux-mêmes la fresque, en dessinant et en articulant les différentes thématiques. Cette dynamique permet une véritable appropriation du sujet, ce qui est essentiel pour un changement durable. Une librairie jeunesse féministe peut prolonger cet apprentissage en proposant des ouvrages adaptés aux enjeux discutés lors de l’atelier.
La Fresque de l’équité a beaucoup de sens pour moi, car au-delà de la vente de livres, ce qui m’importe, c’est de sensibiliser autour de ces sujets. Cet atelier aborde plusieurs domaines de la vie des femmes : la finance, la carrière, les violences sexistes et sexuelles, la parentalité, et, bien sûr, l’éducation. Une partie clé de la fresque explore l’impact des rôles modèles et des représentations dans la construction de soi, un sujet directement lié aux engagements d’une librairie jeunesse féministe comme Les Livres qui sèment.
Pour moi, sensibiliser à ces enjeux est fondamental, et Les Livres qui sèment est un outil qui complète cette mission. La librairie permet aux familles d’avoir des supports concrets à la maison, pour approfondir et appuyer les messages abordés dans des ateliers comme la Fresque de l’équité. Cela crée une continuité dans la sensibilisation et contribue à la transformation des mentalités.
La Fresque de l’équité est un atelier destiné à un large public, comme celui où nous nous sommes rencontrées chez Sister, à Paris. Mais c’est aussi un outil très adapté aux entreprises et aux organisations. Il permet de fédérer les collaborateurs et collaboratrices en les impliquant dans la recherche de solutions pour leur propre environnement professionnel. Cette approche participative est ce qui rend cet atelier si intéressant. De la même manière qu’une librairie jeunesse féministe propose des outils pour sensibiliser et agir au quotidien, la fresque permet de mobiliser l’intelligence collective pour le changement.
Ce qui est fascinant avec ces ateliers d’intelligence collective, comme tu le dis, c’est que chacun peut avoir un impact à son échelle. Les participants ne sont pas de simples témoins, mais des acteurs et actrices du changement. Ils prennent part au processus et identifient des solutions adaptées à leur contexte. Comme on en discutait avec Minetou Ndiaye, chaque organisation a sa propre structure, ses processus, et ses contraintes. Il est donc essentiel d’adapter les solutions à chaque entreprise, en tenant compte de son budget, de sa culture, et de ses particularités. De la même manière qu’une librairie jeunesse féministe s’adapte aux besoins variés des familles et des communautés, la fresque s’ajuste aux spécificités de chaque organisation.
Ce que j’apprécie particulièrement dans ces ateliers, c’est qu’ils permettent aux entreprises de repartir avec une liste d’actions concrètes, portées par les équipes elles-mêmes. Les collaborateurs et collaboratrices sont les mieux placés pour identifier ce qui doit être fait dans leur entreprise pour favoriser l’égalité. Ils connaissent les plateformes de formation, le fonctionnement interne, et l’agenda événementiel de leur entreprise. Ce sont des éléments qu’un intervenant extérieur ne pourrait pas leur livrer, mais qu’ils peuvent eux-mêmes mettre en lumière en quelques heures. Une librairie jeunesse féministe, à son niveau, agit de façon similaire en offrant des ressources qui permettent à chacun d’agir sur ses propres réalités.
Un autre aspect puissant de la fresque, c’est qu’elle rassemble souvent des membres de toutes les hiérarchies, y compris parfois des membres du COMEX ou de la gouvernance. Ces ateliers mélangent les niveaux hiérarchiques, ce qui sensibilise tout le monde de manière égale, du conseil d’administration aux collaborateurs. Cette dynamique horizontale est essentielle pour assurer que les changements identifiés soient soutenus à tous les niveaux de l’entreprise. Cela rejoint la mission d’une librairie jeunesse féministe, qui vise à briser les barrières et à promouvoir l’équité dans tous les espaces de la société.
C’est quoi le comex ?
Excellente question, et c’est super important de bien expliquer ces termes pour que tout le monde puisse suivre. Alors, le COMEX est l’abréviation de comité exécutif. C’est un groupe de dirigeants au sein d’une entreprise, composé généralement des cadres les plus haut placés, comme le directeur général, les directeurs des différentes branches (finances, marketing, RH, etc.). Leur rôle principal est de prendre des décisions stratégiques importantes pour l’entreprise et de s’assurer que celles-ci soient mises en œuvre. On peut voir le COMEX comme le cœur décisionnel opérationnel d’une entreprise.
Le conseil d’administration, quant à lui, est une instance plus globale et souvent composée de représentants des actionnaires, de dirigeants, et parfois de membres externes. Ce conseil se concentre sur les grandes orientations stratégiques de l’entreprise et veille à sa bonne gouvernance. Il peut approuver ou superviser les décisions majeures du COMEX. L’impact du conseil d’administration est important, car il fixe les grandes lignes directrices de l’entreprise et s’assure de leur respect.
L’importance de ces instances dans une entreprise est immense. Ce sont elles qui décident des grandes stratégies, allouent les budgets, et priorisent les projets. Leur composition est donc un enjeu majeur pour la diversité et l’égalité. Si ces comités ne sont pas inclusifs, cela peut perpétuer des systèmes inégalitaires. C’est pourquoi il est essentiel de sensibiliser ces niveaux de direction, comme on le fait dans des ateliers comme la Fresque de l’équité. Une librairie jeunesse féministe agit aussi indirectement sur ces enjeux en mettant à disposition des outils éducatifs pour toutes les strates de la société, y compris pour les décideurs.
En résumé, le COMEX s’occupe des décisions opérationnelles, tandis que le conseil d’administration supervise et oriente les grandes stratégies. Les deux jouent un rôle clé dans la structure et la réussite d’une entreprise. Et en expliquant ces termes, on contribue à rendre le féminisme éducatif et inclusif, pour que chacun puisse comprendre et participer au changement.
Est-ce que tu voudrais rajouter quelque chose à notre discussion ?
Merci pour cette discussion très riche. Avant de conclure, je pense qu’il est essentiel de rappeler ce que tu as souligné : l’importance de travailler l’esprit critique des enfants. Censurer des ouvrages n’apporte rien, car à un moment ou un autre, les enfants tomberont dessus. Ce qui compte, c’est de les accompagner dans leur lecture, de leur poser des questions, et d’écouter leurs réflexions. Ils sont souvent bien plus intelligents et pertinents qu’on ne le pense, et leurs remarques peuvent vraiment nous surprendre. Une librairie jeunesse féministe peut jouer un rôle clé en proposant des livres qui ouvrent des discussions et renforcent cet esprit critique.
Je suis entièrement d’accord avec toi : la censure est inutile. Si on empêche les enfants de comprendre pourquoi quelque chose est problématique, ils n’apprennent pas à analyser ni à remettre en question. En conséquence, ils risquent de reproduire des modèles ou des comportements sans en comprendre les enjeux. Être parent, c’est un vrai travail, car on forme les citoyens et citoyennes de demain. Leur donner des bases solides, des valeurs, et des outils comme l’esprit critique. Une librairie jeunesse féministe contribue à cela en offrant des ressources adaptées pour aborder des sujets complexes de manière accessible et éducative.
Je trouve aussi que, même si apprendre les mathématiques et le français est important, les soft skills, ces compétences transversales comme l’esprit critique, l’empathie, ou la communication, manquent souvent dans l’éducation formelle. À mon époque, ces compétences n’étaient pas enseignées à l’école, et j’espère que les choses évoluent aujourd’hui. Les soft skills sont essentielles dans la vie de tout individu, car elles façonnent notre capacité à interagir, à comprendre les autres, et à nous adapter. Une librairie jeunesse féministe peut aussi proposer des livres qui mettent en avant ces compétences et aident à les développer dès le plus jeune âge.
Parfait, je pense que nous sommes prêtes à conclure cette belle conversation. Merci encore pour tous ces partages.
Le mot de la fin
Oui, tout à fait, c’est super important. Ce que j’aimerais que les auditeurs et auditrices retiennent de cet échange, c’est que les enfants, dès l’âge de 4 ans, intègrent déjà les stéréotypes. Cela souligne à quel point les ouvrages de premier âge sont essentiels. Il ne faut pas hésiter, dès une naissance, à commencer une bibliothèque inclusive et positive dès les premières années de vie.
Une librairie jeunesse féministe peut être un excellent point de départ pour trouver des livres qui participent à cette mission. Pour moi, on doit garder en tête que la littérature jeunesse est un espace de socialisation. Elle joue un rôle énorme dans l’épanouissement des enfants et dans leur empowerment à travers des récits qui les valorisent et les inspirent.
Oui, tu as raison. La littérature jeunesse est souvent dévalorisée, alors qu’elle ne devrait pas l’être. Elle est essentielle, car c’est par là que nous avons tous et toutes commencé. Chaque étape de la vie mérite ses livres, mais c’est particulièrement vrai pour l’enfance, où se construisent les bases de l’identité et des valeurs. Une librairie jeunesse féministe peut justement offrir des ouvrages adaptés à chaque âge pour accompagner cette construction de manière positive et inclusive.
Oui, tout à fait. Cela me fait penser à Vandana Shiva, une scientifique et militante écoféministe que j’ai découverte dans ses conférences contre les OGM et dans sa lutte contre Monsanto. Sa démarche m’a profondément marquée. Elle incarne parfaitement l’idée qu’à travers des récits, des idées, et des actions, on peut inspirer des générations entières à s’engager pour un monde plus juste, équitable, et durable. Une librairie jeunesse féministe participe aussi à cette vision en proposant des récits qui éduquent tout en cultivant une conscience sociale et écologique.
Qui sont tes rôles modèles ?
Et bien, typiquement, Vandana Shiva est une femme qui m’a toujours inspirée et fascinée. C’est une militante et scientifique indienne dont le parcours est extrêmement inspirant. J’aimerais beaucoup voir son portrait figurer davantage parmi les rôles modèles pour les enfants, car ses actions et ses idées sont d’une richesse incroyable. Une librairie jeunesse féministe pourrait être un excellent canal pour introduire des récits basés sur des figures comme elle auprès des jeunes générations.
Oui, c’était elle qui avait lancé un mouvement pour sauver les arbres en leur faisant des câlins. Je n’ai plus la chronologie exacte en tête, mais je sais que ce mouvement avait eu un véritable impact contre la déforestation. Ce genre d’initiative montre à quel point des actes de résistance pacifique peuvent avoir une portée immense. C’est le type d’histoires que l’on aimerait retrouver dans une librairie jeunesse féministe pour sensibiliser les enfants à la protection de l’environnement.
Oui, c’était le mouvement des Chipko. Elles enlaçaient les arbres pour empêcher qu’on les abatte, une forme de désobéissance civile qui a eu un impact considérable. Ce geste simple mais symbolique m’émeut beaucoup, car il montre que même des actions non violentes peuvent résister à de grandes injustices. Cela illustre bien l’importance de préserver la nature, et pourquoi des figures comme Vandana Shiva devraient être mises en avant pour les enfants dans des ouvrages disponibles dans une librairie jeunesse féministe.
Oui, surtout à l’heure actuelle. Nous avons tendance à détruire la nature, souvent sans réaliser qu’en le faisant, nous mettons aussi en danger notre propre survie. La nature est essentielle à notre bien-être. Tuer la nature, c’est aussi, dans une certaine mesure, tuer l’humanité. Nous avons besoin des arbres, des plantes, et de tout ce que la nature nous offre. Ce n’est pas une vie de voir un paysage fait uniquement d’immeubles et de béton. C’est pourquoi il est si important de préserver notre maison commune : la planète Terre. Une librairie jeunesse féministe peut participer à cette prise de conscience en proposant des récits qui sensibilisent les jeunes générations à leur rôle dans la préservation de l’environnement.
Oui, et surtout, prendre conscience que nous faisons partie de cette nature. Se battre contre la nature, c’est se battre contre nous-mêmes. Nous sommes profondément liés à cet écosystème, et je trouve dommage la stigmatisation dont sont victimes les militants écologistes. En réalité, défendre la nature est aussi une forme de résistance pour la survie de notre propre espèce. Une librairie jeunesse féministe peut mettre en lumière ces combats et leurs enjeux pour inspirer à la fois petits et grands.
Ce serait vraiment un sujet fascinant pour un tout autre épisode, j’avoue. Mais dans la suite de mes questions, …
Quelles ressources tu recommanderais aux personnes qui nous écoutent ?
Pour Noël, pour les enfants, je recommande particulièrement la collection Petite et Grande, éditée chez Kiemann. C’est une série de livres mettant en avant des rôles modèles inspirants, des portraits de personnes qui n’étaient pas destinées à changer le monde, mais qui ont pourtant eu un impact immense. Ce qui est génial avec cette collection, c’est qu’elle est accessible et qu’elle permet de créer une vraie dynamique avec les enfants, en explorant ensemble des figures comme Rosa Parks, David Bowie, Zahadid, ou Ada Lovelace. La collection met également en lumière des rôles modèles féminins, LGBT, ou porteurs de handicap, ce qui correspond parfaitement à l’esprit d’une librairie jeunesse féministe qui valorise la diversité et l’inclusion.
Je conseillerais également, au vu de tout ce que nous avons abordé dans cet épisode, d’essayer d’offrir des livres liés aux sciences pour les petites filles. Ces ouvrages peuvent éveiller leur curiosité et leur montrer qu’elles ont toute leur place dans ces domaines. Et pour les petits garçons, pourquoi ne pas offrir des livres ou même des poupées ? Prendre le contre-pied des stéréotypes habituels peut être une belle surprise et une manière de casser les normes genrées. Une librairie jeunesse féministe peut être un excellent endroit pour trouver ce genre de cadeaux originaux et éducatifs.
Merci pour ces recommandations.
Que signifie le terme féminisme pour toi ?
Pour moi, le féminisme, c’est vraiment ce mouvement qui cherche à apporter l’égalité des genres. C’est dommage qu’il soit parfois perçu comme un terme clivant. Par exemple, lorsque je disais que ma librairie était une librairie jeunesse féministe, certaines personnes trouvaient ce terme trop fort ou polarisant. Pourtant, je pense que cela reflète une incompréhension de tout ce que le féminisme a apporté, non seulement aux femmes, mais aussi aux hommes. L’égalité des genres bénéficie à l’ensemble de la société, pas seulement à un groupe spécifique.
Aujourd’hui, j’utilise davantage le terme librairie antisexiste. Je trouve ce terme plus inclusif, car il englobe aussi les personnes qui ne s’identifient pas uniquement comme femmes. Antisexiste me semble ouvrir davantage de portes et créer un espace où chacun peut se sentir concerné. Cela dit, je reste convaincue que nous devons beaucoup au mouvement féministe. Malheureusement, la société ne mesure pas toujours l’impact de ces luttes historiques. Une librairie jeunesse féministe, ou antisexiste, joue un rôle éducatif en valorisant ces combats et en permettant à chacun de mieux comprendre leur importance.
Oui, tu as raison, cela rejoint ce que nous disions sur le manque d’esprit critique. Beaucoup de personnes jugent rapidement sans chercher à comprendre ce que représente réellement le féminisme. C’est souvent plus facile de critiquer que de s’investir pour approfondir un sujet. Peut-être que la culture actuelle du « tout, tout de suite » y contribue : avec des services comme Amazon ou Uber Eats, l’effort devient presque obsolète. Cette instantanéité peut nous éloigner d’une démarche de réflexion ou de recherche plus profonde. Une librairie jeunesse féministe offre un espace pour valoriser la réflexion et encourager chacun à s’informer à son rythme.
C’est pour cela que valoriser la parole des personnes concernées est essentiel pour changer le monde, même à petits pas. Chaque récit, chaque expérience partagée contribue à faire avancer la compréhension collective et à déconstruire les stéréotypes. Une librairie jeunesse féministe est un levier puissant pour amplifier ces voix et soutenir ces combats, un livre après l’autre.
Qui aimerais-tu voir au micro de Matrimoine Féministe ?
Tout à fait. Je suis bien d’accord avec toi.
Eh bien, puisqu’on a évoqué Céline Steyer, je me dis que ce serait une excellente idée de l’inviter à ton micro. Le travail qu’elle mène avec son podcast est vraiment remarquable. Elle met en lumière des figures féminines contemporaines qui méritent d’être reconnues. Alors, je te recommanderai chaleureusement d’interviewer Céline Steyer pour continuer à explorer ces thématiques importantes. Une librairie jeunesse féministe et un podcast comme celui de Céline ont une mission commune : amplifier les voix de femmes inspirantes et engager un dialogue autour de leurs parcours.
Ça serait avec plaisir, merci pour cette recommandation. J’écoute aussi son podcast et je le trouve excellent. D’ailleurs, je me souviens de ses débuts, lorsqu’elle s’adressait à la fois aux enfants et aux femmes, avec un format un peu différent de ce qu’elle fait aujourd’hui. C’est intéressant de voir comment son podcast a évolué et trouvé sa voie en se dédiant aux enfants. Cela montre aussi l’importance de s’adapter pour mieux toucher son public, comme une librairie jeunesse féministe le fait en sélectionnant soigneusement ses ouvrages.
Merci beaucoup pour cet épisode. Je l’ai trouvé très enrichissant, et je tiens aussi à remercier les personnes qui nous ont écoutées jusqu’au bout. Ces dialogues sont essentiels, et le simple fait d’écouter un épisode de podcast est déjà un premier pas pour agir à son échelle. Chaque discussion, chaque réflexion compte pour construire un monde plus inclusif et équitable.
Ciao ciao tout le monde ! N’hésitez pas à vous inscrire à la newsletter !
Merci beaucoup Esthel. Au revoir, à bientôt !
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES
Ses rôles modèles et ressources mises en avant
- Vandana Shiva
- La collection Petite et Grande, éditée chez Kiemann.
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Episode complémentaires
- La parentalité avec Elena Petit Aznar
- Le petit guide fun et simple du féminisme avec Samantha Feitelson
- Tes livres jeunesse inclusifs avec Sylvie Li
- La parentalité décoloniale avec Charline